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Cet ouvrage est l’une des éditions plantiniennes d’un des traités d’anatomie les plus diffusés de la Renaissance, publié d’abord en espagnol à Rome en 1556, ensuite en italien à Venise en 1559. C’est sur la base de l’édition italienne que Plantin fit réaliser la traduction latine à l’attention d’un public international. L’étude de l’anatomie était alors en plein essor, en dépit des restrictions que l’Église imposait à la pratique de la dissection.
Les 42 gravures contenues dans l’ouvrage sont pour la plupart des copies (éventuellement améliorées) de celles du traité fondateur de Vésale, le De humani corporis fabrica (1543). Les dessins précis et les légendes explicatives rassemblées en tête de chaque partie sont d’une modernité remarquable. L’ostéologie est abordée dans un premier chapitre, puis la myologie (l’étude des muscles), la vascularisation et enfin l’étude des organes. Aujourd’hui, c’est encore dans cet ordre qu’est enseignée l’anatomie, et tous les manuels actuels sont rédigés suivant le même schéma. Bien entendu, il y a des erreurs, notamment le fait que le sang artériel soit représenté provenant du cerveau et le sang veineux s’y dirigeant. La physiologie du cœur et celle du foie n’étaient pas encore connues au XVIe siècle.
La plus célèbre gravure de l’ouvrage représente un homme et sa musculature tenant dans une main sa peau et dans l’autre un couteau de dissection. Elle rappelle la représentation de saint Barthélémy dans la fresque du Jugement dernier de la Chapelle Sixtine, peinte par Michel-Ange entre 1534 et 1541. On peut penser que l’auteur de la gravure a voulu rendre hommage à l’audace de la création de Michel-Ange.
Commentaire rédigé par Alain Rosière dans le cadre de l'exposition Quand la médecine rencontre son patrimoineCet ouvrage de Juan Valverde de Hamusco est précieux à plus d’un titre.
D’abord, son auteur a manifesté beaucoup d’audace et de courage pour le rédiger et le faire publier. Malgré l’humanisme de la Renaissance initié au XIVe siècle, les premiers anatomistes dont fait partie Valverde ont rencontré les plus grandes difficultés pour se procurer des cadavres pour la dissection et l’étude de l’anatomie humaine. Particulièrement à Rome où a étudié Valverde, les papes se montraient réticents et l’Inquisition exerçait un contrôle vigilant. Heureusement, grâce à la protection de certains princes éclairés et à l’appui des plus grands peintres et sculpteurs de l’époque, les persécutions dont les anatomistes étaient l’objet s’atténuèrent rapidement. Ce n’est certainement pas sans arrière-pensée que Valverde a dessiné une des figures devenue la plus célèbre de cet ouvrage : la figure représente un homme et sa musculature tenant dans une main sa peau et dans l’autre un couteau de dissection. Pour l’anecdote, si vous avez la chance de visiter la chapelle Sixtine au Vatican, regardez-y attentivement la représentation du Jugement dernier peint par Michel-Ange entre 1534 et 1541. Saint Barthélemy, un des douze apôtres du Christ, tient dans une main un couteau et dans l’autre sa peau écorchée similaire à la gravure de Valverde. Michel-Ange a fait preuve de beaucoup d’audace et de courage et son œuvre a d’ailleurs fait scandale car tous les personnages, y compris le Christ, y figuraient entièrement nus. Valverde a vraisemblablement voulu ainsi rendre un hommage à cette audace.
Ensuite, cet ouvrage est précieux car il est moderne. Les dessins sont précis et même si les légendes et leurs abréviations sont un peu ardues à comprendre au début, leur usage devient rapidement évident car il s’agit toujours des mêmes sigles pour les mêmes structures. L’ostéologie est abordée dans un premier chapitre puis la myologie (l’étude des muscles), la vascularisation, et enfin l’étude des organes. En 2017, c’est encore dans cet ordre-là que nous enseignons l’anatomie à nos étudiants et tous les manuels d’anatomie actuels sont rédigés suivant le même schéma. De plus, ce livre est écrit en latin, tout comme la nomenclature internationale en anatomie de nos jours. Bien entendu, il y a des erreurs et notamment le fait que le sang artériel y est représenté provenant du cerveau et le sang veineux s’y dirigeant. La physiologie du cœur et celle du foie n’étaient pas encore connues au XVIe siècle. Il faudra attendre 1628 avec William Harvey pour avoir une description précise du cœur et 1816 avec François Magendie pour une description fiable du foie. C’est aussi en cela que ce livre est précieux : il démontre que nous devons rester enthousiastes car beaucoup de choses restent à découvrir.
Enfin cet ouvrage est précieux car il a été imprimé en 1579 par Plantin à Anvers. L’officina Plantiniana est la plus grande imprimerie d’Europe au XVIe siècle et Christophe Plantin avait la réputation de n’éditer que des ouvrages de qualité en homme d’affaires avisé qu’il était. Quel plaisir de manipuler un ouvrage ancien de près de 450 ans en très bon état de conservation ! Combien d’étudiants ont étudié l’anatomie en prenant ce livre comme référence ? Cela me rappelle une anecdote que le professeur Luc Michel – mon chef de service dans le service de chirurgie générale et digestive aux Cliniques Universitaires de Mont-Godinne – m’a racontée. Il a été le premier dans l’institution à faire l’acquisition d’un ordinateur personnel au début des années 1980. Cet ordinateur lui servait pour la rédaction de tous ses travaux scientifiques dont il faisait une sauvegarde sur les toutes premières disquettes dites « 8 pouces ». Quelques années plus tard, il a fait l’acquisition d’un nouvel ordinateur plus puissant de la même marque. Quelle ne fut pas sa surprise de constater que cet engin, était incapable de lire les disquettes « 8 pouces » sur lesquelles étaient enregistrées des centaines d’heures de travail ! Il lui était donc impossible d’y copier ses travaux. Il a dû garder jusqu’à la dernière minute son tout premier ordinateur pour consulter ses premiers ouvrages. Nous avons tous chez nous de vieux films au format Super 8 alors que les derniers projecteurs Super 8 sont défaillants, nous avons tous des cassettes vidéo des années 1990 qui tressautent quand nous les regardons avec nos magnétoscopes s’ils sont encore opérationnels. Par contre, le papier traverse les âges et même si de nombreux ouvrages ont péri dans des incendies, il reste toujours quelque part un exemplaire intact. Je vous encourage à garder tous vos manuscrits et tous vos livres car ils vous survivront. Ils persisteront aussi certainement à vos ordinateurs, à vos tablettes et à vos smartphones qui deviendront rapidement inopérants.
Pour conclure, je veux rendre hommage à tous les écrivains, à tous les éditeurs et à tous les bibliothécaires pour les trésors qu’ils nous donnent et qu’ils conservent avec soin. L’écriture est un des fondements de notre humanisme et de notre civilisation, et cela est très précieux.
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A⁴ B⁶ C-E⁴ F⁶ G⁴ H⁶ I-N⁴ O⁶ P-V⁴
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Notes
Matagne (BUMP), V 76. Cockx-Indestege (KBR), 74. The Plantin Press 1555-1589, Q-Z, 2415.
BUMP Notes : État matériel : Mq les pp. 83-84 (I4), 99-100 (L4), et 171-172 (V2), manque aussi la planche 3 du livre 1.
BUMP Notes : Adresse au colophon : Antveriae [sic] excudebat Christophorus Plantinus, Architypographus Regius, XVI Kal. Maii anno domini 1579. - Date de 1572 sur la page de titre.
BUMP Notes ; Provenance : Vignette Museum Artium Prov. Belg. S. I. (premier contreplat), Cachet Museum Artium P.B.M. Soc. Iesu (verso de la page de titre).
BUMP Notes : Auteur identifié dans l'ouvrage (A2). - Page de titre gravée
BUMP Notes : Détail des planches : Livre 1 (7 planches) -- Livre 2 (16 planches) -- Livre 3 (6 planches) -- Livre 4 (1 planche) -- Livre 5 (3 planches) -- Livre 6 (5 planches) -- Livre 7 (4 planches).