Columnae Traiani imperatoris quae adhuc Romae extat, has duas fecimus descriptiones, ... Imperatoris huius res geste non dissimiles prorsus his quae in columna ... decem annorum privilegio impetrato
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Parmi les monuments de la Rome antique, la Colonne de Trajan occupe une place d'honneur de par sa valeur exceptionnelle de même que par son état de conservation. Haute de 29 m 78, elle est décorée sur toute sa surface d'une bande en relief montante sur laquelle sont peints les épisodes des guerres de l'empereur Trajan (98-117) en Dacie - l'actuelle Roumanie -, en 101-102 et 105-106. La colonne était à l'origine couronnée d'une statue de l'empereur dont les cendres se trouvaient dans la base. Elle faisait partie de l'architecture grandiose du Forum de Trajan, financé en grande partie avec le butin des guerres en Dacie. On connaît plusieurs imitations de cet extraordinaire monument, d'abord à Rome même où la colonne de Marc-Aurèle en reprend l'idée. Au Moyen Âge, l'évêque de Hildesheim, Bernward, s'en inspira pour sa colonne en bronze qui se situe encore aujourd'hui dans la cathédrale à Hildesheim. Les imitations qui flanquent l'église Saint-Charles- Borromée à Vienne ("Karlskirche") ou la colonne napoléonienne sur la Place Vendôme à Paris sont, quant à elles, plus récentes. La quantité de détails fournis par les reliefs, ainsi que leur qualité exceptionnelle, ont suscité l'attention de nombre d'artistes et auteurs antiquaires, notamment comme source iconographique pour une armée romaine en campagne. Certaines difficultés se posent toutefois pour analyser ce monument. Si, dans l'Antiquité, on pouvait voir les parties supérieures à partir d'un des bâtiments situé à côté et qui constituaient les bibliothèques grecque et latine du complexe, ce n'était plus le cas aux Temps Modernes.
La Columnae Traiani descriptio, titre qui ne figure d'ailleurs pas dans le volume, est une oeuvre presque aussi remarquable que la colonne elle-même. Cet ouvrage consiste en une série de planches sur des bifeuillets qui reproduisent tous les reliefs du monument, de la base jusqu'au sommet, dans tous ses détails. Les chiffres (1-320) qui distinguent les différentes scènes dans les planches suggèrent la possibilité d'un commentaire détaillé qui pourrait accompagner le volume, mais dont aucune trace ne se retrouve dans l'exemplaire conservé à Namur. Précédant les estampes illustrant les détails de la colonne, trois autres planches présentent le monument en tant qu'architecture: deux de ces illustrations donnent respectivement une section et une vue générale. Ces deux planches peuvent être dépliées. Si dans la gravure de la vue générale, on a repris l'inscription sur la base telle qu'elle se trouve en réalité (et toujours) sur le monument, on l'a remplacé par un texte "éditorial" dans l'estampe de la section: "Columnae Traiani imperatoris quae adhuc Romae extat has duas fecimus descriptiones... Imperatoris huius res geste non dissimiles prorsus his quae in columna insculptae sunt magno artificio in aere excuduntur quarum maxima pars apsoluta est brevique Romae imprimentur apud Franciscum Villamoenam decem annorum privilegio impetrato". Dans plusieurs bases de données et catalogues, cette inscription sert comme titre pour ce recueil - mais en réalité, de façon erronée: cette inscription se réfère seulement aux deux grandes vues qui donnent un aperçu de l'ensemble de la colonne, comme c'est d'ailleurs clairement indiqué: "has duas fecimus descriptiones", "nous avons fait ces deux descriptions (= illustrations)". Vers la fin, ce texte annonce le projet de publication de tous les reliefs de la colonne, stipule que la plus grande partie est déjà terminée et que ces planches paraîtront ("imprimentur", soit au futur !) dans le plus bref délai chez Francesco Villamena (Assises, 1566 - Rome, 1624). Cet apprenti de Cornelis Cort à Rome est surtout connu comme graveur d'après des oeuvres d'art antiques, de Raphaël ou Jules Romain, même s'il a également produit des scènes populaires. Il est clair que la publication de ces deux grandes gravures avec l'ensemble de la colonne était conçue comme une sorte de publicité pour l'ouvrage avec tous les reliefs et que, de là, on ne peut reprendre cette inscription comme datation ou localisation pour cet ouvrage comme c'est le cas dans certaines bases de données (comme WorldCat).
Sur la feuille de garde de l'exemplaire namurois, on lit cependant une autre inscription, manuscrite mais elle aussi en latin, qui date de la fin du XVIème ou du début du XVIIème siècle: "La colonna Traiana. Cum explicationibus Alfonsi Ciaconii Hieronymus Mutianus pictor Romanus pinxit et per Franciscum Vilamenam in es incidi fecit Rome anno 1575" ("La colonne de Trajan que Girolamo Muziano, peintre de Rome, a peinte et qu'il a faite graver par Francesco Villamena à Rome en 1575, avec des explications d'Alfonso Chacon"). Alfonso Chacon, un Espagnol qui vivait à Rome (ca 1540-1599) a publié plusieurs oeuvres d'histoire dans lesquelles il soutient régulièrement des opinions plutôt légendaires et sans véritable critique. Chacon a, en effet, publié un ouvrage sur les guerres de Dace sur la base des reliefs de la colonne de Trajan: Historia utriusque belli Dacici a Traiano Caesare gesti ex simulachris quae in columna eiusdem Romae visuntur collecta (Romae : apud Franciscum Zanettum et Bartholomaeum Tosium socio, 1576). Dans le titre, cependant, il manque la référence à une série de planches ou à Villamena. Comme aucune des estampes ne porte un nom d'artiste, l'inscription manuscrite dans l'exemplaire à Namur reste notre seul indice pour dater le dessin des scènes par Girolamo Muziano (ca 1532-1592).
Michiel Verweij
Bibliothèque royale de Belgique - Section des Manuscrits
Mai 2013
Pour en savoir plus
- D. Kühn-Hattenhauer, Das grafische Oeuvre des Francesco Villamena, Berlin, 1979.
- Michiel Verweij, [Columnae Traianae descriptio]; [Romae], [apud Franciscum Villamoenam], [1575 ?], dans L'Antiquité de papier. Le livre d'art, témoin exceptionnel de la frénésie de savoir (XVIe - XIXe siècles), sous la dir. de M. Lefftz et C. Van Hoorebeeck, avec la coll. d'H. Cambier, Namur, 2012, n°18.
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Mention de première édition au crayon ; Vignette Facultés universitaires N.-D. de la Paix Namur Phil. & Lett. (premier contreplat) ; Cachet Collegium N.-D. Pacis NamurC S.I. ; Ex-libris (dissimulé) Bib. Renessiana.