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Michel de Montaigne est né en 1533 au château de Montaigne, dans le Périgord. Il fit des études de droit, puis une carrière de juriste, et devint à deux reprises maire de Bordeaux. Son existence fut marquée aussi, en 1580-1581, par un voyage qui le mena en Suisse, en Allemagne et en Italie.
La volonté de produire une œuvre littéraire a procédé, chez Montaigne, d’un travail de deuil. Son ami, Étienne de La Boétie, est mort jeune, en 1563, et Les Essais correspondent au désir de continuer un dialogue trop tôt interrompu. Montaigne commence à écrire en 1571, à l’âge de 38 ans. Les deux premiers livres des Essais paraissent en 1580 chez un imprimeur bordelais, peu avant que l’auteur parte en voyage. Suit une édition parisienne, en 1588, augmentée d’un troisième livre. Trois ans après la mort de l’auteur (qui est intervenue en 1592), la « fille élective » et héritière intellectuelle de celui-ci, Marie de Gournay, donna une édition nouvelle des Essais, qui fut longtemps considérée comme l’édition « définitive » et qui était censée intégrer les derniers ajouts et corrections apportés par Montaigne à son texte. À la fin du XVIIIe siècle, la découverte – dans un couvent de Bordeaux – d’un exemplaire de l’édition de 1588 portant des modifications manuscrites de la main de l’auteur a jeté le trouble, parce que les corrections de l’« exemplaire de Bordeaux » et celles de l’édition « Gournay » ne coïncidaient pas. Les spécialistes s’accordent cependant à considérer, aujourd’hui, que l’édition « Gournay » a été établie sur des notes postérieures à celles qui figurent sur l’« exemplaire de Bordeaux » et contient bien la version ultime des Essais.
La bibliothèque Moretus Plantin possède un exemplaire de cette édition de 1595, réalisée par l’imprimeur-libraire parisien Michel Sonnius – dont le père (également prénommé Michel) avait publié auparavant une édition de Tite-Live assortie de commentaires abondants. La page de titre des Essais de 1595 met en évidence l’apport de cette édition posthume, appelée à supplanter les précédentes : « Édition nouvelle, trouvée après le deceds de l’Autheur, reveuë & augmentée par luy d’un tiers plus qu’aux precedentes Impressions. » La page suivante contient un extrait du privilège du roi, qui accordait à Abel L’Angelier, « Marchant Libraire Iuré en l’Vniversité de Paris » le droit exclusif, pendant dix ans, de commercialiser l’ouvrage. Vient ensuite une très longue préface rédigée par la « Fille d’Alliance » de Montaigne, qui commençait par déplorer le « froid recueil, que nos hommes ont fait aux Essais ».
« C’est moi que je peins » (« Au lecteur »), « [j]e me suis présenté moy-mesmes à moy, pour argument et pour subject » (Livre II, chap. 8) : le propos de l’auteur, dans Les Essais, est de se connaître, et de se faire connaître par la médiation d’un écrit « à sauts et à gambades » (Livre III, chap. 9) et « de bonne foi » (Livre II, chap. 17). L’ouvrage offre aussi, en grande abondance, des citations d’autres écrivains, principalement choisis parmi les auteurs de l’Antiquité (il importe de « frotter et limer notre cervelle contre celle d’autruy » [Livre I, chap. 25]) : de la sorte, les trois volumes de Montaigne dressent une espèce de bilan de toute la pensée antique, passée au crible d’un cerveau moderne.
Les Essais donnent à lire une quarantaine de citations de Tite-Live ; certaines sont traduites en français, les autres sont laissées en latin. Montaigne emprunte aux Décades des anecdotes relatives à l’art de l’équitation (que l’auteur bordelais plaçait au premier rang de ses préoccupations), aux coutumes de l’armée romaine, à la guerre, à des actes de bravoure et à la politique… Il y puise aussi des observations psychologiques ou morales, par exemple au chapitre 4 du livre I des Essais (« Comme l’ame descharge ses passions sur des objects faux, quand les vrais luy defaillent ») :
« Livius parlant de l’armée Romaine en Espaigne, après la perte des deux freres ses grands Capitaines, Flere omnes repente, et offensare capita1 : C’est un usage commun. »
Enfin, Montaigne trouve aussi chez Tite-Live toute une galerie de « modèles de vie » : pratiquer, par le moyen des historiens, ces grandes âmes des meilleurs siècles, « c’est une étude de fruit inestimable » (Livre I, chap. 26).
On note que, de l’historien latin à l’écrivain français, les transpositions de sens ne sont pas rares, et les citations sont parfois approximatives.
Michel Brix
1 Histoire romaine, XXV, 37 : « Tous aussitôt de pleurer, et de se frapper la tête. » Les deux frères mentionnés, commandants de l’armée romaine en Espagne pendant la deuxième guerre punique, sont Publius et Gnaeus Scipion.
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Notes
Cette édition contient la préface de sa fille d'alliance Marie de Jars de Gournay (18 pages)
Provenance : Vignette Facultés universitaires N.-D. de la Paix Namur Phil. & Lett. avec ancienne cote Litt. fran. fol. 18
Vignette Colleg. Namurc. S.J. Bibl. Domus
Cachet Biblioth. : Collegii NamurC:S.J. IHS
Cachet Biblioth. Fac. Univ. Namurc. N.D. Pacis Phil. & Litt.