Dès le premier Noël de la Grande Guerre, le Cardinal Mercier, primat de Belgique et archevêque de Malines, lit en chair une lettre pastorale intitulée Patriotisme et Endurance. Le texte était destiné à être lu dans toutes les églises du diocèse de Malines à partir du 1er janvier 1915. Mais il suscita rapidement la colère de l’occupant qui en interdit la diffusion. Qu’importe, la pastorale se répand clandestinement et à une vitesse qui révèle que le message est bien celui que les Belges voulaient entendre. Ici, l’exemplaire est d’ailleurs une reproduction calligraphiée et enluminée réalisée dans le secret par les sœurs de l’abbaye bénédictine de Maredret.

« L’épreuve est une arme à deux tranchants. Si vous vous révoltez contre elle, elle vous blessera à mort. Si vous courbez la tête et l’acceptez, elle vous sanctifiera. (…). Ne faisons pas consister le courage dans la bravade, ni la bravoure dans l’agitation. (…) Persévérez dans ce ministère de paix, qui est pour vous la forme la plus saine du patriotisme. Acceptez de grand cœur les privations que vous avez à subir. (…) Faites-vous les champions des vertus que vous commandent à la fois l’honneur civique et l’évangile. »

Par ces mots, le Cardinal Mercier donne le ton de la Résistance pendant la Première Guerre mondiale : elle sera pacifique. Il exhorte les Belges à endurer l’occupation en restant exemplaires, sans chercher l’opposition franche et violente. Il parle d’une « autorité non légitime » à propos des Allemands. Et puis, la particularité de cette pastorale est de fusionner le patriotisme et la foi. « Il n’y a point de parfait chrétien qui ne soit un parfait patriote », lance le Cardinal. Qui l’affirme : ces soldats qui tombent sur le champ de bataille, ils sont « nos sauveurs ».

Ce texte a fait du Cardinal Mercier une icône de la résistance morale dans le monde entier.