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Fait partie de Natura Mosana. Année 2021. Tome 74. Nouvelle série
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P904020
BE ISSN 0028-0666

NATURA
MOSANA
Revue de sciences naturelles en Wallonie

Numéro spécial
Centenaire

74
nouvelle série

2021

Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 1-2

Éditorial

IL Y A 100 ANS, NAISSAIT LA SOCIÉTÉ DES
NATURALISTES DE CHARLEROI
Dans un monde dont la sociologie évolue avec une rapidité
et une immédiateté encore jamais observées, le centenaire
d’une association, a fortiori naturaliste, est un événement
devenu suffisamment rare pour être relevé et fêté. Cette
durée de vie hors du commun n’est pas le fait du hasard.
Elle traduit certes l’engagement et le dynamisme de ses
membres et responsables successifs, qu’il faut bien sûr
souligner. Mais cette longévité est associée à l’intérêt
général jamais démenti pour la nature, malgré le retrait
plus ou moins drastique des sciences dans l’enseignement
à tous les niveaux.
Il n’est pas possible de retracer ici tous les détails
historiques de la longue vie de la Société (cet historique
fera l’objet d’un ouvrage très documenté et imprimé par
ailleurs). Mais il est intéressant d’en dégager les lignes de
faîte à l’attention des lecteurs de Natura Mosana.
La création de la Société des Naturalistes de Charleroi
s’inscrit dans un contexte local particulier. Il est socioéconomique, la région étant imprégnée d’une forte activité
minière et industrielle. Il est aussi d’ordre culturel : il
n’existait pas encore d’association de ce type dans la
région.
C’est ainsi que le 22 janvier 1922, à l’initiative du Docteur
Arthur CULOT1, quelques naturalistes locaux se réunissent
pour jeter les bases de la raison sociale de la nouvelle
société, à savoir l’étude et la vulgarisation des sciences
naturelles. Les statuts, agréés par les 132 membres de la
première assemblée générale, insisteront sur le
rayonnement de la société – dont le siège est logiquement
basé à Charleroi – mais qui couvre tout l’arrondissement,
de même que celui de Thuin, et qui s’étend en fait à tout
l’Entre-Sambre-et-Meuse. De même, la vulgarisation de
toutes les disciplines de l’histoire naturelle est mise en
avant. Enfin, une politique d’intervention sera mise en
place tout particulièrement auprès des autorités publiques
pour renforcer l’enseignement des sciences naturelles, dont
les faiblesses sont – déjà – pointées.

1

Arthur CULOT [1872-1953] fut proposé comme premier
président, et il allait le demeurer jusqu’à sa mort. Médecin
diplômé de l’Université libre de Bruxelles, il avait eu pour
principaux maîtres en sciences naturelles les professeurs Jean

Dès leur création, les Naturalistes de Charleroi proposent
de nombreuses excursions, d’abord dans les environs
immédiats de la ville, car les endroits intéressants et peu
prospectés étaient alors nombreux, notamment à Châtelet,
Landelies, Loverval Jamioulx, Montignies-le-Tilleul,
l’abbaye d’Aulne, etc. Progressivement, ils s’aventurent
au-delà, dans les vallées qui font la richesse de la botanique
régionale, celles de l’Eau Noire, de la Lesse, de la
Molignée, de l’Orneau. Le littoral fera aussi l’objet d’une
activité marquante. Par ailleurs, l’organisation de
l’herborisation générale de la Société royale de Botanique
de Belgique par la jeune association signera sa
consécration en 1923.
L’entre-deux-guerres définira une période faste, avec la
poursuite des activités de terrain, toujours fort axées sur la
botanique, et l’émergence de nouvelles disciplines, comme
l’entomologie, puis de la mycologie. Les conférences
apparaîtront, de même que les fondations d’une
bibliothèque. Avec un constat quelque peu amer : les
jeunes n’accrochent pas… La Seconde Guerre mondiale et
son triste cortège qui ne forme qu’une parenthèse, comme
le mentionnera A. CULOT lors de son discours à
l’assemblée générale de 1946, impose un ralentissement de
l’activité mais pas son arrêt complet.
Le vingt-cinquième anniversaire sera marqué par la
création d’une revue fédérant quelques associations
wallonnes qui partagent les mêmes objectifs : en juillet
1947, à l’initiative du père Paul HENRARD s.j., professeur
de botanique aux Facultés universitaires Notre-Dame de la
Paix à Namur, la Société royale des Naturalistes de
Charleroi, la Société Botanique de Liège, le Cercle des
Entomologistes Liégeois et la Société des Naturalistes de
Namur-Luxembourg créeront Natura Mosana, qui publiera
leurs activités principales et les contributions de leurs
membres de 1948 à ce jour. Les ‘Amis du Musée Léon
Frédéricq’ et ‘les Naturalistes verviétois’ se joindront au
quatuor, mais les premiers disparaîtront dans les années
1980 et les seconds arrêteront leurs activités après 2008.
En plus de cette publication, jadis trimestrielle, les
Naturalistes de Charleroi invitaient leurs membres aux
diverses activités par le biais de documents ronéotypés.

MASSART, botaniste, et Auguste LAMEERE, entomologiste. Il fut
donc naturellement passionné par la nature, et particulièrement
attiré par la botanique. Il fut d’ailleurs membre de la Société
royale belge de Botanique.

1

Bien plus tard, l’arrivée de l’informatique et des
traitements de texte, plus confortables et efficaces,
permettront la création d’un bulletin trimestriel, comme
canal de contact. Signalons enfin que depuis une trentaine
d’années, à côté des activités locales toujours fidèles à
l’esprit des créateurs, et résolument basées sur l’étude et la
vulgarisation des sciences naturelles, des sessions de
botanique sont organisées chaque année, essentiellement
en France, où nombre de régions ont été ainsi visitées.
L’idée naissante d’une société naturaliste à Charleroi, il y
a maintenant un siècle, n’était pas un pari gagné d’avance.

L’opiniâtreté et l’énergie de ses membres en ont garanti le
succès, contre vents et marées, et pour de belles années
encore.
Les articles présentés dans ce numéro spécial mettent en
évidence cette dynamique toujours vivace de la Société des
Naturalistes de Charleroi. Cette compilation de textes n’est
certes pas exhaustive , mais témoigne du souci de la rigueur
d’observation et de l’analyse scientifique, approches qui ne
sont pas du tout incompatibles avec le plaisir qui y est
associé. Natura Mosana est donc fière de pouvoir
s’associer à ce jubilé en les publiant.

Annette COLOT
Présidente de la Société des Naturalistes de Charleroi
Philippe MARTIN
Secrétaire responsable de Natura Mosana
Michel ROUARD
Coordinateur du volume ‘Spécial Centenaire’

2

Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 3-12

Á propos de l’évolution de la répartition de la
Vipère péliade (Vipera berus) en Wallonie
Philippe RYELANDT *

RÉSUMÉ
La répartition de la Vipère péliade (Vipera berus) en Belgique et dans les régions limitrophes a été largement surestimée jadis. Diverses
études et atlas réalisés à partir de 1968 ont permis de repréciser son aire géographique locale et, malheureusement, de constater son
déclin dont le contexte est abordé dans cet article. La problématique de la translocation et de la réintroduction de cette espèce est
également évoquée.
ABSTRACT
The distribution of the peliad viper (Vipera berus) in Belgium and neighbouring regions has been largely overestimated in the past.
Various studies and atlases carried out since 1968 have made it possible to redefine its local geographical area and, unfortunately, to
note its decline, the context of which is discussed in this article. Also mentioned are the problems of translocation and reintroduction of
the species.

* rue des Déportés 50 B-6120 Jamioulx, Belgique. Courriel : p.ryelandt@belgacom.net

_________________________________________________

INTRODUCTION
La Vipère péliade, Vipera berus (Fig. 1) est une espèce à
forte charge symbolique, et le numéro spécial du centième
anniversaire de la Société royale des Naturalistes de
Charleroi, est certainement une excellente tribune pour
passer en revue les répartitions actuelle et ancienne de cette
espèce, ainsi que certains principes conservatoires permettant de garantir la survie de ce serpent bien menacé.

et ne devrait donc pas être un candidat à l’extinction. Et
pourtant, …

Le terme Vipera était déjà utilisé par les Latins, provenant
de la contraction des mots vivus, vivant et parere, enfanter.
En effet, la péliade pond ses œufs lorsque les embryons sont
au terme de leur développement (viviparité).
Le genre Vipera comprend une vingtaine d’espèces
présentes essentiellement dans la zone paléarctique, mais
c’est la Vipère péliade qui présente l’aire la plus vaste,
occupant toute l’Eurasie, jusqu’au cercle polaire arctique
étant capable de se maintenir en zone froide grâce à la
combinaison d’adaptations à la fois physiologiques et
comportementales (VACHER & GENIER, 2010) lui donnant
la capacité d’économiser l’énergie lorsqu’elle chasse et se
reproduit. Cet animal des landes tourbeuses s’est
accommodé avec le temps à une grande diversité d’habitats,

Fig. 1. – La Vipère péliade. Petigny, mai 2012.
(Photo : Ph. RYELANDT)

3

RÉPARTITION DE LA VIPÈRE AVANT 1968
Au début du 20e siècle, les connaissances sur la répartition
de la Vipère péliade dans nos régions étaient totalement
erronées. On croyait dur comme fer que l’espèce existait
pratiquement dans toutes les provinces belges, autant celles
du nord que du sud. On pensait également qu’elle occupait
la plupart des régions limitrophes de notre pays (PARENT,
1968). Comment a-t-il été possible de se tromper à ce point
et sur un aussi vaste territoire ? Sans doute, la peur des
serpents a-t-elle joué ? Par précaution, ne valait-il pas
mieux affubler du nom de « vipère » tout serpent ou orvet
que l’on rencontrait afin de se prémunir d’une éventuelle
morsure ? De plus, la relative ressemblance de la Vipère
péliade avec la Coronelle lisse, Coronella austriaca (Fig.
2), a souvent prêté à confusion.

l’entièreté du Grand-Duché de Luxembourg, la Lorraine
Française, les Hautes-Vosges et la partie de l’Allemagne
occidentale proche de notre frontière.
Après ces corrections, d’ailleurs jamais remises en cause
par les études scientifiques ultérieures, la zone occupée par
la Vipère péliade au sud-ouest de la Belgique est
maintenant établie sur une vaste plage autour de la Botte de
Givet (Fig. 3). Cette nouvelle répartition est plus liée à son
passé historique et à son écologie (PARENT, 1968 ;
GRAITSON & PAQUAY, 2007).

Durant la période 1850-1967, ce genre d’erreur et le fait que
la Vipère occupait effectivement quelques stations dans le
nord-est du pays (PARENT, 1968), ont contribué à donner
une image totalement fausse du territoire occupé réellement
par la Vipère péliade dans nos régions.
Fig. 3. – Carte de distribution de la Vipère péliade en
Wallonie et dans les Ardennes françaises. (PARENT, 1968)

La carte publiée par PARENT (1968) intègre la somme de
130 stations de vipères péliades attestées dans la partie
ouest de la Famenne et de l’Ardenne, de part et d’autre de
la Meuse et dans le Département des Ardennes entre 1850
et 1968, soit environ 120 ans.

Fig. 2. – La Coronelle lisse. Givet, mai 1985.
(Photo : Ph. RYELANDT).

UNE AIRE DE RÉPARTITION MIEUX CERNÉE
En 1968, après trois années de recherches méticuleuses
commanditées par l’Institut des Sciences Naturelles de
Belgique, G.H. PARENT a dressé une nouvelle carte de la
répartition de la Vipère péliade en Belgique et dans les
régions voisines (PARENT, 1968)1.
De l’aire initiale présumée avant 1968, il a rayé toute la
Région flamande, sauf les quelques stations connues en
Campine anversoise. En Wallonie, il a supprimé la totalité
de la province de Liège (Hautes Fagnes comprises) et la
partie orientale de la province du Luxembourg. Dans les
pays limitrophes de la Belgique, sont également effacés
1

Ce document eut pour vocation de mieux organiser la prévention
des accidents par morsure de la vipère en entreposant en
permanence du sérum antivenimeux dans certaines gares du pays.

4

Si ces résultats montrent déjà à l’époque la grande difficulté
de détecter l’espèce par des personnes non spécialisées, il
n’en reste pas moins que l’interprétation de données aussi
éparpillées dans l’espace et dans le temps, est loin d’être
aisée. Cet ensemble est-il homogène et stable ? Les
mentions les plus anciennes de la fin du 19e et du début du
20e siècle sont-elles encore d’actualité en 1968 ? G.H.
PARENT ne le prétend pas, et reconnait qu’il ne dispose
d’aucune évaluation numérique pour préciser le statut de
l’espèce. Il sait seulement qu’à son époque, les
concentrations les plus importantes de la Vipère péliade
s’observent dans les vallées de la Lomme, du Viroin et de
la Houille. Toutefois, l’animal ne semble pas menacé
d’extinction à l’époque. D’ailleurs, PARENT trouvait
étonnant qu’aux Pays-Bas, la Vipère péliade puisse
bénéficier de réserves naturelles spécifiques pour elle, et ce,
dès le début des années 1960 (PARENT, 1968).
LES ATLAS HERPÉTOLOGIQUES DE 1984 ET 2007
Après 1968, le grand public a pu profiter de deux
publications herpétologiques de grand intérêt. Il y eut

d’abord la publication « Protégeons nos Batraciens et nos
Reptiles » (PARENT, 1983) dans la collection « Animaux
menacés de Wallonie ».
Sans doute pour la première fois, un auteur présentait-il
d’une manière didactique, à la fois les facteurs de risques
qui menaçaient nos batraciens et reptiles de Wallonie et le
catalogue précis des remèdes à préconiser pour les
conserver. La Vipère péliade n’avait pas échappé à sa
vigilance et toutes les mesures proposées à l’époque sont
restées d’actualité même si d’autres se sont ajoutées par la
suite. Cette publication fut rapidement épuisée et
malheureusement non rééditée.
En 2007, paraissait l’atlas herpétologique de Wallonie
(JACOB et al., 2007). Cette publication de 384 pages conçue
par Aves-Raînne (Natagora) et éditée par le ministère de la
Région wallonne, fut le fruit d’un vaste travail collectif de
plus de 800 contributeurs provenant du monde associatif
mais aussi du Département Nature & Forêt (DNF) de la
Région wallonne.
Véritable « bible » pour les herpétologues, ce premier atlas
régional marque le passage de la récolte de données
fortuites à celle organisée de façon concertée et
systématique et ce, en collaboration avec des associations
nées au milieu des années 1980 telles que Raînne et la
cellule herpétologique des Cercles des Naturalistes de
Belgique basée à Vierves-sur-Viroin (Thierry DEWITTE).
Dans le texte consacré à la Vipère péliade (PAQUAY et
GRAITSON, 2007) force est de constater que la population,
décrite une bonne vingtaine d’années plus tôt, s’est
fortement réduite. Sur 150 carrés de 4 × 4 km où des vipères
étaient considérées présentes avant 1984, 58 sont encore
pointés (Fig. 4).

gestionnaires forestiers, agriculteurs, environnementalistes, citoyens, administrations communales, provinciales
et régionales. Les sites Natura 2000 wallons couvrent la
surface non négligeable de 220.000 hectares. Si, avec ce
projet, l’espoir est grand de pouvoir juguler le recul de la
biodiversité et, si possible la restaurer, il semble que la
Vipère péliade, reconnue depuis comme en grand danger
d’extinction, ne puisse en bénéficier directement.
Bien que considérée comme menacée dans tous les pays
européens, et inscrite sur la liste rouge de Wallonie, il n’est
pas toujours aisé de profiter d’investissements financiers
qui permettraient de mieux la protéger. Par exemple, si l’on
veut justifier l’achat de clôtures pour la défendre de
l’impact des sangliers surnuméraires qui la menacent
directement (GRAITSON et al., 2018). Les démarches sont
complexes et font intervenir des éléments qui entrent dans
le contexte Natura 2000, avec une évaluation des statuts
juridiques qui limitent ou retardent souvent les actions de
conservation qui devraient être menées d’urgence pour elle.

LA VIPÈRE MENACÉE D’EXTINCTION EN
WALLONIE
Si les informations du dernier atlas herpétologique ne
prêtaient guère à l’optimisme, le résultats des dernières
études scientifiques (Graitson et al. 2018) ainsi que des
inventaires menés par le groupe de travail Serpents de
Natagora, créé par Eric GRAITSON en 2015, ont confirmé le
déclin de cette espèce.
En 2019, sur base de 1700 visites standardisées, le constat
du délabrement de la population est indéniable : « l’espèce
a disparu ou est en très forte régression sur 90 % des sites
encore connus » (E. GRAITSON, com. pers.).
De plus, à côté du suivi régulier de l’espèce, signalons la
quasi-absence, depuis une vingtaine d’années, de nouvelles
données obtenues fortuitement sur l’aire historique
wallonne (E. GRAITSON, com. pers.). Ceci contraste assez
fortement avec une époque révolue où, sans recherches
systématiques, les découvertes de nouvelles stations de
vipères étaient quasi annuelles (PARENT, 1968 ; Michel
ROUARD, com. pers.).

Fig. 4. – Carte de répartition de la Vipère péliade en 2003
(d’après PAQUAY & GRAITSON, 2007)

LE RÉSEAU NATURA 2000 ET LA VIPÈRE
Comment le réseau des sites Natura 2000 a-t-il agi sur la
conservation de la vipère en Wallonie ? Avec le nouveau
millénaire, la Région Wallonne a entrepris cette tâche de
grande envergure et essentielle pour contribuer à
l’élaboration d’un réseau écologique européen. Sur le
papier, les acteurs de ce projet sont nombreux :

Assurément, la vipère est en souffrance d’un manque
flagrant de moyens de protection et, en 2019, le groupe de
travail Serpents a pointé, pour la dernière décennie, les
facteurs les plus dommageables pour l’espèce, en premier
lieu la superficie trop retreinte de sites protégés en vue de
conserver les dernières populations.
À ma connaissance, il semble qu’en huit ans, pas un seul
hectare en Wallonie n’a été acheté pour protéger ces
vipères, et ce malgré certaines opportunités d’achats. C’était
pourtant la première recommandation du plan d’actions «
vipère » publié en 2011 et édité par le Département Nature
et Forêt de la Région wallonne (DNF) (GRAITSON, 2011).
Ensuite, il y a ce constat affligeant que les plans de gestion
des sites où se trouvent les dernières vipères ne sont, en
général, pas ou pas assez adaptés à l’écologie de l’espèce
5

(LENDERS et al., 1999 ; PAQUAY & GRAITSON, 2007).
Paradoxalement, comme pour les sites Natura 2000, on
pourrait s’attendre à ce que les vipères péliades se portent
mieux dans les réserves naturelles qu’ailleurs. Cependant,
s’il est vrai que quelques vipères péliades évoluent en
réserves naturelles, la majorité des populations sont encore
non protégées. La preuve en est qu’au cours des trente
dernières années, de nombreuses populations s’y sont
complètement éteintes ou fortement raréfiées. En fait,
depuis une vingtaine d’années, on s’est rendu compte que
les gestions mécanisées ou par pâturage, qui maintiennent
bien la structure paysagère et qui permettent des
améliorations botaniques, ne conviennent généralement pas
aux reptiles (OFFER et al., 2003 ; PAQUAY & GRAITSON,
2007 ; WALLIS DE VRIES, 2013 ; LENDERS, 2015 ; READING
& JOFFRE, 2015 ; TIMMERMANS, 2015 ; GARDNER et al.,
2019).
Habituellement, alertés par le piétinement, les reptiles
fuient les zones pâturées. Quant aux zones fauchées
mécaniquement, elles constituent le piège idéal pour
beaucoup d’animaux et plus particulièrement en fin d’été ,
pour les femelles gestantes.
De plus, paraissant de moindre valeur en termes de
biodiversité, les mégaphorbiaies et les friches plus arborées
où se nourrissent toutes les classes d’âges de l’espèce, sauf
les femelles gestantes, sont généralement, et à tort,
relativement considérées de peu d’intérêt par les
gestionnaires de sites (BAUWENS & CLAUS, 2019b).
Enfin, l’explosion démographique des sangliers explique
en grande partie l’effondrement rapide des dernières
populations de vipères jusque-là préservées (GRAITSON et
al., 2018).
À ces éléments s’ajoutent encore les problèmes liés à la
consanguinité des petites populations isolées (DEMEZ,
2013) et les effets du changement climatique (GUILLON,
2012 ; URSENBACHER et al., 2017).
Ces facteurs paraissent impossibles à surmonter. Il reste
alors les derniers atouts qui pourraient contribuer à
sauvegarder l’espèce dans son bastion historique en
Wallonie. Il s’agit de l’élevage en captivité des derniers
exemplaires qui subsistent ici et là sur des sites condamnés
et d’en transloquer la progéniture2. Cela permettrait d’une
part de consolider des populations encore viables et
d’accroître leur variabilité génétique, et, d’autre part, de
déplacer des individus considérés comme sans avenir vers
des lieux plus en altitude afin qu’ils soient moins affectés
par le changement climatique (GRAITSON, 2019a ;
PRIMACK, 2012). D’une manière générale, réintroduire
dans la nature des animaux placés en captivité à bon escient
nous semble être des pis-aller à la mesure de l’impasse dans
laquelle certaines espèces se trouvent actuellement. Dans le
Les translocations d'espèces sont des déplacements d’êtres
vivants, réalisés par l’homme, vers des environnements où ces
organismes n'étaient pas présents auparavant.
2

6

cas de la péliade, n’existe-il pas d’alternatives ? Pour tenter
de répondre à cette question, faisons le point sur deux des
problématiques qui nous semblent peser le plus sur l’avenir
de la conservation de cette espèce en Wallonie.

1. La consanguinité
Un article de MADSEN et al. (1996) met évidence plusieurs
effets néfastes de la consanguinité sur une population isolée
de Vipère péliade qu’il a étudiée en Suède :
 adaptabilité aux variations du milieu diminuée à long
terme
 diminution du nombre des jeunes à la naissance (- 30
%) et de la survie des juvéniles, régression des
aptitudes maternelles
 augmentation de la stérilité des adultes et de l’intervalle
entre deux parturitions.
Pour lutter contre l’effet de la consanguinité, MADSEN et al.
(1999) ont enrichi la population avec des individus
extérieurs. Bientôt, l’effectif de départ a montré une nette
amélioration, démontrant ainsi la réussite de la démarche.
Toutefois, peu après, MADSEN et ses collaborateurs (2000)
se sont montrés moins catégoriques à propos de certaines
de leurs conclusions, mettant en garde contre les stratégies
de conservation qui se baseraient uniquement sur l’étude
des marqueurs microsatellites3. Ils ont notamment trouvé
de surprenantes corrélations négatives entre le taux
d’hétérozygotie des marqueurs microsatellites et la taille
des populations, ce qui ne correspondait pas à la théorie (in
DEMEZ, 2013). De plus, se posait la question de savoir dans
quelle mesure l’avantage dû aux translocations n’était pas
tout simplement lié à la gestion du site étudié réalisée dans
le même temps en faveur de l’animal.
L’hypothèse des déplacements de la Vipère péliade lors des
dernières glaciations et interglaciations peut être évoquée :
il semble que chaque mouvement des populations, soit vers
une crypte glaciaire, soit vers un refuge d’altitude lorsque
le climat est trop chaud, induise une perte génétique
(URSENBACHER & al., 2006). Ainsi, les vipères wallonnes,
issues d’un refuge glaciaire situé au sud de la Bretagne,
possèdent une diversité allélique de 23 % inférieure par
rapport aux populations de vipères bretonnes actuelles
(DEMEZ, 2013). Or, ce type de mouvements s’est produit de
très nombreuses fois au fil des millénaires, ce qui
expliquerait peut-être la faible richesse allélique naturelle
de la population mondiale des vipères péliades ou du moins
son importante homogénéité morphologique dans son aire
géographique (URSENBACHER, 2005).
3

Un marqueur microsatellite est un repère constitué par de l'ADN
répété un certain nombre (variable) de fois d'un motif court (de 1
à 4 nucléotides, le plus souvent). Pour que ce marqueur puisse être
un repère non ambigu, il doit être entouré à droite et à gauche de
séquences uniques.

Depuis des dizaines, voire des centaines d’années,
l’isolement des populations de vipères péliades wallonnes
est essentiellement dû à l’activité humaine. Cependant,
comme le pensent certains auteurs (MADSEN et al., 1996 ;
FRANKHAM et al., 2002 ; REED et al., 2003 ; PRIMACK,
2012 ; DEMEZ, 2013), faut-il nécessairement voir ce
morcellement comme une cause irrémédiable de la
disparition à long terme de ces isolats ?
L’étude des vipères péliades du camp militaire du Groot
Schietveld (Campine anversoise) permet d’en douter au
moins en partie. Cette population riche de plusieurs milliers
d’individus est constituée d’un grand nombre de petites
entités isolées les unes des autres sans qu’il n’y ait de
barrières écologiques particulières entre elles. Seules, des
distances supérieures à quelque 500-600 mètres, les
séparent (Dirk BAUWENS, com. pers.) et en près de vingt
ans (BAUWENS & CLAUS, 2019a), aucune vipère n’a été
notée hors de sa zone. Génétiquement, chaque sous-groupe
se distingue assez bien des voisins et, malgré une
consanguinité relativement élevée, l’ensemble de cette
population connait des effectifs très élevés.
2. Le changement climatique
La Vipère péliade est une espèce euro-sibérienne,
septentrionale stricte (VACHER & GENIEZ, 2010). Les zones
plus méridionales occupées actuellement, ont été atteintes
lors des périodes glaciaires. Il semble donc logique qu’avec
le changement climatique connu de nos jours, la Vipère
péliade fasse partie des candidats voués « à disparaître »
dans les plaines et les zones d’altitude moyenne. D’ailleurs,
selon VACHER et GENIEZ (2010), le changement de la
planète ainsi que la parapatrie4 que la Vipère péliade
présente avec la Vipère aspic (Vipera aspis), ont déjà induit
sa disparition au cours des 19e et 20e siècles dans certaines
régions françaises (Vendée, Indre et Alpes-Maritimes).
D’après ces auteurs, la situation serait identique sur le
plateau suisse. En Grande-Bretagne, à l’analyse du dernier
inventaire national, la disparition des petites populations de
la Vipère péliade est prévue pour 2032 (Gardner & al.,
2019), les grandes populations subsistant seules. En Suisse,
des simulations évaluant l’impact du changement
climatique durant la période 2020-2049 montrent
également la forte régression potentielle de la Vipère
péliade (URSENBACHER & al., 2019).
Paradoxalement, les propos alarmistes de certaines de ces
publications, qui avaient plutôt pour vocation de « stimuler
» la conservation des vipères (Hans SCHMOCKER, com.
pers.), ont parfois eu l’effet contraire, celui de générer de
profonds doutes quant à l’opportunité d’encore dépenser de
l’énergie et de l’argent pour tenter de conserver l’espèce. À
titre personnel, nous l’avons constaté chez des
représentants des pouvoirs publics, des gestionnaires de
réserves naturelles et même chez certains herpétologues.

Cependant, sans pour autant nier l’existence du
changement climatique, son effet néfaste sur la survie des
vipères péliades mérite d’être relativisé. En effet, comment
mesurer exactement la part réelle de l’impact climatique sur
la régression d’une espèce par rapport à l’effet complexe
des autres facteurs anthropiques qui, eux aussi, sont en
constante évolution ?
Par exemple, chez les oiseaux, on considère que 85 % de
leur régression est liée à l’activité humaine, le restant étant
dû au changement climatique (LAUDELOUT & PAQUET,
2014). Dans le cas particulier de la Pie-grièche grise
(Lanius excubitor), son retrait vers les zones d’altitude est
saisissant en Europe. De même, sa disparition en Fagne et
Famenne est nettement mise en lien avec le changement
climatique (DEHEM, 2018). Cette affirmation tient-elle
suffisamment compte, parmi d’autres facteurs, du coup
porté à l’espèce par les campagnes de drainage
systématique et leurs effets sur l’habitat réalisés entre
Virelles et Rochefort durant les années 1990 ?
Si des espèces à affinités bioclimatiques boréomontagnardes, comme la Pie-grièche grise, la Grenouille
rousse (Rana temporaria) et le Lézard vivipare (Zootoca
vivipara) sont en nette régression ou en passe de disparaître
dans ces régions (DEHEM, 2018 ; RYELANDT, 2020a)
d’autres espèces à aire géographique plus méridionale sont
également en situation précaire. Ainsi on peut citer la
Perdrix grise (Perdix perdix) (GAYE, 1981), certains
passereaux comme le Bruant des roseaux (Emberiza
schoeniclus), la Locustelle tachetée (Locustella naevia) ou
des batraciens comme l’Alyte accoucheur (Alytes
obstetricans) et le Crapaud calamite (Epidalea calamita)
dont les effectifs se sont lamentablement réduits depuis 30
ans (JACOB & PAQUAY, 1992 ; JACOB et al., 2007 et
observations personnelles).
Assurément, il importe de ne pas utiliser la fatalité du
changement climatique comme argument pour abandonner
toute politique de conservation des espèces nordiques. Au
contraire, la protection de ces espèces et de leurs habitats,
permettrait de mieux lutter contre les effets négatifs de
l’effet de serre actuel. Enfin, avec ses milliers de vipères, il
me semble que le cas du camp militaire du Groot
Schietveld, situé dans la Campine anversoise, à très faible
altitude, montre aussi que l’impact du changement
climatique pourrait, au moins en partie, être relativisé.

DES RAISONS D’ESPÉRER …
D’après GRAITSON (2011), une souche de Vipère péliade
non indigène a été introduite sur le plateau des HautesFagnes, en Province de Liège, sans que les auteurs de ce(s)
lâcher(s) ne soient connus. Cette population constituée de
nombreux individus mélaniques (Fig. 5) est issue d’un
clade génétique différent de celui connu en Wallonie (Éric
GRAITSON, com. pers.). Les centaines d’hectares de
tourbières et de landes à bruyères régénérés dans le cadre
du « LIFE – Hautes Fagnes » de 2007 à 2012 pourraient

C’est-à-dire que ces deux espèces occupent des zones de
répartition contiguës mais non superposées.
4

7

devenir des habitats de prédilection pour l’espèce dont les
effectifs
semblent s’y être développés de manière
exponentielle. En 2020, il n’est pas impossible que cette
population ait déjà atteint le millier, voire plusieurs milliers
d’individus (Éric GRAITSON, com. pers.).

d’en optimiser la capacité d’accueil, tout en interférant
le moins possible avec la production sylvicole
(FICHEFET & al., 2011)
 le livret remarquable d’Éric Graitson (2019b) destiné
aux auteurs de projets désirant évaluer l’incidence et les
compensations pour les reptiles des aménagement de
friches, anciennes carrières et abords de voies de
communication.

Ainsi, à l’instar de la Flandre (Groot Schietveld – voir ciaprès), la Wallonie possède maintenant, elle aussi, une très
imposante population de Vipère péliade.
Paradoxalement, cette « bonne » nouvelle, ne fait pas
l’unanimité. Est-il acceptable que les lois sur la
conservation de la nature aient été bafouées ? En effet,
transporter et introduire ou réintroduire des espèces
protégées sans autorisation sont des délits et ne peuvent se
faire qu’exceptionnellement dans le cadre de suivis
scientifiques précis.
De même, pour certains biogéographes, dont le travail de
patience consiste à retracer « l’Histoire » des espèces, la
présence d’animaux en dehors de leur aire historique est
une hérésie, un brouillage de cartes à tenir en compte lors
de recherches ultérieures. Ici, dans les Hautes Fagnes, nous
avons la « chance » de savoir que les vipères sont
introduites.
Avec l’arrivée des vipères dans les Hautes-Fagnes, débute
une nouvelle histoire qui s’avérera sans doute passionnante.
Des étudiants, dans le cadre de leurs travaux de fin d’études
ou de doctorats sont déjà sur leur piste, … Quant à la carte
de la répartition des vipères en Wallonie établie en 1968 par
G.H. PARENT, son centre de gravité bascule. Tandis que le
bastion historique du sud-ouest s’évapore et risque fortement de disparaître si rien n’est fait pour le conserver, il
grandit au nord-est de la Région wallonne une nouvelle
population issue d’un « parachutage » d’animaux « exotiques ».

Dans le genre, on ne peut pas faire plus précis comme
recommandations concrètes. Toutefois, on ne peut que
déplorer qu’elles n’aient été qu’esquissées, par exemple,
lors des travaux du contournement de Couvin et de la voie
rapide en direction de Charleville-Mézières (Fig. 6). Bien
sûr, dans le cadre de ce chantier, des efforts en faveur de
l’environnement ont été consentis pour préserver la flore et
la faune avec des passages à gibier et à batraciens, des
cheminées à chauves-souris, la mise en place de banquettes
sèches pour la petite faune, des restaurations de pelouses
calcicoles, quelques plantations de haies et de vergers.
Mais, dans cette zone historiquement très importante pour
les Vipères péliades, que valent ces mesures face à ces
travaux titanesques (MAHY, 2020) ?
Concernant la gestion des réserves naturelles, il est heureux
de voir circuler des idées de gestions plus adéquates pour
la conservation des reptiles : ouverture de vastes clairières,
gestions plus manuelles en hiver, installation d’exclos et
d’hibernacula5, pose de clôtures à sangliers.

À côté de l’imposant effectif de Vipère péliade dans les
Hautes-Fagnes qui pourrait même donner l’impression
mathématique que l’espèce n’est plus menacée chez nous,
protéger les reliquats de population encore présents dans
leur bastion historique constitue sans doute le « vrai »
challenge à relever.
Par chance, pour y arriver, il existe de nombreux modes
d’emploi :
 le Plan d’actions pour la conservation des vipères
péliades en Wallonie, édité il y a 10 ans (GRAITSON,
2011), a le grand mérite d’avoir mis sur papier un grand
nombre d’actions concrètes à préconiser. Non détaillées
ici, elles sont incontournables
 un guide publié par le DEMNA donne de précieux
conseils en termes d’aménagements et d’entretien des
ouvertures forestières et des lisières, si utiles à la
biodiversité en général et aux reptiles en particulier, afin
5

Logettes en zones ouvertes où les animaux de petite taille passent
l'hiver et hibernent.

8

Fig. 6. – Travaux préparatoires au contournement de
Couvin, septembre 2013. (Photo Ph. RYELANDT)

Certains articles ou sujets présentés lors de récents
colloques herpétologiques amènent également leur lot de
concepts intéressants pour la conservation des vipères
vivant encore dans leurs fiefs d’origine. Par exemple,
l’étude des vipères du Groot Schietveld (Campine
anversoise), apporte des pistes intéressantes de réflexion
(BAUWENS & CLAUS, 2019b ; BULTOT, 2020 ; RYELANDT,
2020b)6. Ici, le changement climatique et les problèmes de

6

Cf. également : https://rainne.natagora.be/fileadmin/
Rainne/Echo_des_rainettes/Echo_des_Rainettes_19.pdf

consanguinité ne semblent pas affecter de manière
déterminante cette population locale.
En définitive, le grand nombre d’animaux qui y subsiste est
surtout le fruit d’une gestion adéquate du milieu sur une très
longue période. Le grand nombre des hibernacula et des
espaces bien ensoleillés utilisés par les femelles gestantes
sont les points forts du site. Mais, des endroits plus boisés,
considérés comme essentiels comme lieux de nourrissage
pour les animaux mâles et femelles de toutes les classes
d’âges sont également conservés (BAUWENS & CLAUS,
2019b). Enfin, la quasi-absence de sangliers et de faisans y
est évidemment favorable pour les vipères (PAQUAY &
GRAITSON, 2007 ; GRAITSON et al., 2018 ; K. CLAUS, com.
pers.).
À l’étranger, des opérations de conservation de vipères sur
les linéaires artificiels routiers et ferroviaires (DUBEY et al.,
2019 ; SCHMOCKER, 2019) et même hydrographiques
(SCHWARTE, 2017) sont de plus en plus relatées. Le plus
souvent, lors de ces travaux, les vipères sont capturées et
détenues non loin des chantiers. Une fois, les travaux
terminés, les serpents sont relâchés et recolonisent les
nouvelles infrastructures où des niches pierreuses
végétalisées ont été intégrées dans les nouveaux ballasts
(SCHMOCKER, 2019 ; MEYER et al., 2011).

plusieurs fois durant sa vie et déclenche une réaction
allergique exacerbée (choc anaphylactique). Dès lors, les
morsures mortelles sont extrêmement rares ou totalement
exagérées (MAGOTTEAUX, 1962 ; PARENT, 1968). Aucun
décès n’est répertorié en Wallonie de même qu’en GrandeBretagne depuis 300 ans (JULIAN, 2019).
Utiliser des voies innovantes pour corriger des siècles de
méconnaissance et de superstitions est la tâche du groupe
herpétologique britannique (ARG UK) « Adders are
amazing » (Les vipères sont fantastiques), dont le projet
vise à changer les mentalités au Pays de Galles (Fig. 7).
Combinant engagements scientifiques avec de forts
éléments artistiques et créatifs, les animations de cette
association concernent tous les groupes d’âges de la société
civile : écoles, universités du troisième âge, cercles
féminins, groupes d’artisans locaux, naturalistes et cercles
d’histoire. Rapidement, dans cette région, suite à leurs
actions, les vipères ont vu leur cote de popularité grimper
de manière significative (JULIAN, 2019). Si l’on s’inspirait
de cette initiative britannique, deux axes pourraient être
privilégiés : lutter contre la phobie du grand public vis-àvis des serpents et réaliser une information ciblée vis-à-vis
des propriétaires et du personnel agricole ou forestier qui
œuvrent sur les sites occupés par l’espèce.

Vu la haute densité des voies de communications générées
par l’activité humaine, on peut mesurer le potentiel énorme
de ce genre d’actions.
De même, l’attention que l’on porterait aux abords du
système hydrographique naturel, pourrait jouer un rôle
important pour la survie de la Vipère péliade. L’étude de sa
biogéographie nous l’apprend. L’espèce est véritablement
inféodée au réseau hydrographique de la Meuse et de ses
affluents (PARENT, 1968). De toute évidence, jadis, les
péliades ont beaucoup bénéficié de l’ouverture des milieux
réalisée par l’activité humaine non intensive et, sans doute
aussi, par celle du Castor (Castor fiber). Actuellement, avec
le retour du gros rongeur, les travaux conjoints de ces deux
« créateurs de biotopes » pourraient générer moult habitats
de premier choix apportant lumière et proies en suffisance
pour le serpent (RYELANDT, 2020, a). Le premier le ferait à
travers des programmes LIFE assez coûteux ou lors de
travaux en bordure de canaux (SCHWARTE, 2017). Le
second créerait gratuitement sur le long terme un réseau de
petits biotopes d’intérêt suffisamment aléatoires pour
qu’une grande part de la biodiversité puisse s’exprimer
(WEIBEL, 2002).

Fig. 7. Publication de l’association britannique ARG en
faveur des vipères. (source : https://www.arguk.org/)

LES VIPERES SONT FANTASTIQUES !
Enfin, on ne peut pas passer sous silence les difficultés à
promouvoir la conservation d’une espèce encore largement
crainte par le public malgré sa grande rareté (JULIAN,
2019). Certains médias à sensation continuent de suggérer
que les vipères sont un danger pour ceux qui s’aventurent
dans la nature. En réalité, la Vipère péliade est le moins
agressif et le plus timide de nos serpents. Son venin lui
permet de tuer des proies de la taille d’une souris. Pour
qu’un être humain meure, il faudrait qu’il soit mordu

UNE AIRE GÉOGRAPHIQUE DÉGONFLÉE À
REMETTRE SOUS PRESSION.
La Vipère péliade est le serpent terrestre qui possède la plus
grande aire géographique dans le monde (VACHER &
GENIEZ, 2010).
Chez nous, depuis des siècles, l’animal a survécu grâce à
d’extraordinaires mouvements de populations réalisés
9

librement le long de la Meuse et de ses affluents (PARENT,
1968). De ce fait, ce serpent est typiquement une espèce «
Natura Mosana » !
Au cours des dernières décades, nous avons vu comment
son territoire a évolué dans nos esprits et en réalité. En
moins de cent ans, la crainte d’avoir ce serpent « dangereux
pour l’homme » sur notre territoire, s’est muée en une autre
frayeur, celle que l’espèce disparaisse totalement de nos
régions !

recensements qui ont rendu lisible l’évolution des
populations des vipères chez nous, il a également supervisé
de nombreux travaux de fin d’études (Fig. 8).
En 2020, ce travail de longue haleine a généré chez nous,
une mobilisation générale pour conserver « nos » dernières
Vipères (VIGNET, 2020). Volontaires du monde associatif,
Département de la Nature et des Forêts, communes,
universités, propriétaires privés de sites, … ont décidé
d’unir leurs forces pour mettre en place des actions
concrètes pour sauvegarder les derniers refuges de ce
fascinant reptile (GILLET, 2020).
Face à l’urgence, pareille convergence de compétences est
absolument nécessaire. À titre d’exemple, relatons le
sauvetage d’une femelle gestante menacée directement par
la fauche de son habitat à la fin de l’été 2020. Celui-ci a
nécessité la collaboration d’un bénévole du GT Serpents,
un professionnel de Natagora, un conseiller MAE, un
représentant du DMNA, le propriétaire et le gestionnaire du
site, pas moins !

Fig. 8. – Prélèvement d’ADN d’un vipereau (Vipera berus)
réalisé par Donatien FRANÇOIS lors de son stage de master
pour l’Université de Poitiers sous la direction d’Éric
Graitson, à Petigny en mai 2012 (Photo Ph. RYELANDT)

Heureusement, depuis plus de 20 ans, Eric GRAITSON, par
son charisme, ses travaux et le partage de ses
exceptionnelles compétences de terrain, a su dynamiser une
équipe de chercheurs autour de lui (GT Serpents).
L’encodage de données de vipères péliades et plus
généralement de reptiles a atteint des sommets jamais
connus auparavant en Wallonie. À côté de ces

REMERCIEMENTS
Merci à Michel ROUARD pour les articles qu’il nous a
transmis et à Eric GRAITSON pour les nombreuses
remarques judicieuses et constructives formulées lors de
l’élaboration de cette note. Merci aussi à Olivier KINTS
(Natagora) pour le temps qu’il a consacré à digitaliser la
carte publiée en 1968 par G.H. PARENT sur la répartition
des stations de vipères péliades de cette époque.

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Apparition de nouvelles espèces de libellules
à Virelles (prov. de Hainaut, Belgique)
Philippe DEFLORENNE *, Sébastien PIERRET** et Roland DE SCHAETZEN***
RÉSUMÉ
Les odonates de l’étang de Virelles et des alentours immédiats ont été particulièrement suivis dès la mise en réserve naturelle du site en
1983. Depuis la publication de l’atlas « Les Libellules de Belgique » de GOFFART et al. en 2006, de récentes prospections ont permis la
découverte de 12 espèces nouvelles pour le site et qui sont décrites. Ce fait s’explique par l’activité accrue des observateurs, mais aussi
par l’arrivée d’espèces méridionales et également par une gestion, voire une restauration adéquate du milieu.

ABSTRACT
Appearance of new species of dragonflies in Virelles (prov. of Hainaut, Belgium). The monitoring of odonates living at the Virelles
pond and its immediate surroundings has significantly increased since 1983, when the site was designated a nature reserve. Since the
publication of the atlas «Les Libellules de Belgique» by GOFFART et al. in 2006, recent surveys have led to the discovery of 12 new
species at Virelles pond. This article explains this increase, attributing it to increased observer activity, the arrival of southern species,
and environmental restoration efforts.

* rue de Martinsart 53, B-6440 Froidchapelle. Courriel : philippe.deflorenne1@gmail.com
** rue Saint Éloi 4, F-08380 Brognon. Courriel : sebastien.pierret@aquascope.be
*** chaussée de Bornival 2, B-7181 Arquennes. Courriel : roland.deschaetzen@gmail.com
_________________________________________________

INTRODUCTION
La commune de Virelles dans l’entité de Chimay est située
dans la botte de la province de Hainaut, dans la dépression
de la Fagne, qui correspond au prolongement de la
Famenne dans l’Entre-Sambre-et-Meuse (ESEM). Elle
abrite un des joyaux du patrimoine naturel de Wallonie,
l’étang de Virelles, mais aussi d’autres sites qui ne
manquent pas d’intérêt, notamment pour les odonates.
Jusqu’en 2020, 52 des 71 espèces recensées en Belgique y
ont été observées au moins une fois1, avec la présence
d’espèces très rares comme Epitheca bimaculata ou
Somatochlora flavomaculata déjà abondamment commentées, notamment dans GOFFART et al. (2006), ce qui fait
de Virelles et ses alentours, de longue date, un haut lieu de
la biodiversité des Odonates.

SITUATION
L’étang de Virelles recueille les eaux du bassin versant de
3.000 hectares du Ry Nicolas (aussi appelé Lambercies),

celles du Ry de Cécelle (500 ha) et celles du Ry du fond des
Sarts (500 ha) qui se jettent dans l’Eau Blanche 200 mètres
en aval de l’étang. La création de celui-ci trouve son origine
dans la métallurgie, avec la levée d’une première digue et
d’une première forge au 16e siècle. Le plan d’eau créé à
l’époque avait une superficie de 50 hectares. Cette première
digue sera remplacée par une seconde au 18 e siècle afin de
porter la superficie à 80 hectares. Avec le déclin des petites
forges au cours du 19e siècle, l’étang de Virelles a été utilisé
pour la chasse et la pêche jusqu’au milieu du 20 e siècle qui
a vu s’y développer une activité touristique. En 1981, le
site est à vendre et, pour parer la menace de projets de
lotissements et d’aménnagements touristiques, le monde
naturaliste de l’époque (RNOB, Aves et WWF-Belgium)
s’est mobilisé pour le racheter. Ce sera chose faite en 1985,
avec l’aide de la Générale de Banque (actuellement BNP
Paribas Fortis).
Outre la protection de la nature, Virelles-Nature asbl, la
structure qui gère le lieu, a pour objectif de développer un
projet touristique et éducatif permettant au plus grand
nombre de découvrir le site et ses trésors naturels (Fig.1- 2).

1

La liste comparative des espèces observées à Virelles, en ESEM
et en Belgique est disponible via le site : http://www.
aquascope.be/website/moment-magique?pageid=380
13

Fig. 1. – Les différentes zones étudiées et gérées à Virelles : 1. Étang, 2. Roselière ouest et chenaux, 3. Aménagement rive sud, 4.
Entrée Aquascope et bassin de décantation, 5. Noue, prés est et Vaulx, 6. Mares de l’embouchure du Ry Nicolas, 7. Mare aux daims et
Ry Nicolas, 8. Prairie de la Ferrière, 9. Extension du Pré de Fagne, 10. Pré de Fagne et caillebotis, 11. RN des Prés de Virelles
(Natagora), 12. Étang Pirlot, 13. RN des Prés de Virelles (Natagora), 14. Zone de compensation « projet éolien ». Ligne vert jaune =
limite communale (montage Romain BRUFFAERTS).
(montage Romain RUFFAERTS).

La gestion du site vise à restaurer et préserver la valeur
biologique des divers milieux, par exemple en maintenant
les différentes séquences végétales assurant la transition
entre l’eau libre et la terre ferme. Un plan de gestion a été
élaboré en 1988 ; il est régulièrement mis à jour depuis,
notamment au cours de l’année 2019 lors de la demande de
prolongation de l’agrément trentenaire de la réserve
naturelle.

effectué plus de 57 chantiers de gestion et de restauration
de milieux, dont 15 vidanges permettant d’évacuer les
populations matures de poissons, et 18 autres chantiers de
gestion ou de création de milieu qui peuvent impacter les
populations d’odonates. La plupart des travaux réalisés ont
bénéficié de l’apport de fonds de la Région wallonne et de
l’Union européenne (Interreg, Feder, Life…).

Les premières études du site, dès 1983, ont mis en évidence
que la qualité des eaux était altérée par différentes sources
de pollutions extérieures : eaux usées du village, excès
d’engrais et d’effluents d’élevage du bassin versant, etc.
(PHILIPPART, 1986). L’écosystème en était fortement
perturbé. Virelles-Nature s’est attaché à y remédier, mais à
ce jour, on déplore toujours l’arrivée des eaux usées d’une
partie des habitations de Virelles dans l’étang. À la suite de
plusieurs pollutions, dont celle dramatique de 2001,
Virelles-Nature a mobilisé les forces vives locales autour
d’une « charte d’étang » à laquelle les agriculteurs ont été
invités à souscrire. Depuis lors, hormis un épandage de
lisier, la situation s’est améliorée.

Certains de ces chantiers ont eu a priori un impact
direct sur les peuplements des Odonates :

Depuis la mise en réserve du site jusqu’en 2020, l’équipe
technique et de nombreux bénévoles de Virelles-Nature ont
14

 35 mares ont été creusées : 3 mares en 1987 sur la rive
sud dans un but didactique, 1 dans les prairies à l’est en
2001 (noue), 12 mares creusées à l’occasion des travaux
de déboisement (extension) du Pré de Fagne au nord en
2001 et 2007, 2 à l’entrée de l’Aquascope en 2006 et
finalement 17 en 2018 et 2019 (Life prairies bocagères)
au nord et à l’ouest de l’étang (Fig. 5).
 900 mètres de chenaux ont été creusés à l’ouest de
l’étang en 1992, 1995 et 2009. La création de ces
chenaux a augmenté significativement la zone de
contact entre l’eau libre et la roselière. Ils sont fort
fréquentés par les Odonates.

Fig. 2. – Vue globale de l'étang à partir de l'Aquascope. (Photo Jean-Marie SCHIETECATTE).

 huit îlots et 600 mètres de rives ont été aménagés sur la
rive sud de l’étang (Fig. 12) en 2003 à l’occasion des
travaux de l’Aquascope (centre d’accueil pour les
visiteurs et aménagements divers sur la rive sud). De
même, deux mares, intégrées dans un système de
lagunage, ont été creusées pour l’épuration des eaux
usées du centre d’accueil des visiteurs de l’Aquascope.

Toute cette dynamique de gestion et de créations de mares
et de chenaux a eu un effet bénéfique pour l’ordre des
Odonates, permettant l’arrivée d’espèces parfois seulement
en errance, mais aussi d’autres trouvant un milieu adéquat
pour la reproduction. Pas moins de douze nouvelles espèces
ont été ainsi renseignées à Virelles depuis la publication de
l’ouvrage « Les Libellules de Belgique » (G OFFART et al.,
2006).

En dehors du site de l’étang de Virelles, plusieurs aménagements favorables aux Odonates ont vu le jour ces
dernières années :
 l’aménagement de la Mare aux daims (au nord de
l’étang) par un particulier au début des années 2000
 le creusement d’une mare dans la prairie de la Ferrière
en 2019 (Fig. 3)
 la création de l’étang Pirlot en 1990. Cet étang créé par
un entrepreneur à des fins récréatives (pêche et détente)
s’est révélé très intéressant pour les odonates. Malgré
un statut Natura 2000 censé protéger durablement ce
site, un remodelage des berges et une mise en assec de
près d’un an l’ont malheureusement très fortement
dégradé en 2020
 la création d’une zone de compensation dans le cadre
d’un projet éolien, gérée par Faune et Biotope à l’ouest
comprenant deux mares en 2015
 la gestion par déboisement et création de deux mares en
2019 dans la réserve naturelle des Prés de Virelles, à
l’ouest du site également.

Fig. 3. – Mare nouvellement créée dans la prairie de la
Ferrière, au nord de l'étang. (Photo Jean-Marie
SCHIETECATTE).

MATÉRIEL ET MÉTHODES
Dès sa mise en réserve, le site de l’étang de Virelles a été
parcouru par de nombreux naturalistes. L’effort de
prospection et les méthodes utilisées vont cependant
évoluer assez fortement au cours du temps :

15

 de 1980 à 1988, des données partielles sont récoltées
principalement sur la rive sud ou sur l’étang, au moyen
de barques. Le filet est alors couramment employé pour
identifier les libellules qui sont ensuite relâchées. Une
dynamique se met en place en 1982 grâce à la création
du Groupe de Travail Libellules ‘Gomphus’.

Aeshna isoceles
Gomphus pulchellus
Libellula fulva

Aeschne isocèle
Gomphe joli
Libellule fauve

Orthetrum brunneum

Orthétrum brun

 de 1989 à 1997, Gomphus, sous l’impulsion de Philippe
GOFFART, élabore un suivi du site lors de sorties in situ,
en barque et aux abords de l’étang

Sympetrum meridionale

Orthetrum coerulescens

Leucorrhinia caudalis
Leucorrhina pectoralis

 de 1998 à 2016, les relevés systématiques de Gomphus
sont interrompus. Des données le plus souvent très
partielles sont enregistrées. Le passage progressif du
filet vers l’identification au moyen de jumelles est opéré
et des photographies sont prises
 à partir de 2017, l’apparition de nouvelles espèces va
raviver l’attention portée aux libellules

2500

 pour les plus anciennes, la base de données du groupe
de travail Gomphus

1000

Fig. 5. – Des mares plus profondes sont essentielles pour
maintenir des points d'eau permanents en cas de
sécheresse. (Photo Jean-Marie SCHIETECATTE).

NOUVELLES DÉCOUVERTES
Les nouvelles espèces observées dans la région de Virelles
sont reprises dans le Tableau 1.
Nom scientifique
Lestes barbarus
Coenagrion scitulum
Ischnura pumilio
Aeshna affinis

16

Nom vernaculaire
Leste sauvage
Agrion mignon
Agrion nain
Aeschne affine

1ère
mention
2020
2009
2017
2019

statut
R
R
R
R

2019

R

2018

R

2019

V

2012

V

R

Lestes barbarus, le Leste sauvage

2000

DESCRIPTIF DES

R?
R?
R?

Tableau 1. – Dates d’apparition et statut des espèces nouvelles
pour Virelles (R = reproducteur, V = visiteur).

Les données utilisées dans cette étude proviennent de
différentes sources :

 pour les plus récentes, les plateformes d’encodage en
ligne Observations.be et OFFH (Observatoire de la
Faune, de la Flore et des Habitats, site de la Région
wallonne - DEMNA, SPW). Ces plateformes, apparues
vers 2010, ont dopé de manière importante le nombre
de données disponibles (Fig. 4), et évitent surtout la
perte d’informations restées à tout jamais confinées
dans des carnets.

Orthétrum
bleuissant
Sympétrum
méridional
Leucorrhine à
large queue
Leucorrhine à
gros thorax

2017
2001
2017
2004 puis
2018

1500

45
32

2199 40
30

25

20

500

0

33

50

741
161

314

10

0

1981-1990 1991-2000 2001-2010 2011-2020

Fig. 4. – Nombre d'observations (en bleu) et nombre
d'espèces de libellules observées (en rouge) par décennie à
Virelles

Cette espèce, commune dans la zone méditerranéenne et sur
la façade atlantique, est actuellement en extension vers le
nord de l’Europe (BOUDOT et al., 2017). Jusqu’en 1980,
Lestes barbarus était considéré chez nous comme une
espèce méridionale très rare et accidentelle avec 7 mentions
au 19e siècle, et 6 pour la période 1900-1980 (dont 3 lors de
l’été chaud et sec de 1976). En 1994 et surtout en 1995, on
peut parler d’une véritable invasion dans le nord-ouest de
l’Europe, y compris en Belgique où l’espèce est parvenue à
se reproduire en divers endroits (GOFFART et al., 2006).
Depuis lors, le Leste sauvage est mentionné plus
régulièrement dans la majorité des provinces wallonnes
avec une nette tendance à la hausse à partir de 2018, où les
observations sont régulières et assez largement réparties sur
le territoire (cf. https://observations.be/). Mais, ne nous y
trompons pas, Lestes barbarus est aujourd’hui toujours
considéré comme rare !
À Virelles, aucune mention ne figurait dans les relevés
malgré la présence de reproducteurs à quelques kilomètres,
notamment dans la réserve naturelle de La Prée à Dailly.
En septembre 2017, Olivier ROBERFROID déclare cette
espèce possible mais sans certitude dans le périmètre de
l’étang de Virelles.
Il faut attendre juin 2020 pour qu’enfin ce leste soit
confirmé, une femelle est en effet découverte à la réserve
naturelle des Prés de Virelles, aux abords d’une mare
creusée deux ans plus tôt dans le cadre du programme Life

Prairies Bocagères. De nombreuses observations se
succédèrent avec parfois plus de 50 individus présents sur
le site, laissant supposer une ponte passée inaperçue l’année
précédente.
À l’instar de la majorité des libellules méridionales
apparues dernièrement, le Leste sauvage aurait une attirance très marquée pour les milieux humides temporaires
qui s’assèchent tôt au début de l’été (D IJKSTRA, 2007). À
l’avenir, il semble très probable que ce leste profite des
mares superficielles creusées aux abords de prairies
humides pâturées. En effet, la présence de bétail en ces
endroits favorise grandement l’apparition de joncs qui sont
utilisés par ce Zygoptère comme support pour l’insertion
des œufs (GOFFART et al., 2006). Attention cependant : au
niveau des mares temporaires, l’espèce est sensible aux
sécheresses précoces qui interdisent le développement des
larves au printemps (GRAND & BOUDOT, 2006), ce qui
semble avoir été le cas en 2020.
Coenagrion scitulum, l’Agrion mignon
Le foyer de l’Agrion mignon (Fig. 6) est méditerranéen, sa
répartition y est fragmentée et l’espèce semble être partout
peu fréquente (GOFFART et al., 2006). Néanmoins, depuis
une décennie, l’espèce est en augmentation et gagne du
terrain un peu partout en Europe ; elle il s’est d’ailleurs
réimplanté dans les Îles Britanniques en 2010 après une
longue éclipse de près de 60 ans (BOUDOT et al., 2017).

Coenagrion scitulum fréquente divers types d’habitats
(étangs, mares, ruisseaux et fossés) pour autant que la
végétation aquatique – tant flottante qu’immergée – y soit
abondante (GOFFART et al., 2006). DIJKSTRA (2007) insiste
sur les habitats ensoleillés et BOUDOT et al. (2017) sur
l’environnement prairial. Retenons que ce petit agrion très
discret passe souvent inaperçu si ce n’est dans les habitats
les plus favorables où ses populations peuvent comporter
plusieurs centaines d’individus (BOUDOT et al., 2017).
L’engouement relativement récent pour l’odonatologie de
terrain devrait augmenter d’ici peu les mentions de cette
espèce et sans doute prouver son actuelle présence
quasiment partout sur le territoire wallon.
En Entre-Sambre-et-Meuse, la restauration, voire la création, de petits plans d’eau favorables au triton crêté,
Triturus cristatus (Life Prairies Bocagères) profitera sans
nul doute à cet agrion partagé entre zones à végétation
aquatique dense (où les larves se tiennent et sont actives) et
parties ensoleillées et chaudes, en rapport avec son origine
méridionale.
Ischnura pumilio, l’Agrion nain
Mentionnée dans toute l’Europe, à l’exception des pays
scandinaves, cette espèce (Fig. 7) est irrégulièrement
présente en fonction des biotopes disponibles (GRAND &
BOUDOT, 2006).

Fig. 6. – Coenagrion scitulum, mâle. Froidchapelle, le 2 juin
2019. (Photo : Ph. DEFLORENNE)

En Belgique, seules quelques observations de cet agrion ont
été mentionnées au 19e siècle où DE SELYS LONGCHAMPS
(1888) le considérait comme très local. Il reste très rare par
la suite, avec au mieux huit sites répertoriés lors de la
période 1900-1980, avec l’une ou l’autre possibles
populations régionales dans le sud du royaume (GOFFART
et al., 2006). Au début du 21e siècle, l’espèce augmente
fortement en Flandre puis en Wallonie. La première
indication virelloise date de juin 2009, où un imago est
aperçu à l’étang de Virelles (Pré de Fagne caillebotis).
Deux ans plus tard, le site accueille cette fois de nombreux
individus dont au moins un couple volant en tandem, à la «
noue ». Actuellement, la population semble installée et
uniformément répartie au sein de la réserve naturelle ainsi
que sur deux autres sites.

Fig. 7. – Ischnura pumilio mâle. Virelles,
le 29 juillet 2019. (Photo Ph. DEFLORENNE)

Jusqu’à la première moitié du 20e siècle, l’Agrion nain
n’était connu que dans une bonne dizaine de localités
belges, essentiellement en Flandre. Par après, de nouvelles
stations apparurent, alors que d’autres plus anciennes
disparaissaient, leur physionomie ne répondant probablement plus aux exigences de cette espèce pionnière.
Jusqu’aux années 2000, elle a été découverte sur une série
d’autres sites où les populations sont toutefois le plus
souvent assez éphémères, s’éteignant après quelques
années (GOFFART et al., 2006).

17

Les adultes ont un pouvoir colonisateur élevé et profitent
des courants thermiques atmosphériques (BOUDOT et al.,
2017). C’est à partir de 2010, pendant les mois de juin et
juillet particulièrement chauds, que les mentions se
multiplient dans notre région, sans lendemain pour
certaines (cf. https://observations.be/).
En 2017, la première observation est réalisée le long de la
rive sud de l’étang de Virelles. Les saisons qui suivent
confirment l’installation çà-et-là de ce petit agrion à
Virelles, ainsi que dans deux stations toutes proches à
Vaulx et Chimay. L’espèce apparaît rapidement sur les
pièces d’eau récentes, surtout lorsque l’eau reste peu
profonde. Elle peut alors former des populations
importantes qui diminueront avec la colonisation par la
végétation (BOUDOT et al., 2017).

a été ensuite découvert dans le Pré de Fagne, dans des zones
ouvertes de la roselière ouest et au niveau de la Ferrière où
un tandem est aperçu. Une telle quantité d’observations
réalisées à des endroits différents laisse supposer une
installation locale antérieure à 2019 à Virelles.
Les dates extrêmes d’observations en ESEM, les 5 juillet et
8 septembre, sont classiques pour l’espèce. Elle est plus
précoce qu’A. mixta avec laquelle elle peut être confondue.
Les zones humides en voie d’assèchement constituent le
milieu de prédilection d’A. affinis, où elle apprécie la
végétation rivulaire pour se percher. À Virelles, autant la
noue qu’une bonne partie des mares du Pré de Fagne,
s’assèchent à la fin de l’été. Le tandem observé au nord de
l’étang survolait le Ry Nicolas, principal affluent de
l’étang, encore sous eau à cette époque. Les mâles
territoriaux de cette zone chassaient au-dessus des prés
voisins.

Il est vraisemblable que l’espèce s’installe durablement à
Virelles : en 2021, plus de dix mares de l’entité auront
moins de quatre ans, de quoi assurer la relève et pérenniser
la population de cette demoiselle !

L’espèce se perche assez souvent, elle est ainsi assez facile
à identifier. C'est aussi la seule espèce d’Aeshna qui pond
en tandem.

Aeshna affinis, l’Aeschne affine

Aeshna isoceles, l’Aeschne isocèle

Espèce d’origine méridionale, l’Aeschne affine (Fig. 8) a
débuté sa conquête du nord-ouest de l’Europe dès la moitié
des années 1990, atteignant la Belgique (GOFFART et al.,
2006) où elle reste encore aujourd’hui considérée comme
très rare. Cependant, le nombre d’observations de plus en
plus régulières, y compris en ESEM, a initié, en 2019, une
recherche ciblée sur le site de Virelles.

L’Aeschne isocèle est une espèce presque exclusivement
européenne et sa répartition est morcelée. Elle est absente
de Scandinavie et des îles Britanniques, mais aussi des
régions montagneuses. En Belgique, l’espèce a toujours été
considérée comme très rare. Cependant, les observations
dans le nord de notre pays se sont multipliées ces dernières
années, ce qui a fait passer son statut à « relativement
commun » (cf. https://observations.be/). Un bémol toutefois
pour la Wallonie qui reste le parent pauvre pour l’espèce.
Elle est notamment absente de toute la partie ardennaise. Il
en est de même pour l’ESEM puisque, à l’exception des
données virelloises, seuls deux autres observations
d’individus isolés ont été enregistrées à Mariembourg (11
juin 2015) et à Vergnies (26 juin 2018).
À Virelles, l’espèce a été découverte pour la première fois
le 4 juin 2017. Elle a été revue en 2018 et deux fois en 2019.
À chaque fois, il s’agissait d’individus isolés. Ce qui porte
à seulement quatre le nombre d’individus observés à
Virelles. L’espèce montre donc une présence régulière sur
le site depuis sa découverte, mais ses effectifs sont
extrêmement réduits. Si l’Aeschne isocèle peut être
observée de mai à début août en Belgique, la fourchette
virelloise se situe entre le 4 juin et le 20 juillet.

Fig. 8. – Aeshna affinis mâle. Virelles, le 23 juillet 2019
(Photo : Ph. DEFLORENNE)

Cette aeschne occupe des mares et des étangs à végétation
rivulaire abondante. Elle montre aussi une préférence pour
des habitats bien ensoleillés susceptibles de s’échauffer
rapidement (GOFFART et al., 2006). JACQUOT (2012)
indique que « la présence de roseaux paraît très favorable
mais pas indispensable…et que l’espèce peut également
être observée dans les étangs forestiers ou semiforestiers, à végétation rivulaire importante… ».

Le premier mâle a été découvert le 17 juillet, au niveau de
la « noue » à l’est de l’étang, où de nombreuses
observations se sont succédées au cours de l’été. A. affinis

À Virelles, trois mentions proviennent du Pré de Fagne, la
quatrième, à proximité, en bordure d’étang. Divers
éléments favorables à sa présence sont donc rencontrés :

18

des mares entourées d’une végétation dense et qui
s’assèchent l’été, un étang et une roselière étendue au sud
et une chênaie fagnarde occupant le nord du site.
Cependant les massettes (Typha sp.), souvent recherchées
par l’espèce, sont peu représentées à Virelles.
Gomphus pulchellus, le Gomphe joli
Endémique du sud de l’Europe, cette espèce étend son aire
vers le nord et l’est depuis plusieurs décennies (GOFFART
et al., 2006), avec des observations récentes dans l’est de
l’Allemagne, en République Tchèque et en Autriche. Dans
les Balkans, la reproduction de ce Gomphidé est désormais
avérée au Monténégro et au nord de l’Albanie (BOUDOT et
al., 2017). Elle est commune en Belgique et actuellement
non menacée (GOFFART et al., 2006) et sa répartition a plus
que doublé en Wallonie ces vingt dernières années.Elle se
réchauffe longuement au soleil sur les planches d’un
caillebotis, un sol nu, un tas de schiste ou un sentier.
Le Gomphe joli reste peu signalé à Virelles, avec des
mentions essentiellement au Pré de Fagne et, depuis peu,
dans et aux abords de la réserve naturelle des Prés de
Virelles. Il n’y a cependant aucune donnée sur la présence
de cet anisoptère en 2020 : la succession de printemps très
chauds et très secs asséchant tôt les petits plans d’eau et
des autres ruisseaux fagnards contrarie sans aucun doute
fortement son développement larvaire qui peut durer trois
ans dans nos contrées. Quant aux vastes étangs, le Gomphe
joli apprécie surtout ceux à fond sablonneux et peu
colonisés par les plantes flottantes et submergées
(GOFFART et al., 2006), soit des conditions assez différentes
de celles de l’étang de Virelles. On signalera enfin la
phénologie estivale, avec des mentions uniquement en juin
et juillet, ce qui semble correspondre à la situation en
ESEM Entre-Sambre-et Meuse malgré quelques rares
données rapportées dès la dernière décade de mai.

observation n’a été réalisée en 2020, malgré des efforts
importants de prospection. La sécheresse printanière et
estivale ne peut pleinement expliquer cette absence locale
tant L. fulva était présente en ce début d’année sur le site
des étangs de Roly situé à seulement quelques kilomètres
(cf. https://observations.be/). Divers auteurs s’accordent
sur une assez large palette d’habitats : rivières, ruisseaux à
courant lent, canaux, étangs,… tout en mentionnant la
nécessité d’une importante végétation rivulaire composée
de roseaux (DIJKSTRA, 2007). Les eaux claires et rapides
situées en vallées étroites et boisées peuvent aussi parfois
être fréquentées (GOFFART et al., 2006). L. fulva semble
aussi préférer des milieux aquatiques avec une faune
piscicole.
Orthetrum brunneum, l’Orthétrum brun,
L’Orthétrum brun (Fig. 9) occupe la moitié méridionale de
l’Europe, la Belgique constituant la marge nord de sa
distribution. L’espèce, bien que toujours rare, peut être
observée sur l’ensemble de notre territoire, le plus souvent
de manière temporaire. En ESEM, aucune donnée n’est
citée avant 1980. Ces dernières années, cet orthétrum est
signalé ça et là, mais il faut bien reconnaître que les
observations sont disparates et peu répétitives d’une année
à l’autre, en rapport avec le caractère pionnier de l’espèce.

Libellula fulva, la Libellule fauve
Cette espèce est fréquente en région méditerranéenne, plus
irrégulière ailleurs, mais de plus en plus présente dans le
nord de la France et en Belgique depuis quelques années,
sans doute à cause du réchauffement du climat (BOUDOT et
al., 2017). Jusqu’en 2000, GOFFART et al. (2006) mentionne
cette libellule comme très rare dans notre pays, avec des
populations nettement localisées et essentiellement en
Flandre. Dans le sud de l’Entre-Sambre-et-Meuse, la
première mention de Libellula fulva date de juin 2003
(Roly), et il faut patienter jusqu’à 2017 pour que les
observations se multiplient tout en restant extrêmement
limitées (Petigny, Virelles, Matagne-la-Grande, Fagnolle).
À Virelles, le statut de cette espèce pose toujours quelques
questions : si des imagos mâles et femelles sont notés cités,
aucun accouplement ni ponte (en solo) ne sont toutefois
observés, de même qu’aucun individu néonate (n’est
observé). Vraisemblablement, la Libellule fauve ne se
reproduit pas dans notre zone d’étude et son absence en
dehors de la réserve naturelle de l’étang de Virelles semble
accréditer la thèse d’une population précaire avec au mieux
quelques individus erratiques. Notons d’ailleurs qu’aucune

Fig. 9. – Orthetrum brunneum mâle. Vaulx, le 23/07/2019.
(Photo. Ph. DEFLORENNE)

À Virelles, la première mention remonte à 2018 seulement,
lorsqu’une femelle est aperçue pondant des œufs dans une
mare fraîchement creusée dans l’extension du Pré de Fagne.
En 2019, l’espèce est retrouvée aux Prés de Virelles mais
aussi à l’est de l’étang, le long d’un petit ru à la limite de
Vaulx où huit exemplaires sont comptabilisés.
Il s’agit d’une espèce à apparition typiquement estivale. La
majeure partie des observations se répartissent entre la mijuin et la fin août. L’Orthétrum brun est une espèce
pionnière des plans d’eau ou des eaux faiblement courantes,
avec une végétation peu abondante et des sols nus
19

(GAUQUIE, 2006). Sur le territoire du parc naturel des
plaines de l’Escaut et dans le bassin carrier tournaisien,
GAUQUIE (2006) a trouvé des individus sur des substrats
différents (calcaire, sable ou argile) mais dans des zones
sans végétation ou à végétation basse. Les zones humides y
sont oligotrophes à eutrophes, avec des suintements ou des
filets d’eau à débit variable. À Virelles, deux types de
milieux sont occupés : des mares fraîchement creusées avec
des eaux oligotrophes et une végétation rase sur le pourtour
(le pré de Fagne et les Prés de Virelles) et le long d’un
ruisselet serpentant dans une pâture à l’est de l’étang. Ce ru
n’est pas clôturé, la végétation des bords est courte puisque
broutée.

Ce sympétrum (Fig. 10) se distingue des espèces voisines
par ses pattes jaunes, surtout au niveau des fémurs,
l’absence de noir sur les segments 8 et 9 de l’abdomen, ses
ailes hyalines et des sutures fines au niveau du thorax. La
difficulté de distinguer ce sympétrum d’espèces voisines
plus abondantes comme le Sympétrum strié, S. striolatum,
ou le Sympétrum sanguin, S. sanguineum, sous-évalue
probablement son statut réel.

Orthetrum coerulescens, l’Orthétrum bleuissant
L’Orthétrum bleuissant possède une aire de répartition
assez semblable à celle de l’Orthétrum brun ou comme le
l’affirme DIJKSTRA (2007) : « Il est commun autour de la
Méditerranée mais généralement localisé en Europe
centrale et septentrionale ». En Belgique, l’espèce se
rencontre tant au nord qu’au sud du pays mais elle reste peu
abondante. Son schéma d’installation dans notre pays, tout
comme dans l’ESEM, ressemble fortement à celui de son
espèce sœur bien qu’elle l’ait sans doute précédé quelque
peu. La plupart des observations concernent un nombre
réduit d’individus, mais parfois les nombres explosent,
comme cette centaine d’individus signalés dans une
carrière de l’entité de Philippeville en juin 2019.
Le premier individu a été repéré en juillet 2019 à Vaulx,
non loin de l’étang. Il s’agit également d’une espèce
estivale. Cette espèce peut cohabiter avec O. brunneum
mais il semble plus exigeant que ce dernier. Dans les
endroits visités par GAUQUIE (2010), elle est lié à des
substrats calcaires, et accepte une végétation basse à haute
et supporte uniquement un faible débit d’eau. Le site de
Vaulx, correspond assez bien à cette description puisqu’il
se situe en limite de Calestienne et que la végétation est
prairiale et broutée aux abords d’un ruisseau à faible débit.

Sympetrum meridionale, le Sympétrum mériodional
Comme son nom le suggère, cette espèce est établie sur une
large zone du pourtour méditerranéen. Les populations les
proches de chez nous se situent historiquement dans le
centre de la France, avec parfois des reproductions plus au
nord (DIJKSTRA, 2007). Les premières mentions belges
remontent déjà au 19e siècle mais sans aucune preuve de
reproduction locale, les dates d’observations suggérant
d’ailleurs une dispersion estivale. En 2000, après une
centaine d’années d’absence (GOFFART, 2009), ce
sympétrum est identifié dans trois localités dont Harchies
(GOFFART et al., 2006).
À ce jour, les mentions sont régulières, tant au nord qu’au
sud du pays, mais l’espèce est toujours considérée comme
« très rare » (cf. https://observations.be/), même si de
nouvelles localités sont régulièrement renseignées (MOTTE,
2018).
20

Photo 10. – Sympetrum meridionale mâle ténéral.
Cerfontaine, août 2019. (Photo Ph. DEFLORENNE).

Dans l’Entre-Sambre-et-Meuse (ESEM), un premier
individu a été découvert le 22 juillet 2012 à Treignes. Il faut
attendre le 11 septembre 2018 pour une seconde
observation d’un mâle à Cerfontaine. Trois jours plus tard,
un mâle et un tandem sont repérés lors de recherches autour
de l’étang de Virelles ; l’espèce y est vue la dernière fois le
16 octobre. En 2019 et 2020, elle est retrouvée tant à
Cerfontaine qu’à Virelles, et en 2020, Roly s’ajoute à la
liste.
L’espèce reste rare en ESEM où elle est certainement sousdétectée. À Virelles, il faut le plus souvent déterminer une
centaine de Sympetrum avant de trouver un individu
de cette espèce. Elle s’y reproduit toutefois puisqu’un
tandem y a été vu ainsi que des individus fraîchement mués,
aussi bien à Virelles qu’à Cerfontaine. De plus, la répétition
des observations sur les deux sites va également dans ce
sens. Les dates extrêmes, les 13 juillet et 16 octobre pour
l’ESEM, correspondent à la période de vol de l’espèce en
Belgique, même si quelques individus peuvent déjà être
aperçus en juin et plus rarement en novembre.
Le Sympétrum méridional évolue à proximité de mares ou
de plans d’eau de faible profondeur. À Virelles, il n’est
donc pas à rechercher au-dessus de l’étang ou dans ses
abords immédiats. En 2020, malgré une sécheresse
persistante, des individus postés en bordure de roselière
ouest ont été repérés, profitant du retrait des eaux. La
plupart des observations ont cependant été effectuées dans
le Pré de Fagne, au nord de l’étang, où de nombreuses
mares de différentes profondeurs, ont été creusées. La
plupart d’entre elles s’assèchent l’été. Elles sont entourées
d’arbres ou de plantes de différentes hauteurs qui

constituent autant de postes d’affûts. Une observation
provient de la noue à l’est de l’étang. Celle-ci s’assèche
également en été. À Cerfontaine, elle fréquente les abords
d’un fond humide au sein d’une carrière dont les eaux
subissent une évaporation estivale intense. Les milieux
occupés en ESEM correspondent donc en tous points à ceux
renseignés ailleurs pour l’espèce puisque comme l’écrivent
disent GRAND & BOUDOT (2006) : « Elle est à rechercher
principalement en août, sur les plans d’eau peu profonds
encombrés de végétation émergente et à niveau fluctuant »
ou encore De KNIJF & TERMAAT (2010) : « Toutes les
localités où la reproduction a été observée se caractérisent
par la présence de pièces d’eau relativement peu étendues,
peu profondes et plutôt chaudes, s’asséchant en partie en
été et avec une végétation émergente bien développée sur
les rives ».
Leucorrhinia caudalis, la Leucorrhine à large queue
Selon GOFFART et al. (2006), Leucorrhinia caudalis est
surtout représenté dans l’est et le nord-est de l’Europe, du
sud de la Fennoscandie à la Pologne et l’est de l’Allemagne.
En Europe moyenne et de l’Ouest, l’espèce est disséminée
en populations très éparses.
Après une centaine d’années sans observation belge,
l’espèce est découverte en 2011 à Malmedy, Chiny,
Chameleu, Rouvroy et Étalle. En 2012-2015, l’espèce est
toujours observée sur ce dernier site où le nombre
d’individus semble en diminution au cours des années. En
2018, alors qu’elle n’était plus renseignée en 2016 et 2017,
l’espèce a été détectée sur deux sites : pour la première
fois, en bordure de Semois et dans la région de Malmedy
où elle avait précédemment été renseignée 2011 et 2013
(MOTTE, 2018). Dans ce contexte, la découverte d’un mâle
le 14 juin 2019 sur la rive sud de l’étang de Virelles fut donc
une surprise totale. Il s’avéra par la suite que l’espèce avait
été vue 15 jours plus tôt, non loin de là, sur la commune de
Froidchapelle. Des recherches ultérieures ont permis de
retrouver des individus, toujours des mâles, sur la rive sud
de l’étang virellois mais aussi dans la zone ouest appelée
‘Les Prés de Virelles’ où cinq individus furent comptés.
Les dates extrêmes d’observations régionales, entre le 31
mai et le 28 juin, correspondent à la période mi-mai à début
août, avec un pic en juin, décrite par DIJKSTRA (2007).
En ESEM, L. caudalis a été trouvé dans deux types
d’habitats :

l’espèce, s’apparentant plutôt, comme son nom
l’indique, à une étendue prairiale, moyennement
bocagère. Quant aux mares, elles possèdent peu de
végétation aquatique. Par contre, les pourtours sont
envahis par une mégaphorbiaie. De nouvelles
observations devraient permettre de mieux appréhender
l’espace que L. caudalis y occupe vraiment.
Il est difficile de donner un statut exact à cette espèce. Bien
que cinq mâles seulement aient été observés en 2019, il
n’est pas impossible que des pontes occasionnelles aient eu
lieu. Nous préférons toutefois lui garder le statut de
‘visiteur’.
Leucorrhinia pectoralis, la Leucorrhine à gros thorax
En Europe, la Leucorrhine à gros thorax possède une
distribution nord-orientale, elle est aussi disséminée plus à
l’ouest en populations très éparses et souvent très réduites.
En Belgique, elle est considérée comme très rare sur
l’ensemble du territoire. Elle semble plus abondante en
Campine, mais peut être observée ponctuellement ici et là.
Seules quatre mentions concernent l’ESEM, toutes sans
lendemain : une donnée en 1950 dans la vallée de
l’Hermeton, un mâle le 30 mai 2012 à Cul-des-Sarts, trois
individus le 4 juillet 2012 à Virelles, et enfin un mâle le 25
mai 2017 à Agimont.
Cette espèce est liée les eaux stagnantes mésotrophes à
faiblement eutrophes, ni trop acides ou alcalines dans un
environnement forestier et bien pourvus en végétation
aquatique rivulaire (GOFFART et al., 2006). Cette
description de l’habitat correspond parfaitement à
l’observation réalisée dans les prés de Virelles, car les
individus se posaient sur la végétation en bordure de l’étang
Pirlot, de création assez récente (+/- 20 ans) et accolé à la
forêt communale. L’exemplaire de Cul-des-Sarts était posé
sur des herbes au bord d’une mare, creusée trois ans
auparavant, dans un bocage très arboré.

DISCUSSION
L’arrivée de nouvelles espèces à Virelles peut être
expliquée, au moins en ce qui concerne des espèces
occasionnelles, par une intensification du nombre
d’observations (Fig. 4), du nombre d’observateurs et une
meilleure connaissance des espèces. Toutefois, les
différents aménagements, notamment la création de mares,
ainsi que l’arrivée d’espèces méridionales prennent une
part importante dans cet afflux de nouveaux taxons.

 en bordure de l’étang de Virelles, parfois posé sur
Phragmites australis ou sur d’autres plantes rivulaires,
et à Froidchapelle, aux abords d’un étang forestier riche
en végétation aquatique. Ceci correspond à la
description de DIJKSTRA (2007) : « Mares, étangs et lacs
souvent forestiers aux eaux mésotrophes, riches en
végétation (notamment flottante) ».

La grande diversité des aménagements réalisés à Virelles
en termes de profondeur, de zones susceptibles de
s’assécher en été, d’éloignement par rapport à de l’étang…
a créé des habitats variés pour différentes espèces
d’odonates pionnières ou préférant les milieux en voie
d’assèchement (Aeshna affinis, Lestes sp., etc.).

 une zone bocagère parsemée de mares créées en 2018,
appelée « Les prés de Virelles ». Cet habitat, bien que
bordé d’une chênaie fagnarde, est plus étonnant pour

Cette amélioration de la capacité d’accueil des Odonates
des sites virellois se reflète dans la liste des espèces
observées. Le Tableau 2 révèle que seules quatre espèces
nouvelles sont liées à l’étang lui-même avec chaque fois
21

une ou deux d’observations. Les zones d’aménagements
décrites apportent chacune cinq à huit espèces nouvelles,
avec le plus souvent un nombre d’observations important et
une installation durable de ces espèces.
50
40

S

30

C

20

E

10

N

0
81-90

91-00

01-10

11-20

Fig. 11. – Répartition par décennies des 52 espèces recensées à
Virelles en fonction de leur origine géographique (C= médioeuropéenne, S = méridionale, N = nordique et E = orientale).

 deux ont une origine orientale, mais ne sont
représentées que par des individus erratiques.
L’origine des espèces nouvelles dont l’installation en
Belgique est avérée ou probable est donc clairement à
rechercher plutôt au sud de la Belgique. L’analyse de
toutes les données virelloises réparties sur quatre
décennies de 1981 à 2020 (Fig. 11) indique :
 une progression continue sur les quarante dernières
années des espèces méridionales passant succèssivement de deux à six, à huit puis à onze
 une progression également des espèces médioeuropéennes mais accentuée sur la dernière décennie
puisque passant de vingt-deux à vingt-quatre, de
nouveau vingt-quatre et finalement trente. Comme nous
le signalions plus haut, certaines de ces espèces
possèdent un statut intermédiaire entre médio- et sudeuropéen

L’étang, d’un intérêt majeur pour des espèces comme
Epitheca bimaculata, Erythromma najas et E. viridulum,
n’est donc pas la source d’apparition d’espèces nouvelles à
Virelles.

 très peu d’espèces ont une origine nordique ou orientale
(genres Leucorrhinia et Epitheca). De plus, aucune ne
se reproduit, excepté Epitheca bimaculata, un des
fleurons de l’étang.

Il est établi que les Odonates sont de bons indicateurs pour
évaluer la qualité biologique et monitorer les zones
humides (OERTLI, 2008). Même si l’on exclut les deux
espèces du genre Leucorrhinia, considérées comme
visiteuses accidentelles, l’augmentation des observations
des libellules sur l’entièreté du village de Virelles semble
démontrer que les travaux de gestion et la création de
milieux humides augmentent significativement les
différentes composantes de la biodiversité, avec au
minimum cinq nouvelles espèces potentiellement
reproductrices par zone définie au Tableau 2, contre quatre
sur la totalité de l’étang.

Mis à part ce dernier cas, la totalité des espèces qui se
reproduisent à Virelles (ou qui sont susceptibles de le faire)
se compose donc d’espèces à tendance médio-européenne
ou méridionale.

La qualité de l’eau et le besoin en eaux oligotrophes ne
semble pas un élément essentiel à l’installation de
nouvelles espèces. Si l’on se réfère à la classification
établie par GOFFART et al. (2006), quatre des douze
espèces nouvelles pour Virelles préfèrent des eaux
stagnantes eutrophes, quatre habitent des eaux stagnantes
mésotrophes, deux sont ubiquistes (eaux courantes ou eaux
stagnantes), une espèce, Orthetrum coerulescens, est liée
aux eaux courantes et une autre, Leucorrhinia pectoralis est
inféodée aux eaux oligotrophes.
La modification de la distribution des espèces de libellules
liée au changement climatique a été largement discutée
dans de nombreuses publications. (e.a. GOFFART & DE
SCHAETZEN, 2001). Virelles n’échappe pas à cette règle. Si
nous nous référons au schéma de distribution des espèces
en Europe défini par GOFFART et al. (2006), sur les douze
nouvelles espèces observées (Tableau 2) :
 six sont méridionales
 quatre sont médio-européennes, mais avec une
distribution très limitée plus au nord de l’Europe
22

CONCLUSIONS
Si le bilan peut paraître plutôt réjouissant en se focalisant
sur le nombre d’espèces observées, il doit toutefois être
nuancé. La récente progression peut être magnifiée par une
prospection plus intensive. Par contre, cinq espèces (sur
cinquante deux répertoriées à Virelles) n’ont pas été revues
ces quarante dernières années, à savoir Coenagrion
hastulatum, C. mercuriale, Aeshna juncea, Gomphus
vulgatissimus et Onychogomphus forcipatus. Hormis l’un
ou l’autre individu erratique, la plupart ont peu de chance
d’y être rencontrées à nouveau, vu leur répartition
nordique.
De même, certaines espèces régressent et leur avenir est
incertain. Citons Sympetrum vulgatum, avec seulement
deux données avérées entre 2001 et 2020, alors que
l’espèce était considérée comme régulière dans les années
1980, ou Somatochlora flavomaculata, autrefois répandu
au niveau du pré de Fagne ou des Prés de Virelles, et qui
s’est très fortement raréfié, les deux dernières observations
remontant à 2017 et 2021.
L’histoire ne se termine pas là puisque de nouvelles
recherches sont d’ores et déjà planifiées dans les années
prochaines. La découverte ou la progression de nouvelles
espèces comme Lestes dryas ou L. virens, par exemple, est
probable. De plus, le statut d’autres espèces, peu
renseignées à Virelles, comme Erythromma lindenii, doit
encore être éclairci.

REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier tous les observateurs qui se sont
succédé à Virelles depuis de nombreuses années et qui ont
transmis leurs observations, le groupe de travail Gomphus

pour la transmission de leurs données et dont les membres
parcourent régulièrement le site, les différents stagiaires qui
ont souvent été ‘nos yeux’, et tout spécialement Philippe
GOFFART pour sa relecture avisée.

BIBLIOGRAPHIE

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https://doi.org /10.1111/ddi.12913

23

Fig. 12. – Certains îlots et les aménagements de la rive sud de l'étang constituent des habitats favorables
à de nombreuses espèces de libellules. (Photo Jean-Marie SCHIETECATTE).

Espèces

Étang

Pré de
Fagne
+ nord

Lestes barbarus
Coenagrion
scitulum



Rive
sud

Prés
ouest

Compensation



••



••





Noue, est
et Vaulx

Habitat

Distribution

EUTR

S



EUTR

S

Ischnura pumilio





••





MESO

C

Aeshna affinis











EUTR

S

MESO

C

UBI

S

MESO

C

••

UBI

S



RHEO

C



EUTR

S



MESO

E



OLIGO

E

Aeshna isoceles





Gomphus pulchellus

••





Libella fulva





Orthetrum
brunneum
Orthetrum
coerulescens
Sympetrum
meridionale
Leucorrhinia
caudalis
Leucorrhinia
pectoralis
Total des
observations



••





••


4



8

6

7

5

7

Tableau 2. – Nombre de nouvelles espèces observées en divers endroits de Virelles. Le signe • indique une occupation
(•• pour importante). L’habitat préférentiel est défini pour chaque espèce (EUTR = eaux stagnantes eutrophes, MESO =
eaux stagnantes mésotrophes, UBI = ubiquistes (eaux stagnantes ou courantes), RHEO = eaux courantes et OLIG = eaux
stagnantes oligotrophes) ainsi que leur distribution (C= médio-européenne, S = méridionale et E = orientale).

24

Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 25-36

Anemone apennina L. et Tulipa sylvestris L., deux plantes castrales connues
de longue date dans la Botte du Hainaut (province de Hainaut, Belgique)
Jean-Michel LECRON* et Michel ROUARD**

RÉSUMÉ
L’Anémone des Apennins (Anemone apennina) et la Tulipe sauvage (Tulipa sylvestris subsp. sylvestris) ont été introduites il y a bien
longtemps dans les anciens domaines du duc DE CROŸ à Beaumont et à Chimay (province de Hainaut, Belgique) ; elles s’y sont
naturalisées et maintenues jusqu’à nos jours. Un état des lieux des populations de ces deux plantes dans la Botte du Hainaut est établi
(présence, effectif, état de conservation et menaces). L’Anémone des Apennins qui n’est plus connue que sur un seul site à Beaumont est
en situation critique. Quant à la Tulipe sauvage, elle demeure présente en plusieurs endroits à Beaumont et à Chimay, avec quelques
populations aux effectifs assez importants (Parc de Paridaens à Beaumont, Allée du Prince et Parc du Prince à Chimay).

ABSTRACT
Anemone apennina L. and Tulipa sylvestris L., two known castral plants for a long time in the Botte du Hainaut (province of
Hainaut, Belgium). The Apennine anemone (Anemone apennina) and the wild tulip (Tulipa sylvestris subsp. sylvestris) were introduced
long ago in the domains of the former Duke DE CROŸ in Beaumont and Chimay (province of Hainaut, Belgium); the species are now
naturalized in the province and have been maintained since their introduction. An inventory was established to document the threats to
and presence, quantity, and conservation status of the populations of these two plants in the Botte du Hainaut. The Apennine anemone,
which now exists at only one site in Beaumont, is in critical condition. As for the wild tulip, it is still present in several places in Beaumont
and Chimay with some larger populations in Paridaens park in Beaumont, along the Prince's lane, and in the Prince's park in Chimay.

* rue Lutiau 42, B-6500 Beaumont. Courriel : jmlecron@msn.com
** rue Pauline Hubert 51, B-6470 Rance. Courriel : rouard.michel@skynet.be
____________________________________

INTRODUCTION
Alliant le patrimoine bâti et la flore naturalisée, les plantes
castrales constituent une catégorie assez originale de
végétaux. Il s’agit de plantes anciennement introduites aux
abords de constructions prestigieuses tels que châteaux,
manoirs ou monastères, surtout à des fins décoratives ou
médicinales ; elles se sont ensuite maintenues spontanément à ces emplacements initiaux (par multiplication
végétative ou dissémination de graines) ou ont essaimé
dans les environs immédiats. Ce sont souvent des plantes
étrangères au territoire en question mais il peut aussi s’agir
de plantes indigènes, dans ce cas naturellement absentes en
ces endroits particuliers. Étymologiquement, l’adjectif
‘castral’ vient du latin castrum, lieu fortifié. Le concept de
plantes castrales a été introduit par Jacques DUVIGNEAUD
en réponse au mot ‘stinsenplanten’ décrivant ce type de
plantes aux Pays-Bas (DUVIGNEAUD, 1991). Ces plantes
castrales comme d’ailleurs tous les végétaux introduits ne
sont pas sans poser certains problèmes en termes de conser-

vation de la nature, illustrés par la perte de visibilité de leur
aire d’indigénat, et surtout par la possibilité de croisement
et d’introgression de taxons indigènes (LAMBINON, 1997).
Un petit pourcentage de ces plantes introduites va aussi se
révéler invasif et coloniser à terme des espaces au détriment
de la flore locale, avec dommages écologiques voire
économiques en perspective.
Dans nos régions, les sites susceptibles d’accueillir ces
plantes castrales sont bien évidemment nombreux, la
Belgique est d’ailleurs réputée pour sa densité élevée de
châteaux. Certains de ces sites sont de ce point de vue bien
documentés dans la littérature, comme les environs du
château de Houx en province de Namur (DUVIGNEAUD,
1990), le parc du château de Xhos à Tavier en province de
Liège (DUVIGNEAUD & SAINTENOY-SIMON, 1993), le parc
de Paridaens à Beaumont en province de Hainaut
(DUVIGNEAUD & LEURQUIN, 1994) ou encore le Domaine
de Bouchout à Meise (province du Brabant flamand) où est
installé le Jardin botanique de Meise (RONSE, 2011).

25

Les plantes relevant de cette catégorie sont également
nombreuses ; on y trouve à la fois des espèces ligneuses et
herbacées. Parmi les plus représentatives, on peut citer
Arum italicum (le Gouet d’Italie), Buxus sempervirens (le
Buis), Corydalis cava (la Corydale creuse), Daphne
laureola (le Laurier des bois), Doronicum pardalianches
(le Doronic à feuilles cordées), Galanthus nivalis (la Perceneige), Leucojum vernum (la Nivéole printanière),
Lonicera xylosteum (le Camérisier)1, Mahonia aquifolium
(le Mahonia), Pulmonaria officinalis (la Pulmonaire
officinale), Staphylea pinnata (le Faux pistachier)
Symphoricarpos albus var. laevigatus (la Symphorine),
Taxus baccata (l’If) ou encore Vinca major (la Grande
pervenche).

Parmi toutes celles-ci, c’est l’Anémone de Grèce (Anemone
blanda) qui ressemble le plus à l’Anémone des Apennins ;
elle est d’introduction plus récente mais est de nos jours
beaucoup plus fréquemment cultivée que cette dernière, en
raison notamment de sa période de floraison plus étalée.
Cette espèce peut facilement s’échapper des jardins,
comme le montre le site de saisie en ligne
« observations.be » (consulté en juin 2021) ; à l’instar de
l’Anémone des Apennins, elle peut aussi maintenant être
considérée comme localement naturalisée en Belgique
(VERLOOVE, 2006 ; VERLOOVE, 2017 ; F. VERLOOVE,
comm. pers., 2021).

Parmi toutes ces plantes castrales, Anemone apennina et
Tulipa sylvestris ont particulièrement retenu l’attention des
auteurs ; ces deux espèces ont en commun, outre leur
floraison précoce suivie par la disparition assez rapide des
organes aériens (dès les mois de mai et juin), d’être
naturalisées et connues depuis longtemps dans la Botte du
Hainaut (communes de Chimay et de Beaumont) (GALOUX
et al., 1986 ; HAVRENNE, 1993). Ces deux plantes ont par
ailleurs été signalées ensemble dans certaines stations.
L’objectif est ici de faire un état des lieux des populations
en place (présence, effectif, état de conservation, menaces,
etc.) et de mettre en évidence le caractère castral des
stations en abordant l’aspect historique des sites
d’implantation (bâtiments et parcs attenants).

ANEMONE APENNINA
L’Anémone des Apennins (Anemone apennina L.) fait
partie de la famille des Renonculacées et, comme les deux
espèces indigènes A. nemorosa et A. ranunculoides, elle
développe des rhizomes à partir desquels feuilles et hampes
florales peuvent se former rapidement au début du
printemps. La floraison de cette plante vernale est assez
spectaculaire, avec des fleurs à nombreux tépales
rayonnants de teinte bleue ou plus rarement blanche (Fig.
1). Son aire d’indigénat se situe dans le sud de l’Europe
(Corse, Italie, Nord-Ouest des Balkans) (LAMBINON &
VERLOOVE, 2012). En Corse, elle se rencontre en sous-bois
herbacés mésophiles (TISON & DE FOUCAULT, 2014).
Cultivée dans nos régions pour son attrait ornemental
printanier, cette espèce est capable de se maintenir et de se
naturaliser localement. D’autres anémones à fleurs bleues
(ou violacées) peuvent se rencontrer dans nos parcs et
jardins : Anemone blanda (l’Anémone de Grèce), des
formes et cultivars à fleurs bleuâtres d’A. coronaria
(l’Anémone couronnée) et éventuellement A. hepatica
(syn. : Hepatica nobilis, l’Anémone hépatique), A.
pulsatilla (syn. : Pulsatilla vulgaris, l’Anémone pulsatille),
certains cultivars d’Anemone nemorosa (l’Anémone sylvie) et encore d’autres taxons moins connus.

Il est parfois difficile d’affirmer avec certitude que telle ou telle
espèce est une plante castrale. C’est le cas dans nos régions avec
1

26

Fig. 1. – Anemone apennina, Chapelle du Goulot à
Beaumont, 15 avril 1995. (Photo : J.-M. LECRON).

La clef suivante facilitera la distinction entre ces deux
taxons apparentés :


Pédicelle à poils étalés ; infrutescence penchée lors
de la maturation des akènes ; tépales glabres ;
système souterrain formé de courts rhizomes
tubéreux.……...…...…...………..Anemone blanda



Pédicelle à poils apprimés ; infrutescence demeurant dressée lors de la maturation des akènes ;
tépales faiblement pubescents à la face inférieure ;
système souterrain longuement rhizomateux…..…
………………………………….….....A. apennina

Dans la Botte du Hainaut, les mentions anciennes
d’Anemone apennina ont pour cadre la ville de Beaumont
et ses alentours et remontent à 1883 (DURAND, 1885). Dans
le prodrome de la Flore belge (DURAND, 1899), la plante
est mentionnée comme étant fort abondante dans les bois et
prairies à Beaumont et à Leval-Chaudeville, où elle est
connue depuis fort longtemps. Deux stations distinctes sont
identifiées, l’une fait référence au Bois du Goulot, où se
trouvent les vestiges de la Chapelle du même nom, l’autre
est implantée au sein du Parc de Paridaens ; à peine 500 à
600 mètres à vol d’oiseau séparent ces deux endroits.

certaines stations de Lonicera xylosteum (DUVIGNEAUD &
SAINTENOY-SIMON, 1993).

TULIPA SYLVESTRIS
La Tulipe sauvage (Tulipa sylvestris L. subsp. sylvestris)
est une liliacée bulbeuse produisant en avril-mai de grandes
fleurs spectaculaires et odorantes, formées de six tépales
jaunes répartis en deux verticilles. Les trois éléments du
verticille externe sont plus étroits que ceux du verticille
interne et ont tendance à s’incurver vers l’extérieur (Fig. 2).
La floraison est considérée comme étant peu fréquente, la
plupart des individus ne développant alors généralement
qu’une seule feuille.

sylvestris en Europe centrale remontent en effet à la fin du
16e siècle (KOWARIK & WOHLGEMUTH, 2006). En outre,
elle ne figure pas dans les premières « encyclopédies »
européennes répertoriant l’ensemble des plantes connues à
l’époque ; elle est également absente de la bordure fleurie
des tapisseries médiévales (PAVORD, 1999 ; POLLAN, 2004).
Depuis longtemps, de multiples tulipes sont cultivées dans
nos parcs et jardins ; elles sont issues de plusieurs espèces
dont Tulipa gesneriana, originaire d’Asie occidentale
(LAMBINON & VERLOOVE, 2012) ; plus de 6000 variétés
horticoles sont dorénavant répertoriées (LIESER, 2005).
Tulipa sylvestris se distingue de la majorité d’entre elles par
ses étamines qui présentent des filets à base pubescente et
par ses six tépales de teinte jaune uniforme (rarement
crème), plus ou moins lavés de vert ou de rouge.
Trois sous-espèces sont reconnues (CHRISTENHUSZ et al.,
2013) ; seule la sous-espèce autonyme est présente dans nos
régions (DE LANGHE & SLEMBROUCK, 1993). La sousespèce australis (Link) Pamp., parfois élevée au rang
spécifique, montre en Europe une aire de répartition plus
méridionale ; en France, elle n’est pas signalée dans le tiers
nord du territoire ; elle se distingue de la sous-espèce
sylvestris par ses tépales externes généralement lavés de
rougeâtre et par son fort taux de floraison (TISON & DE
FOUCAULT, 2014). La sous-espèce primulina (Baker)
Maire & Weiller, parfois élevée au rang spécifique, est
mentionnée d’Algérie et du Maroc (CHRISTENHUSZ et al.,
2013).

Fig. 2. – Tulipa sylvestris, Allée du Prince à Chimay, 1er mai
2010. (Photo J.-M. LECRON).

En outre, la Tulipe sauvage semble stérile dans nos régions
(LAMBINON & VERLOOVE, 2012)2. La multiplication
végétative est par contre très active, surtout par la
production de rhizomes allongés se terminant par un petit
bulbe (BOURNERIAS et al., 2001 ; LAMBINON & VERLOOVE,
2012). Bien que son indigénat ait été évoqué par le passé
(DURAND, 1899), il s’agit d’une plante naturalisée dans nos
régions, introduite pour ses évidentes qualités
ornementales. Sa faculté à produire des bulbes
surnuméraires à l’extrémité de longs rhizomes a vraisemblablement facilité son maintien et sa naturalisation.
Dans nos régions, elle peut s’installer dans divers milieux
comme les prairies, vergers, talus herbeux, petits bois,
anciens parcs. Plus au sud, elle fait aussi partie de la flore
adventice des vignobles. Son aire d’indigénat n’est pas
connue avec précision ; elle couvrirait une zone s’étendant
du sud de l’Espagne à l’Asie centrale en passant par
l’Afrique du Nord (CHRISTENHUSZ et al., 2013). Bien
qu’apparemment d’introduction et de naturalisation plus
ancienne dans nos régions qu’Anemone apennina, la Tulipe
sauvage ne semble cependant pas pouvoir être qualifiée
d’archéophyte3. Les premières mentions de Tulipa
2

À partir de graines récoltées sur des plantes cultivées en jardin
(et issues de pépinière), l’un de nous (MR) a néanmoins réussi à
produire de jeunes plantules ; de tels essais seraient à envisager à
partir de graines issues des populations de la Botte du Hainaut.

En Belgique, la répartition récente et ancienne de T.
sylvestris a été bien documentée et son introduction y est
datée de la première moitié du 17e siècle (DE LANGHE &
SLEMBROUCK, 1993). Toutefois, le Prodrome de la Flore
belge (DURAND, 1899) évoque 1781 comme première
observation de cette espèce en Belgique par F.-J.
LESTIBOUDOIS.
La Tulipe sauvage est globalement en régression sur
l’ensemble du territoire. En Région flamande, c’est dans les
environs d’Anvers, de Malines et de Louvain que se
concentre une bonne partie des populations actuelles (DE
BEER, 2006). En Région wallonne, la Tulipe sauvage était
connue jadis de plusieurs localités mais ne subsisterait plus
actuellement (avec le statut de plante naturalisée de longue
date) qu’à Beaumont et à Chimay.
La Tulipe sauvage bénéficie en Région wallonne d’une
protection légale (Annexe VIb de la loi du 12 juillet 1973
sur la conservation de la nature).
Dans la Botte du Hainaut, elle est signalée vers 1866 au
niveau de pelouses et de vieux murs à Beaumont (HARDY
& LEBRUN, 1867). La première édition du Manuel de la
Flore de Belgique (CREPIN, 1860) n’en fait pas
mention mais bien la seconde édition (CREPIN, 1866). Le
3

Plante introduite depuis fort longtemps (une date arbitraire
souvent retenue est avant 1500) et largement naturalisée
(LAMBINON & VERLOOVE, 2012).

27

« Parc de Beaumont » fait ainsi son apparition dans la liste
des stations connues à l’époque. À Chimay, bien que citée,
en tant que plante cultivée, depuis le début du 17e siècle
(DUVIGNEAUD & MATHOT, 1994), les premières mentions
dans la littérature spécialisée sont curieusement beaucoup
plus récentes. Dans le Prodrome de la Flore belge
(DURAND, 1899), seule la localité de Beaumont est citée
pour la Botte du Hainaut. Il en est de même 80 ans plus
tard : l’Atlas de la flore belge et luxembourgeoise (VAN
ROMPAEY & DELVOSALLE, 1979) ne renseigne, en effet,
pour la Botte du Hainaut que la maille H4.43,
correspondant à la localité de Beaumont.
À Beaumont, les mentions plus ou moins récentes
permettent d’identifier deux stations distinctes (Parc de
Paridaens et Parc des Roquettes). Dans cette localité, la
Tulipe sauvage ne semble jamais avoir été associée à la
flore commensale des vignobles, ceux-ci ont pourtant
vraisemblablement existé sur les pentes raides bien
exposées au pied des remparts de la ville. À Chimay, deux
stations sont également identifiées ; elles se situent à
proximité du château, au sein de ses dépendances (Allée du
Prince et Parc du Prince).

LES SITES D’IMPLANTATION
Il est curieux de constater que les localités de Tulipe
sauvage se limitent, dans l’Entre-Sambre-et-Meuse, aux
anciens domaines du duc DE CROŸ (DUVIGNEAUD &
LEURQUIN, 1994). Les villes de Beaumont et de Chimay
furent en effet des places fortes aux mains de la famille DE
CROŸ durant plusieurs siècles. Le duc Charles DE CROŸ est
vraisemblablement à l’origine de l’introduction de cette
plante en ces lieux et ce au tournant des 16 e et 17e siècles.
Cet illustre personnage, qui naquit au château de Beaumont
en 1560, était un collectionneur averti, accumulant
tableaux, manuscrits, monnaies et médailles (GACHARD,
1846 ; DUVOSQUEL, 1997). Il était également amateur de
plantes rares et comptait parmi ses relations le célèbre
médecin et botaniste flamand Charles DE L’ÉCLUSE
(Carolus Clusius, 1526-1609), comme en atteste un
échange épistolaire (ALBESSART, 1958 ; DUVIGNEAUD &
MATHOT, 1994). On attribue généralement à cet éminent
botaniste, créateur de l'un des premiers jardins botaniques
d’Europe à Leyde aux Pays-Bas, un rôle principal dans la
diffusion des tulipes en Europe (DUVIGNEAUD & MATHOT,
1994 ; KUITERT, 1996). Un engouement exacerbé pour ces
plantes (tulipomanie) culminera dans les années 1630-1637
dans le nord de l’Europe. Il n’est donc pas étonnant de
trouver dans la liste des plantes cultivées dans les anciens
jardins des princes de Chimay (datée de 1606) le
« tulipan », ancienne dénomination de la Tulipe sauvage
(DUVIGNEAUD & MATHOT, 1994).
Quant à l’Anémone des Apennins à Beaumont, il ne semble
pas y avoir de traces écrites relatant sa présence avant 1883,
mais elle était connue à cet endroit depuis fort longtemps
(DURAND, 1885). A-t-elle été cultivée à l’époque de
Charles DE CROŸ aux abords de l’ancien château et dans
d’autres possessions du duc comme le Bois du Goulot, ou
est-elle d’introduction plus récente, notamment du tout
28

début du 19e siècle lors de l’aménagement de l’actuel parc
à l’emplacement de l’ancien château ?
Dans la Botte du Hainaut, à Beaumont et à Chimay, les
observations récentes (ou assez récentes) de ces deux
plantes se distribuent en cinq sites d’implantation distincts.

1. Le Parc de Paridaens, Beaumont
(coordonnées IFBL : H4.43.43)
Beaumont fut longtemps une place forte importante. Dès le
11e siècle, un château fort et des fortifications furent élevés
par Richilde, comtesse du Hainaut, et par Baudouin IV. Ces
fortifications et le château furent fortement améliorés par
Philippe III DE CROŸ dès 1549. Charles DE CROŸ continua
ensuite l’oeuvre entreprise par son père. Philippe
BOSQUIER, panégyriste de Charles DE CROŸ dit de lui (à
son décès en 1612) : « que celui-ci avoit embelli Beaumont
d’un paradis terrestre, d’un palais que prendroit pour logis
nostre Dieu s’il renaissoit sur terre » (BERNIER, 1880). Des
périodes beaucoup plus troubles (épidémies, guerres,
pillages) sonnèrent ensuite le glas de ce bel endroit et de la
cité de Beaumont. Le château historique fut incendié en
1655 et entièrement détruit en 1691 (BERNIER, 1880). Par
héritages successifs, le domaine de Beaumont devient
propriété des comtes DE CARAMAN-CHIMAY. En 1805, le
comte Maurice-Gabriel DE RIQUET, comte de Caraman, de
Beaumont et de Boussu acheta une maison bourgeoise à
Beaumont, l’aménagea de deux ailes et d’une façade néogothique. Un beau parc fut créé sur l’emplacement des
ruines de l’ancien château. En 1927, le dernier prince de la
branche de Beaumont (Marie-Joseph-Charles-Philippe DE
RIQUET, prince de CARAMAN-CHIMAY) quitte la région
pour s’établir en France. Ses propriétés furent mises en
vente dès 1930. En 1937, l’ordre religieux des Filles de
Marie fait l’acquisition du château et du parc pour en faire
une école (Institut Paridaens). Le parc, de style à l’anglaise,
devint, pour part importante, la cour de récréation de
l’institution, et il garde encore aujourd’hui cette fonction.
Diverses plantes castrales y ont été observées à la fin du 20e
siècle : Anemone apennina, Prunus padus, Ribes alpinum,
Staphylea pinnata et Tulipa sylvestris (DUVIGNEAUD &
LEURQUIN, 1994). Sous le parc, les caves et souterrains de
l’ancien château abritent des populations de chiroptères ;
cet endroit bénéficie d’une protection en tant que Site de
Grand Intérêt Biologique (SGIB).
Les plus anciennes mentions de la Tulipe sauvage dans le
« Parc de Beaumont » (correspondant très vraisemblablement à l’actuel Parc de Paridaens) datent de 1866
(CREPIN, 1866 ; HARDY & LEBRUN, 1867). Ensuite, aucun
autre signalement ne semble avoir existé durant plus d’un
siècle, avant la redécouverte de la station au début des
années 1990 par DUVIGNEAUD & LEURQUIN (1994). Ces
deux auteurs y notent la présence de milliers de pieds
croissant dans les pelouses ombragées du parc mais
beaucoup d’entre eux sont réduits à une seule feuille et sont
stériles. Ces mêmes auteurs ont observé également
l’Anémone des Apennins au pied d’une chapelle rustique
où la plante existerait depuis au moins 1937.

En 2021, la Tulipe sauvage fait toujours bien partie de la
flore naturalisée du Parc de Paridaens. La situation semble
assez comparable à celle décrite au début des années 1990.
Des milliers de pieds occupent en effet différents
emplacements au sein des pelouses du parc mais ils sont
stériles ou presque en raison probablement de la tonte du
gazon pratiquée en ces lieux fréquentés par les élèves de
l’établissement scolaire : les feuilles prématurément
coupées ne permettent sans doute pas aux bulbes
d’accumuler des réserves suffisantes pour préparer et
déclencher une production florale ultérieure.
La Tulipe sauvage est également présente en plusieurs
petites plages de quelques mètres carrés dans les sous-bois
qui environnent les pelouses et laissés plus ou moins en
libre évolution. Elle y apparait plus florifère. Début avril
2021, un total de six hampes florales a été comptabilisé sur
l’ensemble du parc, dont une seule dans la grande pelouse
centrale, au pied d’un gros tilleul (Fig. 3).

Beaumont, présenta à sa ville sa jeune épouse Jeanne DE
BOISGELIN (SELLIÈRE-CHARON, 2005). Laissé en libre
évolution, le site des Roquettes a actuellement perdu
beaucoup de son « charme d’antan » ; une flore banale a
pris possession des bordures des chemins et des sentiers
mais y subsistent néanmoins quelques plantes remarquables déjà signalées à cet endroit à la fin du 19 e siècle,
comme Verbascum pulverulentum (la Molène floconneuse)
et Calamintha ascendens (le Calament ascendant).
Il est hasardeux d’attribuer à cet endroit situé hors des
remparts de la ville une des différentes mentions anciennes
de Tulipa sylvestris de Beaumont. C’est en mars 1961
qu’apparaît la première trace associée indiscutablement au
« Parc des Roquettes » ; il s’agit d’un matériel d’herbier
(fertile) collecté par François HUNIN et Louis HAUT,
membres des Naturalistes de Charleroi (BR - S.P.
1141973). L’étiquette accompagnant la part d’herbier
indique « un demi-are, mêlée au gazon encore ras d’une
prairie-pâture, le long du petit chemin empierré qui joint la
Tour Salamandre à la route de Chimay ». Cette station est
ensuite revue régulièrement (A. HAVRENNE in GALOUX et
al., 1986). Selon GALOUX et al. (1986), la plante croît dans
une lisière forestière sur calcaire, assez nitrophile, au pied
d’une haie et elle fleurit peu (Fig. 4).

Fig. 3. – Plage de pieds stériles de Tulipa sylvestris et l’unique
hampe florale, dans la grande pelouse centrale du parc de
Paridaens, à Beaumont, 1er avril 2021. (Photo : M. ROUARD).

L’Anémone des Apennins n’a par contre pas été retrouvée
en avril 2021 à hauteur de l’emplacement indiqué par
DUVIGNEAUD & LEURQUIN (1994) ; l’endroit où était
renseignée la chapelle rustique, disparue depuis longtemps,
est occupé par divers arbustes ornementaux et de vastes
plages d’Anemone nemorosa.
2. Le Parc des Roquettes, Beaumont
(coordonnées IFBL : H4.43.43)
À l’extérieur des remparts de la ville de Beaumont, les
abords de la Tour Salamandre ont jadis fait l’objet d’un
aménagement en lieu de promenade, devenant le « Parc des
Roquettes ». Divers cheminements assez escarpés
permettent notamment de descendre jusqu’à la rivière, au
moulin banal et à la Chapelle Saint-Julien. L’allée
principale de ce site aménagé, dénommée « Allée des
Roquettes », suit par contre les courbes de niveau et relie
sans effort une des anciennes entrées de la ville (la Poterne)
à la chaussée de Chimay (actuelle N53). Ce site fut l’objet
d’une « joyeuse entrée » le 22 juin 1913 lorsque Philippe
DE RIQUET, prince de Caraman-Chimay et bourgmestre de

Fig. 4. – Pieds stériles de Tulipa sylvestris, Parc des
Roquettes à Beaumont, 27 février 2021.
(Photo : J.-M. LECRON).

Le relevé phytosociologique fourni par Jacques
DUVIGNEAUD en 1984 au niveau de la station de tulipes (DE
LANGHE & SLEMBROUCK, 1993) indique clairement un
milieu fortement enrichi en azote où domine une flore
nitrophile avec un recouvrement important de Urtica dioica
(au moins 50 % de la surface) et dans une moindre mesure
de Galium aparine. Ces deux espèces sont rattachées au
groupe de plantes des ourlets sur sol humifère, eutrophe
(surtout riche en azote), neutre et modérément humide
(STIEPERAERE & FRANSEN, 1982), ce qui est aussi le cas de
Tulipa sylvestris. Néanmoins, les conditions globales
actuelles ne sont sans doute pas optimales pour le maintien
de la population de tulipes qui apparaît en déclin. Parmi les
dernières observations (non datées), Henri POHL (comm.
pers., 2020) signale n’avoir aperçu que quelques feuilles et
aucune fleur.
29

En 2021, la plante est toujours présente sur le site, avec une
vingtaine de feuilles observées dès la fin du mois de février.
Par la suite, une unique fleur a été produite (observée en
bouton dès le 4 avril). La station telle qu’elle se présente en
2021 est très réduite à la fois en nombre d’individus et en
surface occupée, avec trois emplacements s’inscrivant dans
à peine 2 m² ; elle se localise au pied d’une ancienne haie
laissée en libre évolution et prend place au sein d’un dense
tapis de lierre ponctué en février de gouets tachetés et de
ficaires. Mis à part diverses plages de perce-neige et
quelques camérisiers, aucune autre plante suspectée
castrale ne fréquente maintenant les abords du site occupé
par la petite population relictuelle de Tulipe sauvage.

3. Le Bois du Goulot (et sa chapelle), Beaumont
(coordonnées IFBL : H4.43.41)
Le Bois du Goulot, situé juste à l’ouest de la ville de
Beaumont (ancienne commune de Leval-Chaudeville),
s’étend sur le flanc nord escarpé de la vallée de la Hantes
et déborde sur les plateaux environnants ; deux vallons
encaissés le traversent du nord au sud. Ce massif forestier
a appartenu durant une longue période aux seigneurs de
Beaumont et est entré dans la maison DE CROŸ en 1453 (DE
RADZITZKY D’OSTROWICK, 2015). C’est en lisière de ce
Bois du Goulot qu’Eugène-Marie-Auguste DE RIQUET,
prince de CARAMAN-CHIMAY édifia la chapelle du Goulot,
entre 1865 et 1870, à l’emplacement d’une ancienne
chapelle (Fig. 5). Ce vaste et luxueux édifice de style néoclassique (briques et calcaire) surmontait une crypte
destinée à recevoir les sarcophages des corps des princes de
CARAMAN-CHIMAY (DUCARME, 1959).

Fig. 5. – Chapelle du Goulot à Leval-Chaudeville
au début du 20e s. (Source : A. MERTENS et BIENAIMÉ, imp.
Beaumont).

Les premières mentions de l’espèce dans le Bois du Goulot
indiquent qu’elle est connue à cet endroit depuis fort
longtemps, et signalent également que la plante y est
abondante. Selon A. HARDY (DURAND, 1889), « Elle est
tellement abondante que M. Cavenaile et moi avons pu en
fournir 180 pieds à M. Magnier pour son Exsiccata, sans
crainte d’appauvrir l’habitation. ». La « centurie » en
question, disséminée via le réseau des botanistes de
l’époque et conservée dans les collections d’herbiers de
diverses institutions, porte les références « Flora selecta
exsiccata, publiée par Ch. MAGNIER, n° 1361 » (Fig. 6).

Depuis le départ de Beaumont des CARAMAN-CHIMAY, la
chapelle fut laissée à son délabrement naturel et, hélas,
vandalisée. Devant la dégradation du site, les sépultures
furent transportées au cimetière de Beaumont dans les
années 1950. Peu après 1960, la chapelle ruinée fut
démolie, seule la belle entrée fut démontée et reconstruite
dans la ville de Beaumont (parking du Béguinage).
Aujourd’hui, le site n’est plus qu’un amas de briques et de
pierres, alors que la crypte est toujours intacte mais
fortement souillée. La petite parcelle de terrain et ses ruines
seraient toujours la seule propriété dans la région de la
famille issue des CARAMAN-CHIMAY. La nature a repris ses
droits et la forêt a recolonisé le site. Seul un gros épicéa
toujours présent serait encore un témoin déjà visible sur les
cartes postales anciennes (Fig. 5).
C’est à la fin du 19e siècle qu’apparaissent les premières
traces écrites signalant la présence d’Anemone apennina
dans ce site (DURAND, 1885, 1889 et 1899). La localité
désignée dans la littérature ou sur les étiquettes d’herbier
est quasi toujours « Bois du Goulot » ou « Bois et prairies
aux environs de Beaumont » sans plus de précision ; une
part d’herbier datant de cette époque (Herbier Louis
Magnel s.n., avril 1893, BR - S.P. 1114056) mentionne
toutefois un lieu davantage associé à l’édifice religieux
construit en bordure du bois : « Haie de la Chapelle dans la
prairie de la Bouteillerie », pouvant correspondre à
l’emplacement actuel de la plante.
30

Fig. 6. – Anemone apennina, extrait du Flora selecta
exsiccata de MAGNIER (BR 1114028). (Source : Botanical
Collections, National Botanic Garden, Meise (disponible en
ligne : https://www.botanicalcollections.be/#/en/home).

Ensuite, durant plusieurs décennies, l’Anémone des
Apennins du Bois du Goulot ne fait plus guère l’objet de
mentions écrites sauf dans les années 1950-1960, avec
quelques parts d’herbier et articles (MONOYER, 1957).
HAVRENNE (1993) indique toutefois que la plante a été
observée par G. DEBOUNY avant 1940 dans les environs de

la Chapelle du Goulot. Une part d’herbier récoltée par S.
DEPASSE en 1966 (BR S.P. 984358) indique assez
curieusement un autre emplacement, plus éloigné de la
chapelle mais toutefois situé en lisière sud du Bois du
Goulot : le chemin des Croisettes (correspondant
vraisemblablement à l’actuelle rue de la Croisette), à moins
qu’il ne s’agisse d’une dénomination erronée de la rue où
se trouve la population connue actuellement. L’Anémone
des Apennins semble ensuite avoir « disparu des radars »
jusqu’en avril 1992 lorsque fut décrite avec beaucoup de
précision la petite population (d’une trentaine de pieds à
l’époque) qui persiste toujours de nos jours (HAVRENNE,
1993). Dans la foulée de cette publication, l’un de nous
(JML) a ensuite suivi (et photographié) assez régulièrement
la station. La dernière mention du taxon à cet endroit date
apparemment d’avril 2011 lors d’une excursion de l’A.E.F.
(SAINTENOY-SIMON, 2012).
La station d’Anemone apennina, telle qu’elle se présente
ces dernières années (2020 et 2021), est de superficie très
réduite : deux plages distinctes inscrites dans un rectangle
de 2 x 0,7 m, avec une petite vingtaine de fleurs produites
annuellement (Fig. 7). Cette station se localise dans la
partie supérieure d’un talus pentu exposé au sud-est,
bordant la rue de la Bouteillerie reliant Leval-Chaudeville
à la chaussée de Mons (N40), non loin des vestiges de la
Chapelle du Goulot et un peu à l’écart du Bois du Goulot
proprement dit. Coiffant ce talus, une haute haie marque la
limite avec une prairie pâturée, elle se compose
essentiellement de Prunus spinosa, Rosa arvensis et
Sambucus nigra.

Cruciata laevipes, Dactylis glomerata, Dianthus armeria,
Geum urbanum, Hypericum perforatum, Lactuca serriola,
Lamium purpureum, Lapsana communis, Plantago
lanceolata, Poa nemoralis, Poa pratensis, Rubus sp.,
Senecio vulgaris, Sonchus asper, Stellaria holostea, S.
media, Veronica arvensis, V. hederifolia, V. persica, Vicia
segetalis, Vinca minor. Bryonia dioica, la bryone dioïque,
est présente dans la haie en face de la chapelle ; cette espèce
est peu fréquente dans l’Entre-Sambre-et-Meuse. Côtoyant
Anemone apennina, se trouve donc un cortège de plantes
des sols plutôt eutrophes, neutres à un peu basiphiles, avec
l’intrusion de quelques espèces tolérant des substrats
temporairement plus secs comme Hypericum perforatum et
Dianthus armeria.
Chez l’Anémone des Apennins, la période de végétation est
brève. Aux abords du Bois du Goulot, les boutons floraux
apparaissent au début du mois de mars, avec une floraison
de courte durée, se déroulant selon les années de fin mars à
la première quinzaine d’avril. La petite population du Bois
du Goulot ne semble pas former de graines viables ; de
petits akènes sont bien produits mais ils sont vides. Situé en
bordure de voirie, le talus abritant Anemone apennina est
régulièrement entretenu ; en 2014, il a été en partie
reconfiguré avec un impact négatif sur une partie de la
population d’anémones. La première fauche annuelle
(mécanique), pratiquée en mai-juin, n’est pas
dommageable ; elle concerne seulement le bas du talus et
s’effectue généralement après ou lors du flétrissement des
organes aériens de la plante.
Les alentours de la Chapelle du Goulot abritent également
quelques autres plantes castrales comme Arum italicum,
Hyacinthoides hispanica, Ribes alpinum et Staphylea
pinnata (SAINTENOY-SIMON, 2012) ; Staphylea pinnata a
été revue en 2020. S’y ajoute la Perce-neige observée en
mars 2020 et février 2021. Jadis, la Tulipe sauvage fut
également un élément de la flore introduite au Bois du
Goulot (HARDY, 1913), un échantillon d’herbier y fait
d’ailleurs référence (Herbier L. Guelton s.n., juin 1887, BR
- S.P. 1220941) ; mais, par la suite, il ne semble pas y avoir
eu d’autres mentions de ce taxon à cet endroit.
4. L’Allée du Prince, Chimay
(coordonnées IFBL : J4.54.22)4

Fig. 7. – Anemone apennina, aux environs de la Chapelle
du Goulot, 26 mars 2021. (Photo : J.-M. LECRON).

La flore vasculaire observée sur ce talus à proximité
immédiate de la station d’Anémone des Apennins est assez
riche et diversifiée ; elle comprend les taxons suivants :
Achillea millefolium, Alliaria petiolata, Allium vineale,
Bromus sterilis, Arabidopsis thaliana, Arrhenatherum
elatius, Artemisia vulgaris, Arum maculatum, Cardamine
hirsuta, Cerastium glomeratum, Chaerophyllum temulum,
Clematis vitalba, Clinopodium vulgare, Crepis capillaris,

Le château de Chimay est une très ancienne demeure.
L’origine d’une place forte est attestée dès 1119. C’est au
cours du 16e siècle qu’un grand château fut édifié par
Philippe III DE CROŸ. Non loin de ce château existait le
« Jardin du Prince », destiné aux besoins de la demeure. Ce
vaste endroit clos, d’une superficie dépassant les 10 ha et
bordé d’une drève de tilleuls, comprenait un grand verger
(mille pommiers et poiriers, cent cerisiers et pruniers, une
houblonnière et un vignoble), un jardin de cuisine et
d’agrément, et des jardins à fleurs et herbes aromatiques
(Fig. 8). Si le jardin du Prince n’existe plus, en partie
devenu un terrain de camping et une voie ferrée

Il s’agit bien de la maille J4.54.22 et non de la maille J4.55.11
comme indiqué dans diverses publications (GALOUX et al., 1986 ;
DE LANGHE & SLEMBROUCK, 1993).
4

31

(désaffectée et intégrée au RAVeL), un ancien chemin
persiste encore, l’actuelle « Allée du Prince » ; il est
maintenant bordé par des jardins privés au sud et par des
logements au nord. Ce chemin est planté de vénérables
tilleuls (Tilia ×europaea) taillés en têtard haute tige et entre
lesquels prospère une splendide population de Tulipa
sylvestris, bien à l’abri sous ses majestueux voisins. Cette
allée de tilleuls est inscrite dans la liste des arbres et haies
remarquables de Wallonie5.
Bien que très vraisemblablement présente ici depuis le
début du 17e siècle, la Tulipe sauvage n’avait pas fait l’objet
de signalements dans la littérature spécialisée avant mai
1979 (GALOUX et al., 1986). Cette plante croît au pied des
tilleuls bordant l’Allée des Princes, vers le terrain de
camping de la ville (H. POHL in GALOUX et al., 1986).
Régulièrement observée par la suite, cette population
semble être plus ou moins florifère selon les années. En
2010, au moins une centaine de hampes florales furent
observées par l’un d’entre nous (JML) (Fig. 9).

quelques m², souvent installées au pied des tilleuls et
débordant un peu dans les jardins adjacents. La Tulipe
sauvage est également installée plus ponctuellement au sein
de l’alignement nord, sur un linéaire d’environ 50 m. Parmi
les autres plantes herbacées croissant au sein des colonies
de tulipes sauvages figurent surtout Ficaria verna subsp.
verna et Ranunculus auricomus, et dans une moindre
mesure Anthriscus sylvestris, Arum maculatum, diverses
graminées, Geum urbanum, Glechoma hederacea,
Ranunculus repens, Taraxacum sp., Urtica dioica,
Veronica chamaedrys, V. hederifolia, Vicia sepium, etc.

Fig. 9. – Tulipa sylvestris dans l’Allée du Prince à Chimay
(alignement sud), 1er mai 2010. (Photo : J.-M. LECRON).

L’Allée du Prince est un lieu relativement fréquenté, proche
du centre de la ville. Vu l’attrait de la floraison juste en bord
de route, la Tulipe sauvage a souvent fait les frais d’une
cueillette sans retenue, bien qu’illicite, voire
d’un prélèvement de pieds complets, bulbes y compris.

Fig. 8. – Le Jardin du Prince à Chimay, à la fin du 16e s.
Extrait des Albums de Croÿ (BUCHIN et al., 1988).

Face à ce constat, lors de la mise en place du PCDN (Plan
Communal de Développement de la Nature) de Chimay en
2002, l’un de nous (MR), membre du Groupe Patrimoine
Botanique, participa aux actions en faveur de la sauvegarde
des tulipes : sensibilisation des riverains, préservation du
site lors de la foire commerciale, pose d’affichettes
informatives sur les troncs de certains tilleuls formant
l’allée (Fig. 10).

En 2015, la station a compté jusqu’à 76 fleurs (H. POHL,
comm. pers., 2020). En 2020, une estimation de près de 500
fleurs fut réalisée par l’un d’entre nous (MR). En 2021, les
feuilles se sont montrées dès la mi-février, bien apparentes
à cette époque dans la végétation environnante encore peu
développée ; quant à la floraison, elle fut particulièrement
étalée dans le temps, avec un total de 220 fleurs (ou jeunes
capsules) comptabilisées le 9 mai.
Dans cette double allée de vieux tilleuls, la Tulipe sauvage
est surtout présente dans l’alignement sud, en bordure de
voirie sur une bande large de plus ou moins 3 m et s’étalant
sur un linéaire de 160 m. Dans sa partie centrale, le
peuplement est presque continu sur environ 65 m, et s’y
ajoutent de part et d’autre des plages plus isolées de
5

Sous la référence n° INS : 56016, n° du site : 18, officialisation :
07/07/1995.

32

Fig. 10. – Affichette disposée sur les tilleuls de l’Allée du
Prince à Chimay, 1er mai 2010. (Photo : J.-M. LECRON).

La fauche des bordures de l’Allée du Prince est loin d’être
optimale. Les stations de tulipes sauvages de l’alignement
nord sont soumises à une tonte rase et répétée débutant dès
le mois de mars et empêchant dès lors la floraison. Les
stations de l’alignement sud sont davantage préservées
mais la fauche entre les tilleuls et la coupe des rejets ligneux
sont pratiquées juste après la floraison (opérations
effectuées vers la mi-mai en 2021), trop précocement pour
permettre une montée en graines et éventuellement une
dissémination ultérieure. Ces opérations de fauche ne
devraient pas débuter avant la mi-juillet, comme pratiqué
en de nombreux endroits. Située en pleine zone affectée à
l’habitat urbain, la partie de l’alignement sud risque aussi à
l’avenir d’être impactées par la possible construction
d’habitations en place des actuels jardins privatifs.

d’une allée de tilleuls donnant accès au domaine depuis la
route N939 reliant Chimay à Virelles ; cet emplacement qui
se trouve dans la maille IFBL voisine (J4.45.34, ancienne
commune de Virelles) semble n’avoir jamais été mentionné
dans la littérature. Comme celle de l’Allée du Prince, cette
drève de tilleuls est inscrite dans la liste des arbres et haies
remarquables de Wallonie6. La Tulipe sauvage y occupe
essentiellement une aire couvrant plus ou moins 7 x 7 m
qui déborde dans la prairie pâturée voisine (Fig. 11). En
avril 2021, malgré un piétinement de la station dû à
l’élagage des tilleuls, 14 hampes florales ont été dénombrées.

5. Le Parc du Prince (et ses abords), Chimay
(coordonnées IFBL : J4.45.33 et J4.45.34)
Le Parc du Prince est un vaste domaine privé (non
accessible au public) situé de part et d’autre de la vallée de
l’Eau Blanche au nord du château et de la ville de Chimay.
Cet ensemble de plus de 100 ha est essentiellement forestier
(versants et plateaux) mais comprend également des
prairies dans les fonds de vallée qui furent anciennement
enrésinés. Le domaine est ceinturé par un solide mur de
moellons calcaires long de plusieurs kilomètres et resté en
majeure partie intact de nos jours. Ce grand parc fut créé
par Charles DE CROŸ vers 1598 et englobait à l’époque le
« Jardin Monseigneur » (DUVIGNEAUD & MATHOT, 1994).
Parmi les aménagements réalisés, on recense une grande
clairière circulaire dite « le rond de danse » et diverses
allées rectilignes dont certaines offrent de belles
perspectives vers le château et la collégiale de Chimay. En
fond de vallée, une allée plus sinueuse circule en rive
gauche de la rivière et relie deux des principaux accès au
domaine.
Vraisemblablement introduite dans ce parc boisé il y a bien
longtemps, la Tulipe sauvage s’y est naturalisée et
maintenue jusqu’à nos jours. Une colonie assez compacte
d’environ 4 m2 et située le long de l’Eau Blanche sur une
banquette colluviale à cailloux calcaires, a été observée en
mai 1985, avec plus d’une douzaine de plantes
fleuries (GALOUX et al., 1986). L’espèce a par ailleurs été
signalée en quatre points distincts en bordure de l’allée
traversant le parc (DUVIGNEAUD & MATHOT, 1994).
En 2021, la Tulipe sauvage est toujours bien présente dans
le Parc du Prince ; elle a été observée en six emplacements
distincts distribués le long de l’allée principale du domaine,
sur un linéaire d’environ 300 m. Ces stations, toutes
inscrites dans la maille IFBL J4.45.33, sont de taille
variable (de 1 à 30 m2) et prennent place en sous-bois sur
substrat calcaire, parfois en habitat rudéralisé. Les 17 et 18
avril, 93 hampes florales ont été comptabilisées.
Il existe, par ailleurs, une autre station de tulipes sauvages
aux abords du parc (extra-muros), plus précisément le long

Fig. 11. – Tulipa sylvestris, abords du Parc du Prince à
Virelles, 18 avril 2021. (Photo : M. Rouard).

CONCLUSIONS
Introduites il y a bien longtemps dans les anciens domaines
du duc DE CROŸ situés dans la Botte du Hainaut,
l’Anémone des Apennins et la Tulipe sauvage s’y sont
naturalisées et maintenues jusqu’à nos jours avec plus ou
moins de succès.
L’Anémone des Apennins n’est apparemment plus présente
qu’en un seul endroit (environs de la Chapelle du Goulot à
Beaumont, maille IFBL H4.43.41) où elle se trouve en
situation précaire (très petite population installée sur un
talus en bord de route). Elle est manifestement en déclin
depuis sa première mention à cet endroit en 1883 :
abondante jadis, 30 fleurs notées dans les années 1990, et
moins de 20 fleurs ces dernières années (2020 et 2021).
Avec des effectifs en décroissance continue, sa disparition
pourrait s’avérer inéluctable à plus ou moins brève
échéance.
Avec plusieurs stations où la plante est encore relativement
abondante, la Tulipe sauvage est, par contre, en situation
nettement moins problématique et n’est globalement pas
menacée. À Beaumont, les populations du Parc de
Paridaens se maintiennent, et celles situées dans la grande
pelouse semblent s’accommoder de la tonte pratiquée en
ces lieux, même si c’est au détriment d’une floraison quasi
inexistante. La petite population localisée à l’extérieur des

6

Sous la référence n° INS : 56016, n° du site : 11, officialisation :
07/07/1995.
33

remparts de la ville perdure également mais, à l’instar de
l’Anémone des Apennins des environs de la Chapelle du
Goulot, elle montre un déclin marqué : 50 m 2 en 1961 et
seulement quelques pieds dans à peine 2 m2 en 2021. Cette
population relictuelle s’avère également tributaire de
possibles dégâts lors de travaux d’entretien, par exemple le
dépôt de résidus de coupe de bois.
À Chimay, la station de l’Allée du Prince, remarquable
vestige de l’ancien « Jardin du Prince », semble prospérer
en bénéficiant notamment de certaines mesures de
protection édictées dans le cadre de l’ancien PCDN de
Chimay ; ces mesures pourraient toutefois être renforcées
afin de permettre la maturation et la déhiscence des
capsules susceptibles de disséminer l’espèce (sous réserve
de la viabilité des graines produites). Cette Allée du Prince
s’avère être l’endroit le plus approprié pour observer la
Tulipe sauvage dans la Botte du Hainaut (accès libre en
bord de route et présence d’une population assez dense et
florifère au pied de vieux tilleuls). L’espèce se maintient
également dans le Parc du Prince et ses abords où elle a été
notée en 2021 en sept emplacements tous relativement
florifères (Fig. 12). Comme le Parc de Paridaens, ce site et
ses abords est une propriété privée, ce qui préserve entre
autres les tulipes d’une cueillette intempestive.
Ces différentes populations beaumontoise et chimacienne
de la Tulipe sauvage prennent place dans quatre mailles
IFBL : H4.43.43 (Beaumont), J4.45.33 (Parc du Prince),
J4.45.34 (abords du Parc du Prince) et J4.54.22 (Allée du
Prince).

REMERCIEMENTS
Cet article n’aurait pu se concrétiser sans l’aide fournie par
de nombreuses personnes, contactées expressément ou
rencontrées par hasard lors de nos nombreuses prospections
à la recherche des stations de ces deux plantes. Nous tenons
tout particulièrement à remercier Monsieur le prince
Philippe DE CHIMAY et Madame la princesse pour nous
avoir autorisé l’accès au domaine du Parc du Prince, ainsi
que Anne DEROOVER (administratrice de l’asbl Le Château
de Chimay) pour son aide précieuse et sa disponibilité.
Nous remercions également Isabelle CHAMPENOIS,
Sébastien LACROIX et Didier FRIPPIAT (Institut Paridaens à
Beaumont) pour le bon accueil et l’accès au Parc de
Paridaens.
Nos remerciements s’adressent aussi à Philippe
ALBESSART et Christiane TRIGAUX pour la transmission de
divers documents, à Christian LEJEUNE pour la relecture du
texte concernant les aspects historiques de Beaumont, à
Marianne MABILLE et Geoffrey CHAPELLE qui ont examiné
attentivement le résumé en anglais, à Marc METENS qui
nous a indiqué la station inédite de tulipes sauvages de
Virelles, à Henri POHL pour nos échanges concernant les
stations du Parc des Roquettes à Beaumont et de l’Allée du
Prince à Chimay, à Monsieur THOMAS pour l’accès à sa
propriété des bords de l’Eau Blanche, à Andries
VERCRUYSSE qui nous a accompagnés et indiqué les
stations de tulipes sauvages du Parc du Prince et enfin à
Filip VERLOOVE pour nos échanges concernant le statut
d’Anemone blanda en Belgique.

Fig. 12. – Tulipa sylvestris dans le Parc du Prince à Chimay, 17 avril 2021. (Photo : M. ROUARD).

34

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Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 37-60

Les sphaignes et autres Bryophytes remarquables de la Forêt Domaniale
de Rance et ses abords (province de Hainaut, Belgique)
Jean-Michel LECRON*

RÉSUMÉ
La Forêt Domaniale de Rance et ses abords (province de Hainaut, Belgique) ont fait l’objet d’un inventaire de la bryoflore. La liste
établie comporte près de 200 espèces d’hépatiques et de mousses (dont plusieurs espèces de sphaignes). Les plus remarquables d’entreelles sont brièvement commentées et leur distribution dans le site est cartographiée. Quelques propositions de gestion sont énoncées en
vue d’assurer sur le long terme le maintien de cette bryoflore diversifiée et de ses composantes les plus remarquables.
ABSTRACT

Sphagnum species and other remarkable bryophytes of the Rance domanial forest and its surroundings (province
of Hainaut, Belgium). The Rance domanial forest and its surroundings (province of Hainaut, Belgium) were the subject of a
bryological inventory. The established list includes nearly 200 species of liverworts and mosses of which several Sphagnum species.
The most remarkable of them are briefly commented on and their distribution on the location is mapped. A few management
recommendations are set out in order to ensure the long-term conservation of this diversified bryoflora and its most remarkable elements.

* Rue Lutiau 42, B-6500 Beaumont. Courriel : jmlecron@msn.com

____________________________________________________________

INTRODUCTION
Les sphaignes constituent, au sein des bryophytes, un
groupe d’organismes bien distinct, cumulant de
nombreuses particularités originales tant morphologiques
qu’écologiques. Il est vrai que dans la classification du
vivant, ce « phylum des sphaignes » a précocement divergé
d’autres lignées évolutives ayant abouti à l’essentiel du
groupe des mousses (Bryophyta) (SHAW et al., 2010).
Parmi les singularités d’ordre morphologique, sont à
souligner le réseau cellulaire des feuilles composé de
cellules chlorophylliennes (chlorocystes) alternant avec de
grandes cellules hyalines dépourvues de contenu cellulaire
(hyalocystes), le sommet des tiges formé d’une masse
compacte de rameaux courts (capitulum) et les rameaux
latéraux réunis en faisceaux. Sur le plan écologique, les
sphaignes sont surtout inféodées aux habitats humides à
acidité plus ou moins marquée (il existe toutefois des
sphaignes basiphiles) ; elles sont par ailleurs à l’origine des
tourbières par une lente accumulation de matière organique
pas ou peu décomposée.
Dans le monde, le nombre d’espèces de sphaignes est
estimé de 350 à 500 (SHAW et al., 2010), l’imprécision
témoignant d’une délimitation des taxons non encore
parfaitement comprise et stabilisée. En Belgique, le nombre

d’espèces de sphaignes (genre Sphagnum L.) est de 31
(SOTIAUX et al., 2007 ; SÉNECA & SÖDERSTRÖM, 2009) dont
28 espèces pour la Région flamande (DE BEER, 2017 ; DE
BEER et al., 2019 ; VAN LANDUYT et al., 2020), une espèce
pour la Région de Bruxelles-Capitale (VANDERPOORTEN,
1997 ; SOTIAUX et al., 2007) et 29 espèces pour la Région
wallonne (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015).
En Wallonie, le genre Sphagnum est largement répandu
dans le district phytogéographique ardennais où plusieurs
espèces sont communes à très communes (SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015), il en est de même dans le sud de
l’Entre-Sambre-et-Meuse rattaché au district phytogéographique ardennais (Fig. 1). Ailleurs dans l’Entre-Sambreet-Meuse, comme partout ailleurs en Wallonie en dehors du
district phytogéographique ardennais, les milieux propices
à l’installation des sphaignes sont par contre beaucoup plus
rares et elles sont manquantes dans de nombreux secteurs
du territoire. Seules quelques mailles IFBL de 4×4 km en
abritent plus de quatre espèces (Fig. 1). C’est le cas sur les
substrats siliceux de la Marlagne au sud-est de SartEustache (maille H5.12 avec six espèces) et juste au sud de
Charleroi à Marcinelle (maille H4.17) où quelques espèces
ont été notées dans une zone de combustion dans la partie
sommitale d’un terril (COUVREUR, 2002).
37

Dans ce contexte, la découverte de plusieurs espèces de
sphaignes en Forêt Domaniale de Rance (maille J4.23
située dans l’ouest de l’Entre-Sambre-et-Meuse) a suscité
un certain engouement pour entreprendre un inventaire plus
complet des bryophytes de la Forêt Domaniale et de ses
alentours, avec trois objectifs : réaliser un inventaire des
sphaignes et mieux appréhender leur répartition au sein du
massif forestier, établir une liste la plus exhaustive possible
de l’ensemble des bryophytes du site et construire les cartes
de répartition des espèces les plus remarquables.

de circulation principaux traversent le massif du nord-ouest
au sud-est, la route régionale N53 reliant Beaumont à
Chimay (rectiligne dans la traversée de la forêt), le RAVeL
de la Ligne 109 qui emprunte le tracé plus sinueux de
l’ancienne voie ferrée reliant Mons à Chimay et le «
Chemin de Quinze pieds », route forestière asphaltée assez
étroite qui circule en ligne de crête. Dans la partie ouest du
massif (en forêt domaniale), deux routes greffées sur la
N53 permettent d’accéder au site aménagé du Ri de
Fromont, qui comprend des espaces de jeux et de détente,
plans d’eau, barbecues et aires pour autres activités
récréatives.
Cet inventaire des bryophytes concerne surtout un territoire
sous couvert forestier, mais il englobe aussi quelques
parcelles prairiales intraforestières : deux pâtures au lieudit Blagnies (ancienne commune de Sautin), des pelouses
régulièrement entretenues au niveau de l’aire d’accueil du
Ri de Fromont et une prairie humide gérée en fauche
tardive, située à proximité de cette aire d’accueil. Diverses
constructions et autres petits ouvrages de maçonnerie sont
disséminés un peu partout dans le site (quelques habitations
privées, des pavillons forestiers et de chasse, des
baraquements notamment en bord d’étang, des digues
d’étang, des petits ponts, des constructions récentes au
niveau du site d’accueil, un monument en pierres, une
chapelle/sépulture, deux pylônes de télécommunication,
etc.). Jadis (au moins jusqu’au début du 17 e s.), une vaste
zone défrichée (vers le lieu-dit Buissonville) accueillait
une ferme entourée de prés et de terres labourables sur
environ 30 ha (MICHAUX, 1968), mais ce secteur est
maintenant redevenu totalement forestier et aucun vestige
apparent ne semble avoir persisté.

Fig. 1. – Carte de l’Entre-Sambre-et-Meuse indiquant le
nombre d’espèces de sphaignes par maille IFBL de 4×4
km. (D’après SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015).

LA ZONE DE PROSPECTION
Le territoire concerné par cette étude est un vaste massif
forestier assez compact, situé au nord et au nord-ouest de
la commune de Rance, dans la Botte du Hainaut (Fig. 2).
Cet ensemble de 10,39 km2, comprend la Forêt Domaniale
de Rance (plus ou moins 530 ha, environ 51 % du total),
divers bois communaux tels que l’Étogne, le Bois de
Blagnies ou le Bois Planté (plus ou moins 265 ha, environ
26 % du total) et des parcelles forestières privées (plus ou
moins 244 ha, environ 23 % du total). La majeure partie du
massif forestier se situe sur le territoire de la commune de
Sivry-Rance (anciennes communes de Rance, de Sautin et
de Solre-Saint-Géry1), la partie nord est rattachée à la
commune de Beaumont (ancienne commune de Renlies),
et une petite zone en bordure orientale du massif fait partie
du territoire de la commune de Froidchapelle. Trois axes

Le périmètre du site d’étude atteint 26,15 km et comprend
surtout des lisières forestières tournées vers des espaces
ouverts (24,75 km) et aussi quelques portions de limites
moins nettes (scindant une continuité forestière) pour
environ 1,40 km (surtout dans le coin sud-ouest de la
dition).

Il s’agit d’une petite partie du territoire de Solre-Saint-Géry
cédée pour former la nouvelle commune de Sivry-Rance ; le reste

du territoire de Solre-Saint-Géry fait partie de la nouvelle
commune de Beaumont.

1

38

Fig. 2. – La Forêt Domaniale de Rance et ses abords,
périmètre du site d’étude (dition).

Une ligne de crête principale (orientée nord-ouest / sud-est)
divise le massif en deux parties sensiblement de même
superficie. Au nord-est, les cours d’eau alimentent la
Hantes, affluent de la Sambre, via deux ruisseaux
principaux, le Ruisseau des Fonds et le Ruisseau de
l’Étogne. Au sud-ouest, les cours d’eau alimentent l’Eau
d’Heppe, affluent de l’Helpe Majeure qui se jette dans la
Sambre, avec également deux ruisseaux principaux, le Ri
de Fromont et le Ruisseau du Coq Bois (ou Ruisseau du
Moulin).
La majorité de ces cours d’eau prennent leur source au sein
du massif forestier ; les eaux de surface sont dès lors de
bonne qualité biologique à l’exception d’un ruisseau
circulant en bordure nord-ouest du massif qui reçoit un
apport important d’eaux usées (près du pylône de Sautin).
Certains cours d’eau circulant dans le massif montrent un
régime alternatif, c’est le cas du Ri de Fromont qui passe
généralement en assec complet lors de la période estivale
(ce fut le cas pendant plusieurs semaines en 2020).

À proximité des hauteurs de Sautin, quelques dépôts de
sédiments cénozoïques sableux ou sablo-argileux (SBL)
recouvrent cette assise mais ils sont de faible étendue (Fig.
3). Quant aux limons éoliens, ils sont d’épaisseur variable,
souvent faible ; ils prennent toutefois nettement plus
d’ampleur dans le coin nord-ouest de la dition.
À la faveur des plissements, la formation de la Famenne
apparait dans quatre anticlinaux orientés ouest-nord-ouest /
est-sud-est. Cette formation prend plus d’extension dans la
moitié sud de la dition ; mais les formations d’Aye et
d’Esneux constituent le soubassement prépondérant du site.
Étant donné la nature des roches de la formation de la
Famenne, son affleurement correspond à des zones en
creux au relief doux. La Forêt Domaniale de Rance et ses
abords reposent donc sur un substrat géologique peu
diversifié, peu ou non calcaire et globalement acide.
Soulignons, qu’à moins d’un kilomètre des limites de ce
territoire, à la fois au nord et au sud, des terrains de nature
beaucoup plus calcaire sont présents (anticlinaux frasniens
de Renlies et de Rance).

De nombreux étangs et chapelets d’étangs ont été
construits sur les différents cours d’eau du massif forestier,
les plus importants étant situés sur le Ruisseau des Fonds,
sur le Ruisseau de Croisette (affluent du Ruisseau de
l’Étogne) et sur le Ri de Fromont. Des vestiges de petites
et grandes retenues d’eau sont aussi présents à divers
endroits. En périphérie du massif (dans le coin sud-ouest),
le grand étang du Château Doyen n’a pas été intégré au site
d’étude.
On peut aussi noter la présence de quelques mares
forestières dont certaines sont de création récente, c’est le
cas en forêt domaniale. L’altitude maximale du massif
dépasse un peu les 270 m au lieu-dit La Boëtte (en lisière
est) et à proximité du village de Sautin (en lisière ouest) sur
la ligne de partage des eaux entre la Hantes et l’Eau
d’Eppe. L’altitude minimale est de 205 m à la sortie du
Ruisseau de l’Étogne. Le relief qui est assez doux le long
de la ligne de crête s’accentue nettement en bordure nord
et dans le coin sud-ouest de la dition où s’observent des
flancs de vallée pentus sur substrat gréseux.
L’ensemble du massif repose sur des formations
géologiques de l’étage du Famennien (MARION &
BARCHY, 2004) :

 la formation de la Famenne (FAM) constituée
essentiellement de schistes (shales), (MARION &
BARCHY, 2004). Dans le bas de la formation (sans doute
uniquement présent dans le coin sud-est de la dition) de
minces bancs de roches plus calcaires interstratifient les
schistes
 les formations d’Aye et d’Esneux (AE), à lithologie
plus variée, se caractérisent par les roches suivantes :
grès, grès micacés, siltites, schistes (shales) et présence
de nodules ou lentilles de calcaire.

Fig. 3. – La Forêt Domaniale de Rance et ses abords, carte
géologique. (D’après MARION & BARCHY, 2004).

Vu la nature des principales roches et le faible impact des
petits cours d’eau sur le relief, les affleurements rocheux
sont rares et peu étendus. Ils apparaissent ponctuellement
dans les flancs de vallées escarpées (surtout dans la partie
nord du site), dans le lit des ruisseaux, au niveau
d’anciennes petites carrières et en bordure de routes
forestières circulant en bas de versant.
Selon la carte bioclimatique de Wallonie (VAN DER PERRE
et al., 2015), le site d’étude s’inscrit dans la partie nord du
territoire dénommé : Fagne, Famenne et Calestienne. À
l’échelle plus locale de l’Entre-Sambre-et-Meuse, la Forêt
Domaniale de Rance et ses abords se situent en Fagne
gréso-schisteuse (subdivision de la Fagne de l’EntreSambre-et-Meuse) et constituent un bel élément représentatif de ce terroir caractérisé par une extension peu
développée du Famennien inférieur (formation de la
Famenne) par rapport aux autres formations du Famennien,
et se présentant comme un vaste plateau garni de quelques
dépressions perchées et entaillé de vallées assez encaissées
(LECRON, 2006) (Fig. 4).

39

Fig. 4. – Forêt Domaniale de Rance et ses abords (lisière sud et ligne de crête principale à l’horizon),
depuis le Bois du Vicaire à Rance, en novembre 2020.

Par rapport au Condroz situé juste au nord et ses paysages
plus ouverts, ce site se positionne sur une élévation
topographique assez nette et fait partie de la première ligne
de massifs forestiers de plus ou moins grande dimension
couvrant la Fagne de l’Entre-Sambre-et-Meuse et
s’étendant ensuite au massif ardennais par-delà la
Calestienne. Dans ce contexte, certaines espèces boréotempérées, largement distribuées en Ardenne, atteignent ici
leur limite d’aire.
Les peuplements forestiers sont surtout constitués
d’essences feuillues mais une part non négligeable est
affectée aux plantations de résineux, surtout en parcelles
privées. C’est le domaine de la chênaie-charmaie
notamment la chênaie-charmaie à stellaire holostée
(Stellario holosteae – Carpinetum betuli) ou des variantes
plus acidiphiles. Dans le nord-ouest de la dition, la
présence plus importante de limons lœssiques permet
l’expression de la chênaie à jacinthe des bois (Fig. 5),
indiquant une influence atlantique encore marquée.

en érable champêtre) révèle un milieu moins acide sans
doute lié à la présence de calcaire dans le sous-sol. Quant
aux fonds de vallée étroits non dégradés par des
plantations, ils abritent généralement une aulnaie-chênaie.
Dans le courant du 20e s., le massif forestier a connu
quelques déboires notables. Lors de la guerre 1914-18, les
troupes d’occupation allemande ont exploité à outrance les
ressources forestières afin d’alimenter une scierie installée
à côté de la gare de Rance, provoquant la disparition
presque complète de la vieille futaie séculaire. Dans les
années 1960-70, un important défrichement eut lieu du côté
du lieu-dit Vivier Collin en vue de créer un parcours de golf
(M. ROUARD, comm. pers. 2019). L’orthophotographie du
site en 1971 montre en effet de nombreux secteurs déboisés
en forme de lanière allongée, prémices des futurs fairways.
Ce projet de parcours de golf n’a cependant pas abouti et
le secteur concerné fait maintenant partie intégrante de la
Forêt Domaniale de Rance.

MAILLAGE CARTOGRAPHIQUE ET
PROSPECTION

Fig. 5. – Plantation de hêtres dans la chênaie à jacinthe des
bois, au Bois de Blagnies, en avril 2020.

Dans la partie orientale du massif, au niveau de certains
plateaux, des surfaces assez étendues sont occupées par
une forme appauvrie de la hêtraie à luzule blanche,
annonçant une certaine tonalité continentale-submontagnarde. À proximité de la lisière sud de la forêt, un
lambeau de chênaie-charmaie à mercuriale vivace (et riche
40

Le système de coordonnées IFBL (Institut Floristique
Belgo-Luxembourgeois) a été utilisé pour la cartographie.
Le site d’étude s’étend sur quatre mailles de 4×4 km : J4.13,
J4.14, J4.23 et J4.24. Les mailles de 1 km de côté ont été
retenues pour la restitution des cartes de distribution ; vingtdeux mailles sont concernées mais seulement dix sont
occupées pour plus de la moitié par la « Forêt Domaniale
de Rance et ses abords » (Fig. 6) ; il n’y a par ailleurs que
deux mailles complètement à l’intérieur du site d’étude :
J4.13.44 et J4.23.22. Les prospections et collectes de
matériel se sont étalées sur plusieurs décennies ; les toutes
premières récoltes furent effectuées en 1993 et 1996.
Sporadiques au début, ces inventaires sont devenus plus
réguliers et intensifs à partir de 2015 (surtout en 2019 et en
2020). Afin d’identifier correctement les sphaignes et
autres bryophytes, de multiples échantillons ont été récoltés
pour être ensuite examinés à l’aide du microscope. De
nombreux milieux ont été prospectés, pas seulement ceux
de nature purement forestière mais aussi des habitats «
annexes » comme les bords de route, les murets de petites
constructions et autres habitats anthropisés.

NOMENCLATURE ET STATUTS DE RARETÉ
ET DE MENACE DES TAXONS
La nomenclature des taxons et l’appartenance familiale de
ceux-ci reposent sur l’ An annotated checklist of
bryophytes of Europe, Macaronesia and Cyprus
(HODGETTS et al., 2020). Dans certains cas, la synonymie
est indiquée afin de relier les noms retenus à une
terminologie plus usuelle.
Les statuts de rareté et de menace des taxons sont extraits
de SOTIAUX & VANDERPOORTEN (2015) pour la région
wallonne, de DE BEER & VAN LANDUYT (2019) pour la
région flamande et de HODGETTS et al. (2019) pour
l’Europe. Les abréviations utilisées dans les tableaux de
menace et de rareté des sphaignes et autres bryophytes
remarquables faisant l’objet d’un commentaire
correspondent à : LC = least concern (préoccupation
mineure), NT = near threatened (quasi menacé), RR = très
rare, R = rare, AR = assez rare, AC = assez commune, C =
commune, CC = très commune.

Forêt Domaniale de Rance et ses abords affichent un score
élevé d’autant plus que ce territoire représente moins de 16
km2, soit moins d’une maille de l’Atlas IFBL. Cette
richesse spécifique dépassant la moyenne régionale est liée
d’une part à une pression d’inventaire accrue (dont de
nombreuses prospections ciblées) et d’autre part à une
certaine diversité des milieux malgré l’homogénéité
apparente du couvert végétal et du sous-sol globalement
acide qui repose exclusivement sur l’étage du Famennien.
La présence de petits ouvrages de maçonnerie, de
nombreuses voies de communication (route régionale aux
chemins d’exploitation forestière) et d’infrastructures
d’accueil du public bénéficiant d’une gestion particulière
(site du Ri de Fromont) a aussi contribué à créer de
nombreux habitats nouveaux susceptibles d’accueillir une
bryoflore inattendue en milieu forestier sur substrat acide.
Parmi ces taxons non liés au strict contexte forestier, on
peut citer de nombreuses espèces saxicoles calciphiles
comme Grimmia pulvinata, Orthotrichum anomalum et
Didymodon luridus, observées notamment sur les
chaperons en béton et murets des petits ponts, des espèces
rudérales comme Tortula protobryoides et Bryum
argenteum colonisant la bordure graveleuse de la N53 ou
encore tout un cortège d’espèces calciphiles (Cratoneuron
filicinum, Didymodon ferrugineus, Encalypta streptocarpa,
Thuidium assimile, etc.) amenées avec les gravillons
calcaires utilisés pour empierrer les chemins d’exploitation
forestière.
Cette liste des bryophytes peut être complétée par quelques
taxons non observés durant cette étude mais notés lors des
prospections menées dans le cadre de la réalisation de
l’Atlas des Bryophytes de Wallonie (SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015 ; comm. pers. 2020). Cette liste
complémentaire figure dans l’annexe 2.

Fig. 6. – La Forêt Domaniale de Rance et ses abords,
assemblage et dénomination des mailles IFBL de 1×1 km.

RÉSULTATS
Au terme des prospections sur le site d’étude, 196 espèces
de bryophytes ont été observées et identifiées, comprenant
36 espèces d’hépatiques (Marchantiophyta) et 160 espèces
de mousses et sphaignes (Bryophyta). La liste globale des
espèces recensées figure en annexe (Annexe 1). Chaque
taxon de cette liste a fait l’objet d’au moins une récolte qui
est conservée en part d’herbier. Au total, plus de 600
échantillons ont ainsi été rassemblés et intégrés dans
l’herbier personnel de l’auteur.
Dans la région Fagne-Famenne-Calestienne, la richesse
spécifique moyenne par maille IFBL de 4×4 km est de
l’ordre de 146, avec des valeurs minimale et maximale de
respectivement 88 et 224 espèces (SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015). Avec presque 200 espèces, la

Parmi l’ensemble des espèces, la proportion des taxons très
communs (CC) ou communs (C) en Wallonie et en région
Fagne-Famenne-Calestienne est élevée, de l’ordre de 65%
(Fig. 7). Presque toutes les espèces considérées comme très
communes en Wallonie ont été observées. La bryoflore du
site, quoique globalement assez banale, compte néanmoins
quelques taxons rares ou très rares (Fig. 7). C’est le cas de
l’hépatique Riccia huebeneriana et de la sphaigne
Sphagnum flexuosum qui sont très rares (RR) en FagneFamenne-Calestienne, la première citée est également très
rare à l’échelle de la Wallonie. Une espèce (Plagiothecium
latebricola) n’était pas signalée en Fagne-FamenneCalestienne dans l’ouvrage de référence, voir le commentaire relatif à ce taxon ci-après.
Par ailleurs, le statut de rareté n’est pas disponible pour 13
espèces distinguées dans l’étude mais groupées avec un
taxon proche dans « Bryophytes de Wallonie » comme
Chiloscyphus polyanthos s.l. (incl. C. pallescens),
Plagiothecium nemorale s.l. (incl. P. succulentum),
Didymodon vinealis s.l. (incl. D. insulanus) ou encore
Tortula subulata s.l. (incl. T. schimperi).

41

Fig. 7. – Histogramme des classes de fréquence en Wallonie et dans la région Fagne-Famenne-Calestienne.
(D’après SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015).

Les Sphaignes
Six espèces de sphaignes ont été recensées et identifiées en
Forêt Domaniale de Rance et ses abords. Elles relèvent de
cinq sections, rang taxonomique intermédiaire entre le
genre et l’espèce, et couramment utilisé en sphagnologie.
Elles rentrent toutes dans les critères retenus pour établir la
liste des bryophytes remarquables du site (voir ci-après),
sauf Sphagnum auriculatum qui est assez commune (AC) à
la fois en Wallonie et en Fagne-Famenne-Calestienne
(SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015) ; c’est également la
moins rare des sphaignes de la dition, elle a été observée
dans toutes les mailles IFBL de 1×1 km où le genre
Sphagnum a été noté. À l’échelle des mailles IFBL de 4×4
km, seule la maille J4.23 abrite l’ensemble des six espèces,
ce qui en fait une des mailles les plus riches en sphaignes
de l’Entre-Sambre-et-Meuse si on exclut les mailles
ardennaises du sud du territoire. Par ailleurs, ce site abrite
les deux tiers des espèces de sphaignes signalées en région
Fagne-Famenne-Calestienne (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015).
Les stations de sphaignes sont surtout réparties dans la
moitié méridionale de la zone étudiée, au sud de la ligne de
crête principale. À quelques exceptions près, elles prennent
toutes place dans une bande de terrain large de 100 à 600 m
s’étirant d’ouest en est (Fig. 8) ; cette aire d’occurrence
coïncide de façon remarquable avec le principal
affleurement de la formation de la Famenne (Fig. 3). Dans
ce secteur caractérisé par un sol essentiellement de nature
argileuse, les sphaignes occupent principalement le lit et les
marges de ruisseaux intermittents, à sec pendant plusieurs
semaines voire plusieurs mois en été. Quatre stations
isolées de faible à très faible étendue viennent compléter la
42

distribution du genre dans ce territoire. La répartition
altitudinale des stations de sphaignes en Forêt Domaniale
de Rance et ses abords s’échelonne de 226 m (J4.23.21) à
263 m (J4.13.43 et J4.24.12). Ces six espèces de sphaignes
font l’objet d’un commentaire et leur répartition sur le site
étudié est cartographiée (Annexe 3).

Fig. 8. – Aire d’occurrence du genre Sphagnum en Forêt
Domaniale de Rance et ses abords.

Sphagnum auriculatum SCHIMP.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
AC
non menacée

Sphagnum auriculatum, qui appartient à la section
Subsecunda, est une sphaigne très polymorphe de teinte

verte à ocre (Fig. 9). Par le passé, de nombreux infrataxons
ont été décrits, mais ils n’ont que peu de valeur taxonomique
car ils correspondent à des accommodats plus ou moins
aquatiques. L’identification des espèces de sphaignes
nécessite un examen microscopique du matériel. Sur le
terrain, il est cependant souvent possible d’obtenir une
bonne identification présomptive en se basant sur certaines
particularités.

mousses qui se développent au pied d’aulnes glutineux
dans une mare intra-forestière et le long d’un petit ruisseau
intermittent.

Fig. 10. – Sphagnum fimbriatum, en décembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.13.43).

Sphagnum flexuosum DOZY & MOLK.
Fig. 9. – Sphagnum auriculatum, en avril 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.23.22).

Dans le cas de S. auriculatum, les rameaux courbés qui
prennent l’aspect de corne de vache et l’écologie peuvent
faciliter sa reconnaissance in situ. Il s’agit d’une espèce
hygrophile à large amplitude écologique. C’est de loin la
sphaigne la plus fréquente dans le territoire étudié ; elle a
été observée dans six mailles (Annexe 3), dans le lit et en
berge de ruisseaux, en bordure de mare, dans des fossés et
au creux d’ornières dans des chemins d’exploitation
forestière. En Forêt Domaniale de Rance et ses abords,
lorsqu’elle se trouve en compagnie d’autres espèces de
sphaignes appartenant à d’autres sections, elle se situe
toujours à un niveau topographique inférieur, baignant
généralement dans l’eau (en périodes humides).

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
RR
non menacée

Sphagnum flexuosum (Fig. 11) appartient à la section
Cuspidata qui se caractérise entre autres par des feuilles
raméales à chlorocystes nettement exposés en face
convexe. L’examen des feuilles caulinaires est nécessaire
pour confirmer son identification, notamment pour la
distinguer de deux espèces proches (S. fallax et S.
angustifolium).

Sphagnum fimbriatum WILSON
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
AR
non menacée

Sphagnum fimbriatum appartient à la section Acutifolia qui
regroupe des sphaignes plus ou moins teintées de rouge à
l’exception de quelques-unes, et c’est le cas de S.
fimbriatum qui est entièrement verdâtre (Fig. 10). Cette
sphaigne assez gracile se singularise par ses tiges se
terminant par un « bourgeon blanchâtre » assez saillant
(bien visible à l’état sec dans le haut du capitulum) et ses
feuilles caulinaires érodées-frangées au sommet et sur les
côtés. Il s’agit d’une espèce plutôt sciaphile, inféodée aux
dépressions humides surtout en saulaies ou en boulaies ;
elle se trouve également en marge de tourbières. S.
fimbriatum n’a été observée qu’en deux endroits (Annexe
3) et chaque fois en effectif réduit, dans des buttes de

Fig. 11. – Sphagnum flexuosum, en novembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.24.11).

Il s’agit d’une espèce plutôt mésotrophe généralement
rencontrée en habitats forestiers mais également en prairies
paratourbeuses. Des six espèces de sphaignes recensées
dans la zone d’étude, c’est la moins fréquente en FagneFamenne-Calestienne (SOTIAUX & VANDERPOORTEN,
43

2015). Cette espèce n’a fait l’objet que de quelques rares
observations (toujours en effectif réduit) mais cependant
réparties en trois mailles (Annexe 3), dans une étroite
aulnaie de fond de vallon, en bordure de ruisseaux et dans
des ornières de chemins d’exploitation forestière.

dans deux mailles (Annexe 3) au sein de l’aire de
répartition de S. auriculatum, généralement dans le lit et en
bordure de ruisseaux et au creux d’ornières dans des
chemins d’exploitation forestière sous couvert d’épicéas.

Sphagnum inundatum RUSSOW

Sphagnum palustre L.

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
R
non menacée

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
C
AR
non menacée

Sphagnum inundatum appartient, comme S. auriculatum, à
la section Subsecunda. Ces deux espèces sont parfois très
difficiles à distinguer l’une de l’autre car, en plus d’être
morphologiquement très proches, elles occupent des
habitats similaires, quoique S. inundatum soit considérée
comme étant un peu plus basiphile. Sur le site, la plupart
des sphaignes de la section Subsecunda correspondent à S.
auriculatum, avec de grandes feuilles caulinaires dépassant
1,5 mm de long, près de deux fois plus longues que larges,
et fibrillées au moins dans la moitié supérieure du limbe.

Sphagnum palustre (Fig. 13) appartient à la section
Sphagnum qui se caractérise notamment par des feuilles
raméales à sommet cucullé (en forme de capuchon) et par
un hyaloderme des tiges à cellules fibrillées. Son amplitude
écologique est assez large, elle se rencontre dans une
gamme étendue d’habitats humides et acides (boisements,
tourbières, landes tourbeuses, prairies paratourbeuses, etc.).
Cette sphaigne a été observée en plusieurs endroits répartis
en trois mailles (Annexe 3), en bordure d’une petite
dépression créée par un chablis dans une pessière du
plateau sommital (en ligne de crête) et plus fréquemment

Fig. 12. – Feuilles caulinaires de Sphagnum inundatum (à
gauche) et de S. auriculatum (à droite), à partir de matériel
collecté respectivement en août 2019 (J4.24.11), Herb. n°
2019/384 et en mai 2020 (J4.24.11), Herb. n° 2020/296.

Fig. 13. – Sphagnum palustre, en novembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.24.12).

Certaines récoltes problématiques ne réunissent pas
l’ensemble des caractères de S. auriculatum, se rapprochant
et passant graduellement à ceux de S. inundatum. La
présence des rameaux courbés en corne de vache (absents
chez S. inundatum) et de faisceaux composés de 4 rameaux
(5 ou 6 rameaux chez S. inundatum) les rapportent toutefois
à S. auriculatum.
D’autres récoltes s’écartent encore davantage de ce qui est
attendu pour S. auriculatum (feuilles caulinaires ne dépassant pas 1,5 mm de long et seulement fibrillées dans le tiers
supérieur, faisceaux de 5 rameaux). Ces récoltes hors
norme pour S. auriculatum ont été attribuées à S. inundatum
(Fig. 12). En ce qui concerne l’habitat de ces deux espèces,
aucune différence n’a pu être mise en évidence dans ce site.
Sphagnum inundatum a été identifiée à quelques reprises
44

en bordure de ruisseaux. Quelques populations composées
d’individus à feuilles raméales nettement squarreuses,
peuvent être rattachées à l’infrataxon S. palustre var.
squarrosulum qui ne doit pas être confondu avec l’espèce
suivante.
Sphagnum squarrosum CROME
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
R
non menacée

Sphagnum squarrosum, qui appartient à la section
Squarrosa, est une sphaigne robuste à l’aspect hérissé dû à
ses larges feuilles raméales squarreuses (Fig. 14). Chez
cette espèce, la tige se termine par un « bourgeon » assez
proéminent au centre d’un large capitulum qui atteint et

dépasse souvent 2,5 cm de diamètre. Il s’agit d’une espèce
plutôt forestière qui se rencontre en saulaie, en aulnaie, en
boulaie et en forêt de résineux. S. squarrosum n’a été
observé que dans une seule maille (Annexe 3) en quelques
rares stations de faible étendue, le long de petits ruisseaux,
généralement en compagnie de S. auriculatum et nettement
au-dessus du niveau topographique occupé par cette
dernière.

Calliergon cordifolium (HEDW.) KINDB.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AR
non menacée

Cette mousse pleurocarpe d’assez grande taille au port
dressé (famille des Calliergonaceae) se rencontre en
habitats humides où elle peut parfois former des colonies
assez étendues. Calliergon cordifolium a été notée dans
quatre mailles (Annexe 3), en berge d’étang, en bordure de
mare forestière à sphaignes ou encore en fond de vallée
marécageuse (Fig. 15).

Fig. 14. – Sphagnum squarrosum, en novembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.23.22).

Les autres Bryophytes remarquables
Parmi les 190 autres espèces de Bryophytes répertoriées, 33
ont été qualifiées de remarquables (10 hépatiques et 23
mousses) en fonction des critères suivants :
 taxons rares (R) ou très rares (RR) en Wallonie
(SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015)
 taxons assez rares (AR), rares (R), très rares (RR) ou
non signalés (-) en Fagne-Famenne-Calestienne
(SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015)
 taxons non traités spécifiquement dans l’ouvrage de
référence (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015) et
méconnus en Wallonie
 taxons de la liste rouge européenne ou quasi menacés
en Europe (HODGETTS et al., 2019)
 taxons à enjeux majeurs en termes de conservation
 taxons en limite d’aire
 taxons non indigènes
 taxons dont la présence est plutôt inattendue en Forêt
Domaniale de Rance et ses abords.
Ces espèces remarquables font l’objet d’un commentaire et
leur répartition est cartographiée (Annexe 3).

Fig. 15. – Calliergon cordifolium, en mars 2021.
(Coordonnées IFBL : J4.23.22).

Calypogeia muelleriana (SCHIFFN.) MÜLL. FRIB.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
C
AR
non menacée

Cette hépatique à feuilles (famille des Calypogeiaceae)
présente, comme les autres espèces du genre, des feuilles
qui, vues de dessus, se superposent, de la base vers l’apex
des tiges, comme les tuiles d’un toit (feuilles dites
incubes) ; pour confirmer son identification, l’examen des
amphigastres2 est nécessaire. Cette espèce n’a fait l’objet
que d’une seule observation, en 1998, sur bois pourrissant
dans un fond de vallon (Annexe 3). Les deux autres
Calypogeia notés (C. fissa et C. arguta) sont apparemment
beaucoup plus répandus.
Campylium protensum (BRID.) KINDB.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
AC
non menacée

2

Petite feuille insérée sur la face inférieure (ventrale) de la tige
chez de nombreuses hépatiques à feuilles.

45

Cette mousse pleurocarpe (famille des Amblystegiaceae) au
port assez régulièrement ramifié développe des feuilles
longuement acuminées à nervure nulle ou très réduite (Fig.
16). Il s’agit d’une espèce calcicole, rare en Wallonie mais
toutefois assez commune en Fagne-Famenne-Calestienne
(SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015), plus particulièrement en Calestienne où elle trouve des milieux
adéquats pour se développer. Étant donné son écologie, la
trouver en Forêt Domaniale de Rance est plutôt inattendu ;
une seule station a été observée en janvier 2016 (Annexe
3), dans la partie médiane d’un chemin forestier empierré
de gravillons calcaires, avec entre autres Cratoneuron
filicinum. Elle a été revue à cet endroit en 2020.

Fig. 16. – Feuille de Campylium protensum, à partir de
matériel collecté en janvier 2016 (Coordonnées IFBL :
J4.14.33), Herb. n° 2016/006.

Campylopus introflexus (HEDW.) BRID.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

Campylopus pyriformis (SCHULTZ) BRID.
LC
C
AR
non menacée

Cette mousse acrocarpe (famille des Leucobryaceae) forme
des touffes ou des plaques au sol, sur substrats acides
sablonneux à tourbeux, généralement en boisement clair.
Régulièrement, ce Campylopus produit de nombreuses
46

Dicranella howei RENAULD & CARDOT
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
non traitée
non traitée
non traitée

Cette discrète mousse acrocarpe (famille des
Dicranellaceae) est une terricole qui se rencontre sur
substrats argilo-limoneux frais à humides et plutôt
calcarifères. Elle ressemble beaucoup à D. varia et son
habitat est comparable. La distinction de ces deux taxons
repose entre autres sur l’observation microscopique des
feuilles : chez D. howei les marges foliaires sont planes à
légèrement récurvées dans la partie basale du limbe, la
nervure peu distincte (mal délimitée) et occupant le tiers de
la largeur du limbe à la base de la feuille, et le limbe foliaire
est partiellement bistrate (Fig. 17). La première mention de
D. howei en Belgique date seulement d’un peu plus d’une
vingtaine d’années (DE ZUTTERE, 1997) ; elle y reste
relativement méconnue (bien que sans doute assez
fréquente) et n’est pas traitée spécifiquement dans l’Atlas
des Bryophytes de Wallonie car englobée dans D. varia s.l.
(A. SOTIAUX, comm. pers. 2020). D. howei n’a été observée
qu’à un seul endroit (Annexe 3), colonisant une petite zone
de terre dénudée au sein de la pelouse tondue environnant
le site d’accueil du Ri de Fromont.

NA
C
C
Invasive

Cette mousse acrocarpe (famille des Leucobryaceae) est
une des rares espèces exotiques de la bryoflore belge. Elle
forme des nappes de tiges dressées aux feuilles se terminant
généralement par un poil hyalin ; à sec, ce dernier est
nettement réfléchi donnant alors à l’ensemble vu de dessus
l’apparence d’étoiles. Cette mousse originaire de
l’hémisphère sud est acidiphile et montre une préférence
pour les milieux plus ou moins ouverts tels que lande,
coupe forestière ou zone étrépée, où son comportement est
souvent invasif. C. introflexus a été observée dans quatre
mailles (Annexe 3), généralement en populations peu
étendues.

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

feuilles caduques qui assurent une propagation végétative.
Cette espèce n’a fait l’objet que d’une seule observation en
2011, au Bois Planté (Annexe 3).

Fig. 17. – Dicranella howei, coupe transversale de la feuille,
à partir de matériel collecté en novembre 2020
(Coordonnées IFBL : J4.13.44), Herb. n° 2020/624.

Dicranum majus SM.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AR
non menacée

Cette robuste mousse acrocarpe (famille des Dicranaceae)
forme de larges touffes sur substrats acides (rochers,
pierriers, sols forestiers). Au sein du genre Dicranum, elle
se distingue notamment par ses feuilles non ondulées, par
l’absence de lamelles en face dorsale de la nervure (dans la
partie apicale du limbe) et par deux rangs de cellules guides
dans la nervure (Fig. 18).

Cette espèce n’a été observée qu’à un seul endroit en 2020
(Annexe 3), dans le bas d’un versant forestier à canche
flexueuse, avec de nombreuses touffes présentes mais
réparties sur une petite superficie. Trois autres Dicranum
sont présents dans la dition : D. montanum, D. scoparium
et D. tauricum.

Fig. 19. – Feuille de Fissidens celticus montrant la nervure
genouillée, à partir de matériel collecté en novembre 2013.
(Coordonnées IFBL : J4.14.32), Herb. n° 2013/417.

Fig. 18. – Dicranum majus, coupe transversale de la feuille
montrant deux rangs de cellules guides, à partir de matériel
collecté en novembre 2020. (J4.23.21). Herb. n° 2020/615.

Ephemerum stoloniferum (HEDW.) L.T. ELLIS & M.J.
PRICE (Syn. : Ephemerum serratum auct.)
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
AC
non menacée

F. celticus est une pionnière sciaphile sur la terre instable
(argileuse ou limoneuse) des berges abruptes de ruisseau où
elle peut former des gazonnements étendus. Cette mousse
n’a été découverte dans nos régions qu’en 1990 ; on la
croyait jusqu’alors endémique des Îles Britanniques
(SOTIAUX et al., 1991). Une recherche ciblée a permis de
relever sa présence le long de presque l’ensemble des
ruisseaux du massif forestier étudié, correspondant à 12
mailles dont les 10 principales de la dition (Annexe 3). Mis
à part quelques localités dans la moitié septentrionale de
l’Entre-Sambre-et-Meuse, cette espèce atteint ici la limite
nord de son aire de répartition continentale.
Fissidens pusillus (WILSON) MILDE

Cette minuscule mousse acrocarpe haute de 1 à 2 mm
(famille des Pottiaceae) fait partie des communautés de
bryophytes éphémères colonisant les substrats dénudés.
Cette espèce produit rapidement de petites capsules
globuleuses au creux de feuilles sans nervure et à marges
dentées. E. stoloniferum n’a été observée qu’une fois en
2019 (Annexe 3) sur des vases asséchées en aulnaie
marécageuse.
Une autre espèce d’Ephemerum est présente, E. serratum
(Syn. : E. minutissimum) ; elle a été notée dans deux
mailles. L’observation des spores à maturité est nécessaire
pour distinguer ces deux Ephemerum (spores grossièrement
papilleuses et sans voile hyalin pour E. stoloniferum et
spores finement papilleuses entourées d’un voile hyalin
pour E. serratum).

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AR
non menacée

Cette mousse acrocarpe (famille des Fissidentaceae) de
taille inférieure au centimètre n’est pas facile à distinguer
des autres petits Fissidens à feuilles pourvues d’un
limbidium. Son habitat particulier peut cependant orienter
son identification ; il s’agit d’une espèce croissant
directement sur les pierres des ruisseaux oligotrophes (Fig.
20). Fissidens pusillus n’a fait l’objet que de trois
observations en 2020 (Annexe 3), sur rochers dans le lit et
en berge de ruisseaux tributaires de l’Eau d’Eppe.

Fissidens celticus PATON
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AC
non menacée

Cette petite mousse (famille des Fissidentaceae) se
distingue des autres Fissidens de nos régions par l’absence
de limbidium3, sa tige de 2 à 4 mm de long portant de 7 à
10 paires de feuilles et sa nervure souvent genouillée (Fig.
19).

Fig. 20. – Fissidens pusillus sur grès micacé, en novembre
2020. (Coordonnées IFBL : J4.23.21).

3

Marge foliaire étroite (souvent pluristrate) constituée de cellules
allongées nettement différenciées des cellules plus internes de la
feuille.

47

Flexitrichum gracile (MITT.) IGNATOV & FEDOSOV (Syn. :
Ditrichum gracile (MITT.) KUNTZE)
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
non traitée
non traitée
non traitée

Cette mousse acrocarpe (famille des Flexitrichaceae) est
d’aspect assez robuste et forme habituellement de grandes
touffes assez lâches sur substrats calcaires (rochers,
pierriers, pelouses). Les feuilles dépassent 5 mm de long et
sont graduellement rétrécies en une longue subule. Cette
espèce est parfois difficile à distinguer de F. flexicaule
(Syn. : Ditrichum flexicaule) en raison de morphoses
intermédiaires entre ces deux espèces. F. gracile n’est
d’ailleurs pas traitée à part entière dans l’Atlas des
Bryophytes de Wallonie, mais mentionnée sous le taxon F.
flexicaule s.l. (incl. F. gracile). Sa présence assez
inattendue en Forêt Domaniale de Rance est liée à l’apport
de matériaux calcaires ; elle a été observée dans deux
mailles (Annexe 3), toujours dans la partie médiane de
chemins forestiers recouverts de gravillons calcaires.
Frullania fragilifolia (TAYLOR) GOTTSCHE, LINDENB. &
NEES
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
AC
non menacée

Cette hépatique à feuilles (famille des Frullaniaceae) est
est la plus rare des trois espèces du genre en Belgique. Elle
est notamment absente au nord du sillon Sambre-et-Meuse
(SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015 ; DE BEER & VAN
LANDUYT, 2019). C’est une hépatique corticole qui se
rencontre surtout en vieille futaie où elle est considérée
comme un bon indicateur de forêt ancienne, de longue
continuité écologique. Elle a été observée dans trois mailles
de la dition (Annexe 3), notamment sur le tronc de gros
Carpinus betulus. La Forêt Domaniale de Rance et ses
abords se situent en limite nord de son aire de répartition.

surtout sur troncs de Quercus sp. (8 fois sur 13). Mis à part
quelques observations sporadiques au nord du sillon
Sambre-et-Meuse, la Forêt de Rance se situe en limite nord
de son aire de répartition.
Heterocladium heteropterum (BRID.) SCHIMP.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
AR
non menacée

Cette mousse pleurocarpe de la famille des
Lembophyllaceae, aux tiges fines et assez régulièrement
pennées, forme de petits tapis vert foncé sur les rochers
siliceux ombragés (espèce saxicole). Elle n’a été observée
qu’à un seul endroit, dans le Bois Planté (Annexe 3), au
niveau d’un petit affleurement gréseux barrant le cours
d’un ruisseau, à l’origine du développement de cascatelles
à cet endroit ; la station est très réduite, quelques décimètres
carrés accrochés aux blocs rocheux en berge du ruisseau.
Hypnum andoi A.J.E. SM.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AR
non menacée

Cette mousse pleurocarpe (famille des Hypnaceae) est fort
similaire à l’omniprésente et polymorphe H. cupressiforme.
La distinction entre ces deux taxons repose surtout sur
l’examen de l’opercule des capsules (mamelonné pour H.
andoi et longuement rostré pour H. cupressiforme), (Fig.
21).

Frullania tamarisci (L.) DUMORT.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
C
non menacée

Cette hépatique à feuilles (famille des Frullaniaceae), bien
qu’un peu plus répandue que F. fragilifolia, est toutefois
beaucoup moins fréquente que l’omniprésente et abondante
F. dilatata. Ces deux taxons plus rares se distinguent par un
lobule foliaire ventral nettement plus long que large et la
présence d’ocelles dans les lobes foliaires. À l’instar de F.
fragilifolia, il s’agit d’une espèce corticole qui se rencontre
surtout en vieille futaie, plus rarement saxicole. Elle a fait
l’objet de treize observations réparties dans six mailles,
distribuées dans la moitié sud du territoire (Annexe 3),
48

Fig. 21. – Hypnum andoi sur écorce de charme, en
novembre 2020. (Coordonnées IFBL : J4.23.21).

Cette espèce s’observe sur écorces acides en milieux bien
ombragés et aussi parfois sur rochers. H. andoi a été
identifié dans neuf mailles distribuées sur l’ensemble du
massif (Annexe 3), mais ce taxon est vraisemblablement
sous-observé car hasardeux à reconnaître en l’absence de
sporophytes. Cette mousse a été notée sur troncs
pourrissants au sol, sur souches et sur l’écorce des essences
suivantes : Acer pseudoplatanus, Betula pendula, Carpinus
betulus et Fraxinus excelsior.

Lewinskya rupestris (SCHLEICH. ex SCHWÄGR.) F. LARA,
GARILLETI & GOFFINET (Syn. : Orthotrichum rupestre
SCHLEICH. ex SCHWÄGR.)
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
R
non menacée

Cette mousse acrocarpe (famille des Orthotrichaceae)
forme des coussinets assez robustes sur rochers siliceux et
plus rarement sur écorces. Vis-à-vis des espèces voisines,
elle se distingue assez aisément par toute une série de
caractères (coiffe munie de longs cils, dents de l’exostome
dressées ou étalées à sec, limbe foliaire montrant de larges
plages bistrates, capsule incluse ou légèrement émergente à
stomates phanéropores, cellules du limbe foliaire nettement
papilleuses). Cette mousse n’est pas mentionnée dans
l’Entre-Sambre-et-Meuse selon l’Atlas des Bryophytes de
Wallonie (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015). Elle n’a
été observée qu’une seule fois en février 2020 à proximité
de la lisière nord du massif (Annexe 3), sur l’écorce d’un
chêne. Deux autres Lewinskya corticoles sont présents, L.
affinis qui est très fréquent et L. striata qui a été noté dans
deux mailles (J4.14.34 et J4.23.22).
Metzgeria consanguinea SCHIFFN. (Syn. : Metzgeria
temperata auct. eur. non KUWAH.)
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
R
non menacée

Cette hépatique à thalle (famille des Metzgeriaceae)
développe, comme l’espèce voisine M. violacea, des thalles
aux extrémités amincies et redressées, où se positionnent
des propagules. Chez M. consanguinea, les propagules ne
sont présentes qu’en bordure du thalle. Il s’agit d’une
espèce épiphyte croissant sur l’écorce des arbres et
arbustes. Elle a été observée dans trois mailles (Annexe 3)
et apparaît, comme c’est le cas à l’échelle de la Wallonie,
plus rare que M. violacea (notée dans cinq mailles de la
dition).

ulicina a été notée sur les essences suivantes : Acer
pseudoplatanus, Alnus glutinosa, Carpinus betulus, Fagus
sylvatica et Quercus robur.
Myriocoleopsis minutissima (SM.) R.L. ZHU, Y. YU &
PÓCS (Syn. : Cololejeunea minutissima (SM.) SCHIFFN.)
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
R
non menacée

Cette hépatique à feuilles (famille des Lejeuneaceae)
développe de minuscules tiges feuillées atteignant à peine
une dizaine de millimètres de long, elles sont difficiles à
repérer individuellement mais, rassemblées, elles forment
souvent de petits placages vert clair plus facilement
détectables. Il s’agit d’une espèce épiphyte, croissant sur
l’écorce d’arbres feuillus. Malgré une prospection ciblée à
la recherche d’une espèce très similaire fréquentant le
même habitat (Microlejeunea ulicina), elle n’a fait l’objet
que de deux observations ponctuelles en 2020 (Annexe 3),
en lisière nord de la forêt (sur Acer pseudoplatanus) et plus
à l’intérieur du massif, le long de l’ancienne voie ferrée (sur
Carpinus betulus). Cette petite hépatique dont la première
mention belge date seulement des années 1980 est
actuellement en pleine expansion en Wallonie (SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015).
Nowellia curvifolia (DICKS.) MITT.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
AC
non menacée

Cette hépatique à feuilles bilobées fortement concaves aux
lobes longuement acuminés (famille des Cephaloziaceae)
est relativement facile à reconnaître (Fig. 22).

Microlejeunea ulicina (TAYLOR) STEPH.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AR
non menacée

Cette hépatique à feuilles (famille des Lejeuneaceae) est de
très petite dimension et passe facilement inaperçue au sein
des autres bryophytes colonisant son habitat préférentiel, à
savoir l’écorce des troncs des arbres feuillus en milieu
forestier, notamment dans les vieilles futaies. Une
recherche ciblée a permis de relever sa présence dans 12
mailles dont les 10 principales de la dition (Annexe 3) mais
le taxon est manifestement peu abondant, il est loin de
coloniser l’ensemble des habitats potentiels. Microlejeunea

Fig. 22. – Tige feuillée de Nowellia curvifolia, à partir de
matériel collecté en novembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.14.32), Herb. n° 2020/634.

Il faut la rechercher sur les troncs pourrissants au sol dans
une ambiance humide et ombragée. Elle a été notée dans
cinq mailles (Annexe 3). Ce taxon se trouve ici en limite
nord de l’aire continue qu’il occupe dans le sud du pays et
il est très rare au nord du sillon Sambre-et-Meuse (SOTIAUX
& VANDERPOORTEN, 2015 ; DE BEER & VAN LANDUYT,
2019).
49

Orthodontium lineare SCHWÄGR.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

NA
AC
AR
invasive

Cette mousse acrocarpe (famille des Orthodontiaceae),
originaire de l’hémisphère sud, est dorénavant présente
dans toutes les régions de Wallonie où elle est globalement
devenue assez commune, près de 75 ans après sa première
mention sur le territoire belge (DEMARET & DE RUYVER,
1956 ; STIEPERAERE & JACQUES, 1995 ; SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015). Elle se reconnait à ses longues
feuilles étroites et à la production fréquente de nombreuses
capsules à base atténuée, toutes plus ou moins disposées et
inclinées de la même façon. Les souches pourrissantes et
les bases d’arbres à écorce acide constituent son habitat
préférentiel. L’examen minutieux de nombreuses souches
pourrissantes a révélé sa présence dans 13 mailles dont les
10 principales du site (Annexe 3).

Cette mousse pleurocarpe (famille des Plagiotheciaceae)
est de taille assez modeste avec des tiges feuillées
atteignant au plus 2 cm de long. Chez cette espèce, des
propagules sont assez souvent produites au niveau de la
partie apicale des feuilles (Fig. 24). P. latebricola est
acidiphile et colonise le bois pourrissant et la base des
arbres ; elle a été notée dans deux mailles (Annexe 3), sur
souches pourrissantes. Cette espèce rare à l’échelle de la
Wallonie, n’était pas signalée en Fagne-FamenneCalestienne dans l’ouvrage de référence (SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015) ; elle a toutefois été observée par
la suite (en 2018), notamment dans la maille J4.24 un peu
au sud des limites de la dition (A. SOTIAUX, comm. pers.
2020).

Physcomitrium pyriforme (HEDW.) BRUCH & SCHIMP.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
AR
non menacée

Cette mousse acrocarpe (famille des Funariaceae) produit
fréquemment des capsules exsertes en forme de poire ;
elles sont portées par des soies longues de 5 à 15 mm et sont
surmontées par une coiffe à aspect de mitre (Fig. 23). Les
sols remués et humides des prairies et bords d’étang
constituent son habitat principal. P. pyriforme n’a été
observée qu’à un seul endroit en 2020 (Annexe 3), sur un
amoncellement de vases déposées en bordure d’un étang.

Fig. 23. – Physcomitrium pyriforme, en avril 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.14.31).

Plagiothecium latebricola SCHIMP.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie
50

LC
R
non menacée

Fig. 24. – Plagiothecium latebricola, apex foliaire avec
propagules, à partir de matériel collecté en novembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.14.34), Herb. n° 2020/633.

Plagiothecium undulatum (HEDW.) SCHIMP.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
C
AR
non menacée

Cette robuste mousse pleurocarpe (famille des
Plagiotheciaceae) aux tiges et rameaux allongés se
remarque par sa teinte globale vert clair devenant
blanchâtre à sec. Les feuilles de grande taille (3 à 4 mm de
long) sont marquées d’ondulations transversales caractéristiques. P. undulatum, espèce acidiphile, montre une
préférence pour des habitats riches en humus comme les
sols forestiers où elle peut former des plages assez
étendues. Elle n’a été observée qu’en deux endroits assez
distants (Annexe 3). Elle a d’abord été notée en 2010 dans
la maille J4.14.32 (vallée du Ruisseau de l’Étogne) mais
cette station est présumée disparue, n’ayant pas été revue
ces dernières années. Cette mousse est toutefois toujours
présente dans le massif forestier (maille J4.24.12, Forêt
Domaniale de Rance, avril 2020) avec une petite plage de
deux m2 dans le bas d’un versant forestier pentu.
Plenogemma phyllantha (BRID.) SAWICKI, PLÁŠEK &
OCHYRA (Syn. : Ulota phyllantha BRID.)

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
R
non menacée

Cette mousse acrocarpe de la famille des Orthotrichaceae
forme des coussinets sur l’écorce des arbres et des arbustes
(plus rarement sur rochers). Elle est facile à identifier grâce
aux amas de propagules allongées brunâtres qui sont
disposées sur un prolongement de la nervure au bout des
feuilles (Fig. 25).

observées mais, en l’absence de capsules, l’identification
reste incertaine.
Riccia huebeneriana LINDENB.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
RR
RR
en régression, menacée

Cette hépatique à thalle (famille des Ricciaceae) forme des
rosettes vertes, parfois teintées de violet, de diamètre allant
de 5 à 15 mm ; lorsque les individus sont nombreux par
unité de surface, les rosettes s’imbriquent entre elles et
l’ensemble forme alors un gazonnement plus ou moins
étendu. La partie centrale des thalles âgés montre un aspect
caverneux-spongieux (Fig. 26) dû à la rupture de la paroi
supérieure de grandes cavités dorsales (chambres aérifères).

Fig. 25. – Plenogemma phyllantha, amas de propagules au
bout des feuilles, à partir de matériel collecté en février
2020. (Coordonnées IFBL : J4.14.31), Herb. n° 2020/135.

Cette espèce à affinité océanique, limitée jadis aux régions
côtières, étend progressivement son aire de répartition à
l’intérieur des terres ; elle est rare en Wallonie (SOTIAUX &
VANDERPOORTEN, 2015). Plenogemma phyllantha n’a été
notée qu’à un seul endroit et en effectif extrêmement réduit
(un seul coussinet), sur l’écorce d’un chêne non loin de la
lisière (Annexe 3). Juste au nord des limites de la dition,
elle a également été observée en J4.14.13 dans la vallée du
Ruisseau des Fonds (sur écorce de saule).
Pogonatum nanum (HEDW.) P. BEAUV.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
AR
non menacée

Cette petite mousse acrocarpe est une des cinq
Polytrichaceae observées dans la Forêt Domaniale de
Rance et ses abords. Comme P. aloides, elle forme de
courtes tiges feuillées prenant naissance sur un protonéma
persistant ; ces deux espèces se distinguent surtout par la
forme des capsules (courte et sphérique pour P. nanum
versus allongée et cylindrique pour P. aloides). Ces deux
Pogonatum pionniers colonisent les substrats acides neufs
comme les talus érodés et la terre dénudée des chablis. P.
nanum n’a été observée qu’une seule fois, au niveau d’un
talus ombragé non loin d’un plan d’eau (Annexe 3). Il en
est de même pour P. aloides, observé à un seul endroit
(maille J4.13.42). D’autres stations de Pogonatum ont été

Fig. 26. – Riccia huebeneriana, en septembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.23.22).

Cette Riccie recouvre en fin d’été et en automne la vase
exondée des étangs. Elle n’a été notée qu’à un seul endroit
(Fig. 29), au niveau d’un petit étang de la Forêt Domaniale
situé à cheval sur deux mailles IFBL (Annexe 3), la
première fois en 2013 sur vases exposées lors de travaux
d’aménagement de la digue de l’étang ; elle a été revue en
septembre 2020 avec des milliers d’individus ayant pris
place sur les vases humides apparues lors du retrait
progressif de la nappe d’eau. Manifestement cette espèce
semble se maintenir durablement en bénéficiant de la baisse
estivale du niveau d’eau. Elle est très rare, en régression et
menacée en Région wallonne (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015).
Scapania undulata (L.) DUMORT.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
C
AC
non menacée

Cette hépatique à feuilles appartient à la famille des
Scapaniaceae qui se caractérise notamment par ses feuilles
divisées en deux lobes appliqués l’un sur l’autre (feuilles
condupliquées). Il s’agit d’une espèce aquatique acidiphile,
51

colonisant les affleurements rocheux, les pierres isolées et
les racines immergées des ruisseaux aux eaux courantes et
oligotrophes. Elle a été observée dans huit mailles, surtout
localisées dans la partie sud du territoire là où les ruisseaux
circulent sur des substrats globalement plus acides (Annexe
3). La Forêt Domaniale de Rance et ses abords se trouvent
en marge de l’aire de répartition de l’espèce. Les stations
de la Fagne de l’Entre-Sambre-et-Meuse constituent en
quelque sorte un îlot de populations disjoint par les terrains
calcaires de la Calestienne, de son aire ardennaise où elle
est largement répandue et très commune.
Taxiphyllum wissgrillii (GAROV.) WIJK & MARGAD.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AC
C
non menacée

Cette mousse pleurocarpe (famille des Taxiphyllaceae) aux
rameaux aplatis avec des feuilles disposées sur deux rangs,
non décurrentes et souvent un peu brillantes passe
facilement inaperçue. Taxiphyllum wissgrillii est commune
en Fagne-Famenne-Calestienne (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015) mais il s’agit d’une espèce calciphile, dès
lors plutôt inattendue en Forêt Domaniale de Rance et ses
abords. Elle n’a été observée qu’à un seul endroit (Annexe
3) et en faible quantité, au niveau d’un petit escarpement
rocheux schisto-gréseux dans un versant forestier ; sa
présence à cet endroit est liée à un suintement intermittent
libérant une eau vraisemblablement chargée en ions Ca 2+
issue des couches géologiques calcaires situées juste au
nord du site. Ce petit escarpement rocheux suintant abrite
également Homalia trichomanoides, Thamnobryum
alopecurum, Fissidens adianthoides et Porella platyphylla.
À quelques dizaines de mètres de là, les mêmes roches non
suintantes accueillent une bryoflore nettement acidiphile.
Tetraphis pellucida HEDW.

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
C
AR
non menacée

Cette petite mousse acrocarpe haute de 1 à 2 cm (famille
des Tetraphidaceae) se singularise par ses capsules à
péristome formé de quatre dents triangulaires dressées. Elle
se propage également par voie végétative, en produisant des
propagules disposées dans des coupelles situées au sommet
des tiges. Tetraphis pellucida, espèce acidiphile, colonise
surtout les souches pourrissantes en état de décomposition
assez avancé.
Bien qu’observée dans six mailles (Annexe 3),
généralement sur souches pourrissantes, mais aussi à la
base d’un tronc de Betula pendula et sur bois pourrissant au
sol, cette mousse s’avère être peu fréquente en Forêt
Domaniale de Rance et ses abords.
52

Thuidium assimile (MITT.) A. JAEGER
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
AR
C
non menacée

Cette mousse pleurocarpe (famille des Thuidiaceae) aux
tiges finement et régulièrement ramifiées (Fig. 27) forme
des tapis plus ou moins étendus au sol ; elle ressemble
beaucoup à Thuidium tamariscinum qui est une espèce
largement distribuée. L’identification de ce taxon repose
surtout sur des caractéristiques microscopiques comme le
nombre de papilles de la cellule terminale des feuilles
situées au bout des rameaux et l’aspect de l’apex des
feuilles caulinaires.

Fig. 27. – Thuidium assimile, en décembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.14.33).

C’est une espèce des pelouses, talus et fonds de carrière en
milieu calcaire (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015). Sa
présence en Forêt Domaniale de Rance est dès lors plutôt
surprenante ; elle a été observée dans deux mailles (Annexe
3), dans la partie médiane de chemins forestiers empierrés
de graviers calcaires où d’autres taxons calciphiles, tout
aussi inattendus, sont parfois notés (Campylium protensum,
Cratoneuron filicinum, Didymodon ferrugineus, Encalypta
streptocarpa, Entodon concinnus, Flexitrichum gracile).

Trichocolea tomentella (EHRH.) DUMORT.

Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

NT (A2c)
AC
AR
non menacée

Cette grande hépatique à feuilles (famille des
Trichocoleaceae) développe des tiges régulièrement
pennées atteignant jusqu’à 10 cm de long (Fig. 28) ; elles
sont garnies de feuilles finement divisées en segments
étroits. Les berges de ruisseaux sous couvert forestier dense
constituent l’habitat classique de cette espèce ; elle y forme

Fig. 28. – Trichocolea tomentella, en novembre 2020.
(Coordonnées IFBL : J4.24.11).

des colonies compactes très caractéristiques et facilement
reconnaissables, côtoyant souvent Thuidium tamariscinum.
Cette hépatique a été observée en plusieurs endroits
distincts le long de ruisseaux tributaires de la Hantes ou de
l’Eau d’Eppe (Annexe 3), mais généralement en assez
faible quantité. Les populations situées dans la partie nordorientale de la dition semblent avoir été fortement
impactées par une récente exploitation forestière ayant mis
en lumière le fond de vallée. Au niveau européen
(HODGETTS et al., 2019), Trichocolea tomentella est
considérée comme étant proche du seuil des espèces
menacées (catégorie NT) en raison d’un déclin quantifié
des populations (critère A2c).
Weissia rutilans (HEDW.) LINDB.
Menace Europe
Rareté Wallonie
Rareté FagFamCal
Menace Wallonie

LC
R
AR
non menacée

Cette petite mousse acrocarpe appartient à la famille des
Pottiaceae dont les représentants ne sont pas toujours
faciles à distinguer entre eux ; le recours à un examen
microscopique est ici de rigueur, notamment pour la mesure
du diamètre des spores. Weissia rutilans se caractérise par
des feuilles fortement mucronées et planes dans la partie
supérieure, des spores de plus de 20 µm de diamètre et un
péristome rudimentaire (SOTIAUX & VANDERPOORTEN,
2015). Il s’agit d’une espèce pionnière sur substrat argileux
humide. Cette mousse, rare à l’échelle de la Wallonie, a été
découverte en Forêt Domaniale de Rance (maille J4.13.44)
en 2018 (A. SOTIAUX, comm. pers. 2020) ; elle a été
retrouvée dans la même maille en 2020 (Annexe 3), sur
talus et rebord de fossé le long de routes forestières et dans
des ornières d’un chemin d’exploitation forestière. Deux
autres Weissia sont présents dans la dition (W. brachycarpa
et W. controversa).

DISCUSSION
Bien qu’elle n’abrite pas d’habitats ou de taxons
exceptionnels non signalés ailleurs en Wallonie ou en
Belgique, la « Forêt Domaniale de Rance et ses abords » est
loin d’être dénuée d’intérêt bryologique.

Les 196 espèces dénombrées dans une surface dépassant à
peine les 10 km2 attestent d’une diversité spécifique élevée,
malgré l’absence d’affleurements rocheux importants et de
substrats franchement calcaires. Ce nombre se situe bien
au-delà de 146, valeur moyenne du nombre d’espèces des
mailles IFBL de 16 km2 de la région Fagne-FamenneCalestienne (SOTIAUX & VANDERPOORTEN, 2015). La
bryoflore recensée n’est pas que strictement liée aux
habitats forestiers ; elle comporte aussi des éléments
relevant plus d’une flore rudérale ou résultant d’actions
anthropiques diverses comme le démontrent quelques
espèces calciphiles (Cratoneuron filicinum, Didymodon
ferrugineus, Encalypta streptocarpa, Thuidium assimile,
etc.) dont la présence inattendue dans le massif forestier est
une conséquence directe de l’apport de gravillons calcaires
utilisés pour l’empierrage des chemins forestiers. Cette
riche diversité spécifique résulte aussi d’une pression
d’inventaire accrue, avec des prospections menées en
toutes saisons et couvrant plusieurs années.
La présence de six espèces de sphaignes (Sphagnum
auriculatum, S. fimbriatum, S. flexuosum, S. inundatum, S.
palustre et S. squarrosum) est à souligner tout particulièrement ; ces six espèces ont toutes été observées dans la
maille J4.23 qui en fait une des mailles les plus riches en
sphaignes de l’Entre-Sambre-et-Meuse en dehors des
mailles du district phytogéographique ardennais. La maille
J4.24 affiche également un score élevé avec quatre
sphaignes notées. La zone occupée par les sphaignes est
située dans le secteur a priori le plus acide du massif ; par
endroits, de belles populations s’observent dans et aux
bords des ruisseaux mais les sphaignes y sont en équilibre
fragile et toute perturbation de la qualité des eaux leur sera
préjudiciable. À ce propos, on peut noter que les
populations de sphaignes situées à l’intérieur de la boucle
de routes asphaltées permettant d’accéder à l’aire d’accueil
du Ri de Fromont se sont effondrées depuis une vingtaine
d’années ; à l’extérieur et en amont de cette boucle, les
populations sont par contre plus stables.
Dans toute cette zone occupée par les sphaignes (Fig. 8),
l’aménagement des chemins d’exploitation forestière par
dépôt de grandes quantités de gravillons calcaires et la pose
de tuyaux pour la traversée des cours d’eau et fossés
devraient être proscrits ; le passage des engins forestiers
dans les ruisseaux, de prime abord désastreux, se révèle par
contre, dans ce cas précis, plutôt positif pour les sphaignes
en créant des ornières ou de petits barrages où elles trouvent
de nouveaux milieux pour s’installer.
Parmi les espèces les plus rares observées sur le site, Riccia
huebeneriana retient l’attention. Cette hépatique à thalle est
en régression et est menacée en Région wallonne (SOTIAUX
& VANDERPOORTEN, 2015). Avec les sphaignes, elle fait
clairement partie des espèces à enjeux du site. La
population repérée depuis 2013 au niveau d’un petit étang
de la Forêt Domaniale est tributaire de la baisse estivale du
niveau d’eau de cet étang, libérant des plages de vases où
cette hépatique peut boucler rapidement un cycle de vie (de
spores à spores) (Fig. 29). Une autre hépatique, Trichocolea
tomentella, fait également partie des espèces à enjeux du
site car, bien qu’étant assez commune en Wallonie, elle est
53

proche du seuil des espèces menacées à l’échelle
européenne (HODGETTS et al., 2019).
Plusieurs espèces peu fréquentes dans l’Entre-Sambre-etMeuse ont été repérée dans la dition, la plupart sont des
espèces corticoles en expansion assez récente dans nos
régions comme Myriocoleopsis minutissima
et
Plenogemma phyllantha. La Forêt Domaniale de Rance et
ses abords se révélent aussi être en limite d’aire
septentrionale pour plusieurs espèces comme les
hépatiques Frullania fragilifolia, F. tamarisci et Scapania
undulata.
Les principaux habitats de la dynamique forestière propices
au développement d’une bryoflore diversifiée sont assez
bien exprimés dans le massif. Le cortège des espèces
saprolignicoles affectionnant le bois pourrissant (souches
en décomposition, troncs d’arbres morts au sol, etc.) est
relativement bien représenté (Nowellia curvifolia,
Plagiothecium latebricola, Tetraphis pellucida… et une
espèce exotique Orthodontium lineare). Quant aux espèces
corticoles (épiphytes), elles sont assez bien diversifiées
avec plusieurs cortèges distincts liés d’une part au type
d’écorce et d’autre part à l’emplacement des arbres. Un
« effet lisière » se marque nettement avec toute une série
d’espèces presque exclusivement rencontrées sur les
écorces eutrophes riches en bases des arbres proches des
limites du site comme Syntrichia virescens, S. papillosa,
Orthotrichum diaphanum, etc.
À l’opposé, plus à l’intérieur du massif, certains secteurs
plus confinés constituent des témoins d’une longue
continuité sous couvert forestier (vieille futaie) avec la
présence d’espèces emblématiques comme Frullania
tamarisci, F. fragilifolia et Zygodon rupestris. Ces secteurs
de « forêt ancienne » devraient idéalement être convertis en
îlots de sénescence ou du moins faire l’objet d’une attention
particulière lors de l’exploitation forestière afin de
maintenir de vieux arbres et les manchons de bryophytes
qui les recouvrent. Les habitats en fonds de vallée et la flore
saxicole du lit et des berges des ruisseaux forestiers
participent également à la diversité biologique du site et une
gestion douce de ces milieux est à encourager afin de
conserver notamment les populations de Trichocolea
tomentella.

REMERCIEMENTS
J’adresse de cordiaux remerciements à André SOTIAUX
pour la communication de ses données relatives à la dition,
pour nos échanges concernant certains taxons à
identification malaisée et pour sa relecture minutieuse du
document, ainsi qu’à Michel ROUARD pour la transmission
de documents sur l’histoire de la Forêt de Rance et sa
relecture finale du texte. Merci également à Philippe BAIX
et Vincent VANDEPUTTE (Département de la Nature et des
Forêts) pour m’avoir fourni l’autorisation de prospecter en
toute quiétude dans les multiples recoins de la Forêt
Domaniale de Rance.

54

BIBLIOGRAPHIE
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https://www.vlaanderen.be/publicaties/voorlopigeverspreidingsatlas-van-de-hauw-lever-en-bladmossenvan-vlaanderen
Toutes les illustrations sont de l’auteur.

ANNEXE 1
Liste des bryophytes recensées en Forêt Domaniale de Rance et ses abords durant cette étude.
(*sphaigne ou autre bryophyte remarquable faisant l’objet d’un commentaire dans le texte et dont la carte de répartition est présentée
en Annexe 3)
Fig. 29. – Vases exondées couvertes de Riccia huebeneriana, en septembre 2020. (Coordonnées IFBL : J4.23.22).

ANNEXE 1
Liste des bryophytes recensées en Forêt Domaniale de Rance et ses abords durant cette étude (*sphaigne ou autre bryophyte
remarquable faisant l’objet d’un commentaire dans le texte et dont la carte de répartition dans la dition est présentée en Annexe 3)

Marchantiophyta (Hépatiques)
Aneura pinguis (L.) Dumort.
Apopellia endiviifolia (Dicks.) Nebel & D. Quandt
(Syn. : Pellia endiviifolia (Dick.) Dumort.)
Calypogeia arguta Nees & Mont.
Calypogeia fissa (L.) Raddi
Calypogeia muelleriana (Schiffn.) Müll.Frib.*
Cephalozia bicuspidata (L.) Dumort.
Cephaloziella divaricata (Sm.) Schiffn.
Chiloscyphus pallescens (Ehrh.) Dumort.
Chiloscyphus polyanthos (L.) Corda
Diplophyllum albicans (L.) Dumort.
Fossombronia pusilla (L.) Nees
Fossombronia wondraczekii (Corda) Dumort. ex
Lindb.
Frullania dilatata (L.) Dumort.
Frullania fragilifolia (Taylor) Gottsche, Lindenb.
& Nees*
Frullania tamarisci (L.) Dumort.*

Lophocolea bidentata (L.) Dumort.
Lophocolea heterophylla (Schrad.) Dumort.
Lunularia cruciata (L.) Dumort. ex Lindb.
Marchantia polymorpha L.
Metzgeria consanguinea Schiffn. (Syn. : Metzgeria
temperata auct. eur. non Kuwah.)*
Metzgeria furcata (L.) Corda
Metzgeria violacea (Ach.) Dumort.
Microlejeunea ulicina (Taylor) Steph.*
Myriocoleopsis minutissima (Sm.) R.L. Zhu, Y. Yu
& Pócs (Syn. : Cololejeunea minutissima (Sm.)
Schiffn.)*
Nowellia curvifolia (Dicks.) Mitt.*
Pellia epiphylla (L.) Corda
Plagiochila asplenioides (L.) Dumort.
Porella platyphylla (L.) Pfeiff.
Radula complanata (L.) Dumort.
Riccia glauca L.
55

Riccia huebeneriana Lindenb.*
Riccia sorocarpa Bisch.
Scapania nemorea (L.) Grolle
Scapania undulata (L.) Dumort.*

Solenostoma gracillimum (Sm.) R.M. Schust.
(Syn. : Jungermannia gracillima Sm.)
Trichocolea tomentella (Ehrh.) Dumort.*

Bryophyta (Mousses et Sphaignes)
Alleniella complanata (Hedw.) S. Olsson, Enroth &
D. Quandt (Syn. : Neckera complanata (Hedw.)
Huebener)
Amblystegium serpens (Hedw.) Schimp.
Anomodon viticulosus (Hedw.) Hook. & Taylor
Atrichum undulatum (Hedw.) P. Beauv.
Barbula unguiculata Hedw.
Brachytheciastrum velutinum (Hedw.) Ignatov &
Huttunen
Brachythecium albicans (Hedw.) Schimp.
Brachythecium rivulare Schimp.
Brachythecium rutabulum (Hedw.) Schimp.
Bryoerythrophyllum recurvirostrum (Hedw.) P.C.
Chen
Bryum argenteum Hedw.
Bryum dichotomum Hedw.
Bryum ruderale Crundw. & Nyholm
Calliergon cordifolium (Hedw.) Kindb.*
Calliergonella cuspidata (Hedw.) Loeske
Campylium protensum (Brid.) Kindb.*
Campylopus flexuosus (Hedw.) Brid.
Campylopus introflexus (Hedw.) Brid.*
Campylopus pyriformis (Schultz) Brid.*
Ceratodon purpureus (Hedw.) Brid.
Cirriphyllum piliferum (Hedw.) Grout
Climacium dendroides (Hedw.) F. Weber & D. Mohr
Cratoneuron filicinum (Hedw.) Spruce
Cryphaea heteromalla (Hedw.) D. Mohr
Ctenidium molluscum (Hedw.) Mitt.
Dichodontium pellucidum (Hedw.) Schimp.
Dicranella heteromalla (Hedw.) Schimp.
Dicranella howei Renauld & Cardot*
Dicranella rufescens (Dicks.) Schimp.
Dicranoweisia cirrata (Hedw.) Lindb.
Dicranum majus Sm.*
Dicranum montanum Hedw.
Dicranum scoparium Hedw.
Dicranum tauricum Sapjegin
Didymodon fallax (Hedw.) R.H. Zander
Didymodon ferrugineus (Schimp. ex Besch.) M.O.
Hill
Didymodon insulanus (De Not.) M.O. Hill
Didymodon luridus Hornsch.
Didymodon rigidulus Hedw.
Didymodon sinuosus (Mitt.) Delogne
Encalypta streptocarpa Hedw.
Entodon concinnus (De Not.) Paris
Entosthodon fascicularis (Hedw.) Müll. Hal.
Ephemerum serratum (Hedw.) Hampe (Syn. :
Ephemerum minutissimum Lindb.)
Ephemerum stoloniferum (Hedw.) L.T. Ellis & M.J.
Price (Syn. : Ephemerum serratum auct.)*
Eurhynchium striatum (Hedw.) Schimp.
Fissidens adianthoides Hedw.
56

Fissidens bryoides Hedw.
Fissidens celticus Paton*
Fissidens exilis Hedw.
Fissidens incurvus Starke ex Röhl. (Syn. :
Fissidens viridulus (Sw.) Wahlenb. var. incurvus
(Starke ex Röhl.) Waldh.)
Fissidens pusillus (Wilson) Milde*
Fissidens taxifolius Hedw.
Flexitrichum gracile (Mitt.) Ignatov & Fedosov
(Syn. : Ditrichum gracile (Mitt.) Kuntze)*
Fontinalis antipyretica Hedw.
Funaria hygrometrica Hedw.
Grimmia pulvinata (Hedw.) Sm.
Herzogiella seligeri (Brid.) Z. Iwats.
Heterocladium heteropterum (Brid.) Schimp.*
Homalia trichomanoides (Hedw.) Brid.
Homalothecium sericeum (Hedw.) Schimp.
Hygroamblystegium tenax (Hedw.) Jenn.
Hylocomiadelphus triquetrus (Hedw.) Ochyra &
Stebel (Syn. : Rhytidiadelphus triquetrus (Hedw.)
Warnst.)
Hylocomium splendens (Hedw.) Schimp.
Hypnum andoi A.J.E. Sm.*
Hypnum cupressiforme Hedw.
Hypnum jutlandicum Holmen & E. Warncke
Isothecium alopecuroides (Lam. ex Dubois) Isov.
Isothecium myosuroides Brid.
Kindbergia praelonga (Hedw.) Ochyra
Leptodictyum riparium (Hedw.) Warnst.
Leskea polycarpa Hedw.
Leucobryum glaucum (Hedw.) Ångstr.
Leucodon sciuroides (Hedw.) Schwägr.
Lewinskya affinis (Schrad. ex Brid.) F. Lara,
Garilleti & Goffinet (Syn. : Orthotrichum affine
Schrad. ex Brid.)
Lewinskya rupestris (Schleich. ex Schwägr.) F.
Lara, Garilleti & Goffinet (Syn. : Orthotrichum
rupestre Schleich. ex Schwägr.)*
Lewinskya striata (Hedw.) F. Lara, Garilleti &
Goffinet (Syn. : Orthotrichum striatum Hedw.)
Mnium hornum Hedw.
Orthodontium lineare Schwägr.*
Orthotrichum anomalum Hedw.
Orthotrichum diaphanum Brid.
Orthotrichum pallens Bruch ex Brid.
Orthotrichum pulchellum Brunt.
Orthotrichum stramineum Hornsch. ex Brid.
Orthotrichum tenellum Bruch ex Brid.
Oxyrrhynchium hians (Hedw.) Loeske
Physcomitrium patens (Hedw.) Mitt. (Syn. :
Physcomitrella patens (Hedw.) Bruch & Schimp.)
Physcomitrium pyriforme (Hedw.) Bruch &
Schimp.*
Plagiomnium affine (Blandow ex Funck) T.J. Kop.

Plagiomnium rostratum (Schrad.) T.J. Kop.
Plagiomnium undulatum (Hedw.) T.J. Kop.
Plagiothecium curvifolium Schlieph. ex Limpr.
Plagiothecium denticulatum (Hedw.) Schimp.
Plagiothecium laetum Schimp.
Plagiothecium latebricola Schimp.*
Plagiothecium nemorale (Mitt.) A. Jaeger
Plagiothecium succulentum (Wilson) Lindb.
Plagiothecium undulatum (Hedw.) Schimp.*
Platygyrium repens (Brid.) Schimp.
Plenogemma phyllantha (Brid.) Sawicki, Plášek &
Ochyra (Syn. : Ulota phyllantha Brid.)*
Pleuridium subulatum (Hedw.) Rabenh.
Pleurozium schreberi (Willd. ex Brid.) Mitt.
Pogonatum aloides (Hedw.) P. Beauv.
Pogonatum nanum (Hedw.) P. Beauv.*
Pohlia lutescens (Limpr.) H. Lindb.
Pohlia melanodon (Brid.) A.J. Shaw
Pohlia nutans (Hedw.) Lindb.
Pohlia wahlenbergii (F. Weber & D. Mohr) A.L.
Andrews
Polytrichum formosum Hedw.
Polytrichum piliferum Hedw.
Pseudephemerum nitidum (Hedw.) Loeske
Pseudocrossidium hornschuchianum (Schultz) R.H.
Zander
Pseudoscleropodium purum (Hedw.) M. Fleisch.
Pseudotaxiphyllum elegans (Brid.) Z. Iwats.
Ptychostomum capillare (Hedw.) Holyoak & N.
Pedersen (Syn. : Bryum capillare Hedw.)
Ptychostomum pseudotriquetrum (Hedw.) J.R.
Spence & H.P. Ramsay ex Holyoak & N.
Pedersen (Syn. : Bryum pseudotriquetrum
(Hedw.) G. Gaertn., B. Mey. & Scherb.)
Ptychostomum rubens (Mitt.) Holyoak & N.
Pedersen (Syn. : Bryum rubens Mitt.)
Pulvigera lyellii (Hook. & Taylor) Plášek, Sawicki
& Ochyra (Syn. : Orthotrichum lyellii Hook. &
Taylor)
Rhizomnium punctatum (Hedw.) T.J. Kop.
Rhynchostegiella tenella (Dicks.) Limpr.
Rhynchostegium confertum (Dicks.) Schimp.
Rhynchostegium murale (Hedw.) Schimp.
Rhynchostegium riparioides (Hedw.) Cardot

Rhytidiadelphus loreus (Hedw.) Warnst.
Rhytidiadelphus squarrosus (Hedw.) Warnst.
Schistidium crassipilum H.H. Blom
Sciuro-hypnum plumosum (Hedw.) Ignatov &
Huttunen
Sciuro-hypnum populeum (Hedw.) Ignatov &
Huttunen
Sphagnum auriculatum Schimp.*
Sphagnum fimbriatum Wilson*
Sphagnum flexuosum Dozy & Molk.*
Sphagnum inundatum Russow*
Sphagnum palustre L.*
Sphagnum squarrosum CROME*
Streblotrichum convolutum (Hedw.) P. Beauv.
(Syn. : Barbula convoluta Hedw.)
Syntrichia calcicola J.J. Amann
Syntrichia laevipila Brid.
Syntrichia papillosa (Wilson) Jur.
Syntrichia ruralis (Hedw.) F. Weber & D. Mohr
Syntrichia virescens (De Not.) Ochyra
Taxiphyllum wissgrillii (Garov.) Wijk & Margad.*
Tetraphis pellucida Hedw.*
Thamnobryum alopecurum (Hedw.) Gangulee
Thuidium assimile (Mitt.) A. Jaeger*
Thuidium tamariscinum (Hedw.) Schimp.
Tortula acaulon (With.) R.H. Zander (Syn. : Phascum
cuspidatum Hedw.)
Tortula caucasica Broth. (Syn. : Tortula modica R.H.
Zander)
Tortula muralis Hedw.
Tortula protobryoides R.H. Zander (Syn. :
Protobryum bryoides (Dicks.) J. Guerra & M.J.
Cano)
Tortula subulata Hedw.
Tortula truncata (Hedw.) Mitt.
Trichodon cylindricus (Hedw.) Schimp.
Ulota bruchii Hornsch. ex Brid.
Ulota crispa (Hedw.) Brid.
Weissia brachycarpa (Nees & Hornsch.) Jur.
Weissia controversa Hedw.
Weissia rutilans (Hedw.) Lindb.*
Zygodon conoideus (Dicks.) Hook. & Taylor
Zygodon rupestris Schimp. ex Lorentz
Zygodon viridissimus (Dicks.) Brid.

ANNEXE 2
Liste des bryophytes non observées durant cette étude mais recensées en Forêt Domaniale de Rance et ses abords lors des
prospections menées dans le cadre de la réalisation de l’Atlas des Bryophytes de Wallonie (A. S OTIAUX, comm. pers. 2020)

Aneura maxima (Schiffn.) Steph.*
Aulacomnium androgynum (Hedw.) Schwägr.*
Bryum klinggraeffii Schimp.*
Dicranella varia (Hedw.) Schimp.**
Dicranum polysetum Sw. ex Anon.*

Ptychostomum pallens (Sw. ex Anon.) J.R. Spence
(Syn. : Bryum pallens (Sw.) ex Anon.)
Racomitrium elongatum Ehrh. ex Frisvoll (Syn. :
Niphotrichum elongatum (Ehrh. ex Frisvoll) Bedn.Ochyra & Ochyra)
Scapania irrigua (Nees) Nees

*Sous réserve, car la maille IFBL 1×1 km et la localité indiquées ne se trouvent pas complètement à l’intérieur du périmètre de la dition.
** Correspond à Dicranella varia s.l. (incl. D. howei), voir ci-avant le commentaire relatif à D. howei.

57

ANNEXE 3
Cartes de répartition des sphaignes et autres bryophytes remarquables
de la Forêt Domaniale de Rance et ses abords

58

59

60

Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 61-68

Dix années de recensement de Lépidoptères
dans une forêt feuillue à Chimay (prov. de Hainaut, Belgique)
Marcel GILLARD* et Michel ROUARD**

RÉSUMÉ
Cette note présente la liste des 438 Lépidoptères recensés au cours de nombreuses séances d’observation dans une forêt feuillue de la
Fagne (nord de Chimay, prov. de Hainaut, Belgique) entre 1995 et 2004. Elle est principalement centrée sur l’étude des Hétérocères.
ABSTRACT
Ten years of census of Lepidoptera in a deciduous forest in Chimay (prov. of Hainaut, Belgium). This note presents the list of 438
Lepidoptera identified during many field observations in a deciduous forest, in the Fagne area (north of Chimay, Hainaut, Belgium)
between 1995 and 2004. It is mainly focused on the study of the Heterocera.

* rue du Centre 25, B-5600 Presgaux. Courriel : pap.migr.belg@infonie.be
** rue Pauline Hubert 51, B-6470 Rance. Courriel : rouard.michel@skynet.be

_______________________________________________

INTRODUCTION
La liste que nous présentons fut dressée par l’un de nous
(M.G.) en 2006 (Annexe 1). Elle est le résultat de ses
relevés de terrain durant de nombreuses années dans une
forêt feuillue de la Fagne, le Bois Robert. Malgré l’ancienneté de ces données, il nous a semblé important d’en faire
état, en raison de la somme considérable d’observations
recueillies lors de cet inventaire, comme outil comparatif
entre la une situation actuelle et une évolution du climat à
venir.
L’observation des Hétérocères fit l’objet de relevés
systématiques, notamment avec le concours de Xavier
NACHTERGAEL, étudiant en biologie à l’Université de
Mons-Hainaut, chaque mardi quand la météo le permettait,
d’août 1995 à mai 1996, ensuite durant deux séances par
mois jusqu’en 2004, souvent en compagnie de membres
des Naturalistes de Charleroi ou d’autres associations
(soirées de vulgarisation). Mais l’observation des
Rhopalocères ne fut pas en reste, notamment à l’occasion
des excursions naturalistes organisées par l’un de nous
(M.R.) et traditionnellement le 21 juillet. Par ailleurs et plus
spécifiquement, une étude particulière sur les chenilles
défoliatrices fut menée par CLAES et al. (1998).

SITUATION
Le Bois Robert, qui s’étend sur 600 ha, fait partie de ce
vaste territoire forestier de la Fagne situé au nord de
Chimay-Couvin, à cheval sur le secteur Fagne atlantique

et sur le secteur Famenne-Fagne du domaine médioeuropéen de la carte des Territoires Écologiques de la
Wallonie (ONCLINCX et al., 1987).

Fig. 1. – Localisation régionale du Bois Robert.
(Carte SPF Finance-AGDP).

Sa particularité tient à son historique, car ce bois est resté
longtemps « forêt franche » où les droits d’usage concédés
par le propriétaire, la famille princière de Chimay,
n’avaient pas cours, et a donc échappé à la surexploitation
subie par les forêts voisines pour les besoins sidérurgiques.
Son peuplement s’est donc peu modifié au niveau de la
répartition des essences forestières puisque le chêne sessile
(Quercus petraea) domine largement. L’altitude se situe
entre 245 et 275 m.
61

La forêt est posée sur les assises des Famenniens supérieur
et inférieur, avec des sols essentiellement argileux,
faiblement à fortement gleyifiés sur substrat schisteux à
faible profondeur (40-80 cm). L’économie en eau de ces
sols est donc défavorable, et c’est ce régime hydrique
alternatif qui est le facteur déterminant pour les essences
forestières qui vont y trouver leur place.
La principale association phytosociologique que l’on
rencontre au Bois Robert est celle qui correspond à la
chênaie-charmaie à stellaire (Stellario-Carpinetum),
d’après la classification de NOIRFALISE (1984) (Fig. 2). Les
peuplements forestiers sont constitués essentiellement de
feuillus (93,35 %), dont le chêne (sessile essentiellement),
le charme, le hêtre et quelques autres. Les rares résineux
introduits représentent seulement 4,12 % : épicéas,
mélèzes, douglas et pins (COLLECTIF, 2003). L’état
sanitaire est satisfaisant, hormis les inquiétants
phénomènes de dépérissement du chêne. Des attaques,
parfois importantes, de chenilles défoliatrices ont été
observées lors des printemps 1986, 1987 (Pyrale verte),
1995, 1996 et 1997 (Pyrale verte, Chématobie hiémale et
Hibernie défeuillante) et 2004 (Pyrale verte).

MÉTHODE ET MATÉRIEL
Le matériel utilisé consistait en un groupe électrogène léger
(220 V avec lampe à vapeur de mercure HPL 125 W). Les
observations se faisaient sur un drap blanc dressé sous la
lampe (Fig. 3). En mars-avril et d’août à novembre, la
miellée fut employée1. Des phéromones spécifiques ont
parfois été utilisées pour la recherche des Sésies. Cette
installation était placée alternativement sur deux sites
proches de 2 km, le long d’une ancienne voie ferrée d’une
part, et près d’une maison forestière d’autre par

Corse de LERAUT (1997). Les numéros mentionnés dans la
liste sont ceux repris dans cet ouvrage.

Fig. 2. – Chênaie du Bois Robert, en avril 2021. (Photo
Michel ROUARD).

Pour mentionner la fréquence des espèces observées
(globalisation des 10 années), seule une méthode empirique
était réaliste, soit une appréciation allant de RRR (très rare)
à CCC (très commun). Malgré la subjectivité de cette
méthode d’évaluation de fréquence/rareté, elle reste
acceptable si elle est réalisée par le même observateur
expérimenté. Ces coefficients ne s’appliquent qu’aux
récoltes de cette liste et ne reflètent pas les répartitions
régionales de ces espèces :
RRR : espèce très rare (seul un ou deux imagos observé (sur
10 ans) ;
R : = espèce rare, individus isolés, 3 à 10 exemplaires ;
C = espèce peu fréquente, moins de 20 ex. ;
CC = espèce présente mais peu commune, de 21 à 500 ex.
minimum :
CCC = espèce très fréquente et très commune, des centaines
et parfois des milliers d’exemplaires observés.

TROIS ESPÈCES REMARQUABLES
Gastropacha quercifolia L., la Feuille-morte du chêne
[Lasiocampidae] (Fig. 4).
La position du papillon au repos le rend homochrome dans
son environnement. Sa chenille vit essentiellement sur le
chêne, le prunellier, l'aubépine, les saules et fruitiers divers.
Il est très rare au Bois Robert. La photo représente un mâle
fraîchement éclos (Fig. 4).
Fig. 3. – Marcel GILLARD, devant le drap d’observation
nocturne. (Photo Michel ROUARD).

Les milieux prospectés étaient assez fermés (). Il n’y a
aucune agglomération à moins de 5 km, et aucune source
lumineuse à moins d’un km. Le relevé des Hétérocères est
le résultat d’environ 200 soirées d’observation. La
nomenclature de la liste est basée sur la Liste systématique
et synonymique des Lépidoptères de France, Belgique et de

1

Mélange composé de bière brune, (Chimay), miel, un peu
d’anisette, consistance pateuse, appliquée sur les troncs d’arbre.
62

Fig. 4. – Gastropacha quercifolia. (Source :
https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=810141).

La position du papillon au repos le rend homochrome dans
son environnement. Sa chenille vit essentiellement sur le
chêne, le prunellier, l'aubépine, les saules et fruitiers divers.
Il est très rare au Bois Robert. La photo représente un mâle
fraîchement éclos.
Saturnia pavonia L., le Petit paon de nuit [Saturniidae]
Espèce typique et assez fréquente des zones boisées, sa
découverte est toujours un régal pour les yeux. La femelle
(Fig. 5) émerge de son cocon déjà porteuse des oeufs, elle
attend patiemment la venue du mâle. La chenille est
polyphage.

l’étude de l’évolution des milieux naturels. Les
responsables de la gestion de ces milieux et de leur
aménagement sont demandeurs de tels inventaires, tant
botaniques que zoologiques.
Sur une liste de 438 espèces dressée durant dix ans et au
cours d’environ 200 séances d’observations, ce ne sont pas
moins de 25 espèces qui ont été définies ici comme rares.
Tant sur le plan régional qu’international, les espèces rares
représentent un grand intérêt pour l’étude des milieux
naturels, leur évolution et les éventuelles mesures à prendre
en considération afin de préserver les biotopes concernés.
Ce travail d’amateur est également l’illustration de l’intérêt
de représenter la contribution bénévole lorsque les
structures officielles, qui devraient avoir pour tâche de
réaliser de tels inventaires, n’ont que des moyens qui
semblent bien dérisoires.
Enfin, on peut regretter que les données concernant les
Microlépidoptères soient trop lacunaires, mais ce groupe
reste compliqué et d’approche difficile.
REMERCIEMENTS

Fig. 5. – Saturnia pavonia (femelle). (Photo : Marcel GILLARD).

Thecla betulae L., la Thécla du bouleau [Lycaenidae]

Nous tenons à remercier M. A. BARJASSE, chef du
cantonnement forestier de Chimay, ainsi que son personnel,
pour les autorisations et facilités accordées pour cette étude.
Merci aux amis qui ont précisé certaines déterminations :
A. DE TURCK, W. DE PRINS, CL. WARNOTTE, M. HOUYEZ,
R. SEILLER, V. CLAES. Amitiés particulières à F. CAMBIER
qui m’a si souvent accompagné et qui a réalisé des photos
de la plupart des espèces rencontrées. Nos remerciements
vont aussi à M. ORRU et M. MABILLE pour la relecture
attentive de la présente note.

Cette élégante espèce (Fig. 6) est rare au Bois Robert,
comme dans tout le pays, malgré sa large distribution
européenne. Sa chenille se nourrit sur divers Prunus (dont
le prunellier), les chênes, hêtre et bouleaux. Elle est
inféodée aux lisières et espaces plus ouverts que le coeur
des massifs forestiers.

BIBLIOGRAPHIE

Fig. 6. – Thecla betulae (femelle). (Photo Marianne MABILLE).

CONCLUSION
Il n’est pas habituel de dresser des listes en strict milieu
forestier. On sait pourtant l’importance des listes dans

CLAES V., ROUARD M. & GILLARD M., 1998. – Papillons
d’hiver
(Lépidoptères
remarquables
par
leur
dimorphisme sexuel et leur dispersion hivernale). Forêt
Wallonne 34 : 18-24.
COLLECTIF, 2003. – Aménagement de la série 1039.01 Bois
Robert, Document de travail interne. Ministère de la
Région Wallonne – Cantonnement de Chimay. 41 p. + 36
annexes.
GILLARD M., 1991. – Les papillons migrateurs en Belgique.
Insectes 83(4) : 21-22. Édition O.P.I.E.
LERAUT P., 1997. – Liste systématique et synonymique des
Lépidoptères de France, Belgique et Corse. 2ème édition.
Supplément Alexanor. Paris. 526 p.
NOIRFALISE A., 1984. – Forêts et stations forestières en
Belgique. Presses Agronomiques de Gembloux. 235 p.
ONCLINCX F. et al., 1987. – La carte des territoires
écologiques de la Wallonie. Rev. belg. Géogr., 111(1-2) :
51-59.
63

ANNEXE 1 : Liste des espèces observées
Leraut

Nom vernaculaire
HEPIALIDAE
la Sylvine
l’Hépiale du houblon
la Louvette
ADELIDAE

170
171
173

Triodia sylvina L.
Hepialus humuli L.
Korscheltellus lupulinus L.

188
189
190
203
204
215

Nematopogon metaxella Hb.
Nematopogon swammerdamella L.
l’Adèle de Swammerdam
Nematopogon robertella CL.
Adela reaumurella L.
l’Adèle verdoyante
Nemophora degeerella L.
Nemophora metallica Poda
l’Adèle de la scabieuse
PSYCHIDAE
Psyche casta Pallas
la Psyché lustrée
Sterrhopterix fusca Haw.
la Psyché hérissée
TINEIDAE
Morophaga choragella D. & S.
Nemapogon granella L.
Tinea trinotella Tnbg.
GRACILLARIIDAE
Gracillaria syringella F.
Phyllonorycter quercifoliella Z.
YPSOLOPHINAE
Ypsolopha dentella Lat.
l’Harpiptéryx harpon
PLUTELLINAE
Plutella xylostella L.
la Teigne du chou
YPONOMEUTINAE
Yponomeuta evonymella L.
l’Yponomeute du prunier
Yponomeuta padella L.
Yponomeuta cagnagella Hb.
l’Yponomeute parente
Yponomeuta sedella Tr.
l’Yponomeute de l’orpin
CHIMABACHIDAE
Diurnea fagella D. & S.
la Teigne du hêtre
OECOPHORINAE
Hofmannophila pseudospretella St.
COSSIDAE
Cossus cossus L.
le Cossus gâte-bois
Zeuzera pyrina L.
la Zeuzère du poirier
SESIIDAE
Pennisetia hylaeiformis Lasp.
la Sésie du framboisier
Sesia bembeciformis HB.
la Sésie du saule
Paranthrene tabaniformis Rott.
la Sésie asiliforme
Synanthedon vespiformis L.
ZYGAENIDAE
Zygaena filipendulae L.
la Zygène de la filipendule

281
311
322
364
406
460
502
600
626
691
692
694
698
1224
1248
1817
1823
1828
1831
1833
1840
1916

64

Nom scientifique

Fréquence
au Bois
Robert
CCC
CC
C
C
C
C
CC
CC
CC
C
C
C
R
R
R
C
C
C
C
C
C
CC
CC
C
R
C
CC
C
C
C
CC

1919

Apoda limacodes Hfn.

1934
1935
1946
1948
1950
2018
2075
2077
2139
2155
2250
2259
2321
2389
2402
2471
2482
2486

Pandemis corylana F.
Pandemis cerasana Hb.
Archips podana Scop.
Archips crataegana Hb.
Archips rosana L.
Cnephasia incertana Tr.
Agapeta hamana L.
Agapeta zoegana L.
Tortrix viridana L.
Acleris variegana D. & S.
Epiblema uddmanniana L.
Epiblema foenella L.
Spilonota ocellana D. & S.
Cydia triangulella Goeze.
Cydia pomonella L.
Bactra lancealana Hb.
Hedya nubiferana Haw.
Hedya salicella L

2579

Alucita grammodactyla Z.

2630
2647
2675
2676
2724
2726
2742
2758
2786
2789
2950
2958
2960
3033
2964
2966
2971
2977
2995
3033
3068
3070
3091

LIMACODIDAE
la Tortue
TORTRICIDAE
la Tordeuse du cerisier
la Tordeuse de l’osier

le Crampon
la Tordeuse du chêne
la Tordeuse de Solander

la Tordeuse grise des bourgeons

ALUCITIDAE
l’Orneïde de la scabieuse
PTEROPHORIDAE
Platyptilia gonodactyla D. & S.
Stenoptilia pelidnodactyla Steph.
Stenoptilia pterodactyla L.
le Ptérophore ptérodactyle
Pterophorus pentadactyla L.
le Ptérophore blanc
Emmelina monodactyla L.
PYRALIDAE
Hypsopygia costalis F.
Pyralis farinalis L.
Endotricha flammealis D. & S.
Phycita roborella D. & S.
Dioryctria abietella D. & S.
la Phycide du sapin
CRAMBIDAE
Chrysoteuchia culmella L.
Crambus lathoniellus Zincken
Crambus perlella Scop.
le Crambus perlé
Scoparia ambigualis Tr.
Agriphila tristella D. & S.
le Crambus des tiges
Agriphila inquinatella D. & S.
Agriphila straminella D. & S.
Catoptria permutatella H-S.
Catoptria falsella D. & S.
Scoparia ambigualis Tr.
Evergestis forficalis L.
la Pyrale fourchue
Evergestis pallidata Hfn.
Pyrausta aurata Scop.
la Pyrale de la menthe

C
C
CC
C
C
C
C
CC
C
CCC
C
C
C
C
C
CC
C
CC
C
C
C
C
CC
CC
C
CC
C
C
C
CC
C
CC
CC
C
C
C
C
CC
C
C
CC
CC
CC

3129
3131
3144
3146
3172
3191
3201
3203
3205
3209
3214
3215
3217
3220
3226
3229
3230
3233
3238
3240
3245
3247
3249
3258
3259
3269
3283
3285
3289
3298
3300
3305
3306
3309
3312
3322
3324
3327
3328

la Pyrale de l’ortie,
la Queue jaune
Phlyctaenia coronata Hfn.
la Pyrale du sureau
Udea ferrugalis Hbn.
la Pyrale ferrugineuse
Udea prunalis D.& S.
la Pyrale du prunellier
Nomophila noctuella D.& S.
la Pyrale hybride
Pleuroptya ruralis Scop.
la Pyrale campagnarde
LASIOCAMPIDAE
Trichiura crataegi L.
le Bombyx de l’aubépine
Poecilocampa populi L.
le Bombyx du peuplier
Eriogaster lanestris L.
le Bombyx laineux
Malacosoma neustria L.
la Livrée
Lasiocampa quercus L.
le Minime à bandes jaunes
Macrothylacia rubi L.
le Bombyx de la ronce
Dendrolimus pini L.
le Bombyx du pin
Euthrix potatoria L.
le Bombyx de la ronce
Gastropacha quercifolia L.
la Feuille-morte du chêne
ENDROMIDAE
Endromis versicolora L.
le Bombyx versicolore
SATURNIIDAE
Aglia tau L.
la Hachette
Saturnia pavonia L.
le Petit paon de nuit
SPHINGIDAE
Mimas tiliae L.
le Sphinx du tilleul
Laothoe populi L.
le Sphinx du peuplier
Sphinx pinastri L.
le Sphinx du pin
Hemaris fuciformis L.
le Sphinx gazé, le Sphinx du
chèvrefeuille
Macroglossum stellatarum L.
Le Moro-sphinx, le Sphinx colibri
Deilephila elpenor L.
le Grand sphinx de la vigne
Deilephila porcellus L.
le Petit sphinx de la vigne
HESPERIDAE
Pyrgus malvae L.
l’Hespérie de la mauve
Carterocephalus palaemon Pallas
Thymelicus sylvestris Poda
la Bande noire
Ochlodes venatus B. & G.
la Sylvaine
PAPILIONIDAE
Papilio machaon L.
le Machaon
PIERIDAE
Leptidea sinapis L.
la Piéride de la moutarde
Pieris brassicae L.
la Piéride du chou
Pieris rapae L.
la Piéride de la rave
Pieris napi L.
la Piéride du navet
Anthocaris cardamines L.
l’Aurore
Colias crocea Fourcroy
le Souci
Gonepteryx rhamni L.
le Citron
LYCAENIDAE
Thecia betulae L.
la Thécla du bouleau
Neozephyrus quercus L.
la Thécla du chêne
Eurrhypara hortulata L.

CC
CC
C
CC
CC
CCC
R
CCC
C
CCC
CC
CC
R
CCC
RRR
R
CC
CC
CC
CC
C
3
chenilles
CC
C
C
R
C
CC
CC
CC
R
CC
CCC
CC
CC
CC
CCC
R
C

3336
3338
3373
3390
3391
3403
3405
3408
3411
3446
3464
3466
3486
3490
3493
3494
3495
3497
3500
3501
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3531
3533
3536
3542
3546
3556
3561
3567
3570
3589
3629
3641
3645
3657

la Thécla de la ronce, l’Argus vert
l’Argus brun, l’Argus bronzé
l’Argus bleu, l’Argus d’Icare
NYMPHALIDAE
Pararge aegeria L.
le Tircis
Lasiommata megera L.
le Satyre, la Mégère
Coenonympha pamphilus L.
le Pamphile, le Procris
Pyronia tithonus L.
l’Amaryllis
Aphantopus hyperantus L.
le Tristan
Maniola jurtina L.
le Myrtil
Melanargia galathea L.
le Demi-deuil
Apatura iris L.
le Grand mars changeant
Argynnis paphia L.
le Tabac d’Espagne
Ladoga camilla L.
le Petit sylvain
Nymphalis polychloros L.
la Grande tortue
Inachis io L.
le Paon de jour
Vanessa atalanta L.
le Vulcain
Vanessa cardui L.
la Belle dame
Aglais urticae L.
la Petite tortue
Polygonia c-album L.
le Robert le diable
Araschnia levana L.
la Carte géographique
DREPANIDAE
Habrosyne pyritoides Hfn.
la Ratissée
Thyatira batis L.
le Batis
Tethea ocularis L.
l’Octogésine
Tethea or D. & S.
l’Or
Ochropacha duplaris L.
la Double ligne
Cymatophorina diluta D. & S.
la Diluée
Achlya flavicornis L.
la Flavicorne, la Bi-sulphurée
Polyploca ridens F.
la Rieuse
Drepana curvatula Bkh.
Drepana falcataria L.
la Faucille
Falcaria lacertinaria L.
le Lézard, la Lacertine
Cilix glaucata Scop.
la Petite épine
Watsonalla binaria Hfn.
le Hameçon
Sabra harpagula Esper.
le Harpon
GEOMETRIDAE
Alsophila aescularia D. & S.
la Phalène du marronnier
Geometra papilionaria L.
la Grande nayade
Hemithea aestivaria Hb.
Hemistola chrysoprasaria Esp.
la Phalène printanière
Cyclophora albipunctata Hfn.
la Phalène suspendue
Cyclophora punctaria L.
Timandra comae Schmidt.
le Talisman
Scopula immutata L.
Idaea biselata Hfn.
Idaea dimidiata Hfn.
la Phalène écussonnée
Idaea subscericeata Haw
Idaea aversata L.
l’Impolie
Callophrys rubi L.
Lycaena phlaeas L.
Polyommatus icarus Rott.

CC
CC
CC
CC
C
CC
CCC
CCC
CCC
C
CC
CC
CC
CC
CCC
CC
C
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CC
C
C
CC
C
C
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R
CC
C
C
C
C
C
CC
C
C
CC
C
CC

65

3691
3692
3694
3695
3698
3708
3709
3715
3723
3726
3732
3738
3742
3743
3745
3747
3748
3749
3753
3754
3757
3769
3771
3790
3793
3794
3795
3796
3797
3801
3804
3822
3824
3846
3852
3862
3863
3865
3866
3867
3891
3906
3907
3909
3921
3952
3955
3956
3961

66

Xanthorhoe biriviata Bkh.
Xanthorhoe designata Hfn.
Xanthorhoe spadicearia D. & S.
Xanthorhoe ferrugata Cl.
Xanthorhoe fluctuata L.
Epirrhoe alternata Müll.
Epirrhoe rivata Hb.
Camptogramma bilineata L.
Larentia clavaria Haw.
Anticlea badiata D. & S.
Cosmorhoe ocellata L.
Eulithis prunata L.
Eulithis pyraliata D. & S.
Ecliptopera silaceata D. & S.
Chloroclysta siterata Hb.
Chloroclysta citrata L.
Chloroclysta truncata Hfn.
Cidaria fulvata For.
Thera variata D. & S.
Thera britannica Tur.
Thera juniperata L.
Colostygia pectinataria Knoch.
Hydriomena furcata Thunb.
Euphyia unangulata Haw.
Epirrita dilutata D. & S.
Epirrita christyi Allen.
Epirrita autumnata Bkh.
Operophtera brumata L.
Operophtera fagata Scharf.
Perizoma alchemillata L.
Perizoma bifaciata Hw.
Eupithecia abietaria Goeze
Eupithecia linariata D. & S.
Eupithecia centaureata D. & S.
Eupithecia trisignaria H-S.
Eupithecia vulgata Haw.
Eupithecia tripunctaria H-S.
Eupithecia subfuscata Haw.
Eupithecia icterata Vill.
Eupithecia succenturiata L.
Eupithecia abbreviata Steph.
Gymnoscelis rufifasciata Haw.
Chloroclystis v-ata Hw.
Chloroclystis rectangulata L.
Chesias legatella D. & S.
Abraxas grossulariata L.
Ligdia adustata D. & S.
Lomaspilis marginata L.
Macaria alternata D. & S.

la Rouillée
la Phalène ondulée
l’Alternée
la Brocatelle d’or
la Larentie cloutée
la Cidarie baie
le Lynx, la Phalène ocellée
la Cidarie du prunier
la Cidarie pyrale
la Cidarie ochracée

la Cidarie roussâtre
la Cidarie fauve
la Géomètre variée

la Cidarie verdâtre
la Larentie lavée
la Larentie effacée

la Cheimatobie hyémale
la Phalène du hêtre

l’Eupithécie du sapin
l’Eupithécie de la centaurée

l’Eupithécie substituée

le V d’or
l’Eupithécie rectangulaire
la Phalène du genêt
la Zérène du groseillier
la Marginée

CC
CC
CC
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R
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C
C
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C
C
C
C
CC
CC
CC
C
CC
C
CC
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C
CCC
C

3963
3964
3969
3992
3993
3995
4000
4001
4005
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4020
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4024
4047
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4060
4064
4065
4070
4074
4080
4081
4088
4093
4141
4144
4145
4146
4148
4150
4152
4154
4155
4156
4157
4158

Macaria liturata Cl.
la Philobie effacée
Macaria wauaria L.
le Damas cendré
Chiasmia clathrata L.
la Géomètre à barreau
Opisthograptis luteolata L.
la Citronnelle rouillée
Epione repandaria Hfn.
Pseudopanthera macularia L.
la Panthère
Ennomos quercinaria Hfn.
l’Ennomos du chêne
Ennomos alniaria L.
l’Ennomos de l’aulne
Selenia dentaria Hb.
l’Ennomos illuminaire
Selenia lunularia Hb.
l’Ennomos lunaire
Selenia tetralunaria Hfn.
l’Ennomos illustre
Crocallis elinguaria L.
la Phalène de la viorne
Colotois pennaria L.
la Phalène emplumée
Angerona prunaria L.
la Phalène du prunier
Biston strataria Hfn.
la Phalène précoce
Biston betularia L.
la Phalène du bouleau
Phigalia pilosaria D. & S.
la Phalène velue
Apocheima hispidaria D. & S.
la Nyssie hispide
Erannis defoliaria Cl.
l’Hibernie défoliante
Agriopis leucophaearia D. & S.
l’Hibernie grisâtre
Larerannis aurantiaria Hbn.
l’Hibernie orangée
Larerannis marginaria F.
l’Hibernie hâtive
Lycia hirtaria Cl.
la Phalène hérissée
Peribatodes rhomboidaria D. & S.
la Boarmie rhomboidale
Peribatodes secundaria Esp.
Cleora cinctaria D. & S.
la Boarmie ceinte
Alcis repandata L.
la Phalène du charme
Hypomecis roboraria D. & S.
la Boarmie du chêne
Hypomecis punctinalis Scop.
Ectropis crepuscularia D. & S.
la Boarmie crépusculaire
Ematurga atomaria L.
la Phalène picotée
Bupalus piniaria L.
Cabera pusaria L.
la Virginale
Campaea margaritata L.
le Céladon, la perlée
Pungeleria capreolaria D. & S.
la Phalène du sapin
NOTODONTIDAE
Clostera curtula L.
la Hausse queue blanche,
le Costaud
Clostera pigra Hfn.
la Recluse
Gluphisia crenata Esp.
la Crénelée
Phalera bucephala L.
la Bucéphale
Peridea anceps Goeze
la Timide
Drymonia ruficornis Hfn.
la Demi lune noire
Drymonia obliterata Esper.
l’Ardoisée
Notodonta ziczac L.
le Bois veiné
Notodonta dromedarius L.
le Chameau
Notodonta torva Hb.
la Demi lune grise
Notodonta tritophus D. & S.
Pheosia gnoma F.
le Bombyx dictéoïde

C
CC
CC
CCC
C
CCC
C
CC
CC
C
C
CC
CCC
CC
CCC
CC
CCC
CC
CCC
CC
CCC
CCC
C
CC
CC
C
CC
CC
C
CC
C
C
CCC
CC
C
C
C
C
CC
CC
CC
C
CCC
CCC
C
C
CC

4159
4163
4164
4165
4169
4171
4172
4173
4174
4175
4180
4186
4187
4188
4190
4191
4193

Pheosia tremula Cl.
Pterostoma palpina Cl.
Ptilodon capucina L.
Ptilodon cucullina D. & S.
Stauropus fagi L.
Furcula bicuspis Bkh.
Furcula furcula Cl.
Furcula bifida Brahm.
Cerura vinula L.
Cerura erminea Esp.
Orgyia antiqua L.
Calliteara pudibunda L.
Euproctis chrysorrhoea L.
Euproctis similis Fuesly
Arctornis l-nigrum Müll.
Lymantria monacha L.
Lymantria dispar L.

4200
4203
4204
4205

Thumatha senex Hb.
Miltochrista miniata Forst.
Atolmis rubricollis L.
Cybosia mesomella L.

4206
4210
4217
4218
4230
4245
4250
4256

Pelosia muscerda Hfn.
Eilema griseola Hb.
Eilema complana L.
Eilema lurideola Z.
Arctia caja L.
Spilosoma lubricipeda L.
Phragmatobia fuliginosa L.
Tyria jacobaeae L.

4274
4279
4290
4299
4307
4325
4328
4330
4389
4390
4400
4402
4417
4425
4426
4428
4433

Herminia tarsicrinalis K.
Rivula sericealis SCOP.
Hypena proboscidalis L.
Scoliopteryx libatrix L.
Lygephila pastinum Tr.
Catocala sponsa L.
Catocala nupta L.
Catocala promissa D. & S.
Pseudoips prasinanus L.
Bena bicolorana Fuessly
Abrostola triplasia L.
Abrostola tripartita Hfn.
Diachrysia chrysitis L.
Autographa pulchrina Hw.
Autographa gamma L.
Plusia festucae L.
Colocasia coryli L.

la Porcelaine
le Museau
la Crête de coq
le Capuchon
l’Écureuil, le Bombyx du hêtre
la Harpye fourchue
la Queue fourchue
l’Hermine
le Bombyx antique, l’Étoilée
la Pudibonde
le Cul brun
le Cul doré, le Cul jaune
le L noir, le V noir
la Nonne
le Disparate
ARCTIIDAE
la Nudarie vieille
la Rosette
le Collier rouge, la Veuve
l’Éborine, la Lithosie à quatre
points
la Crotte de souris
le Manteau jaune
la Luthosie complanule
l’Écaille martre
l’Écaille tigrée
l’Écaille fuligineuse
l’Écaille du séneçon
NOCTUIDAE
la Soyeuse
la Noctuelle à museau
la Découpure
la Fiancée
la Mariée
la Promise
le Halias du hêtre
la Bicolore
la Noctuelle de l’ortie
le Vert doré
le V d’or
le Gamma, le Y d’argent
la Noctuelle du noisetier

C
CC
CC
CC
C
C
C
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RRR
R
C
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C
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C
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C
CCC
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C
CC
R
C
C
C
C
CC
CC
C
CC
C
CC

4435
4437
4438
4450
4451
4457
4459
4460
4461
4462
4472
4473
4475
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4483
4484
4485
4486
4489
4490
4491
4492
4494
4501
4502
4504
4516
4534
4538
4541
4549
4559
4563
4567
4568
4571
4601
4614
4635
4638
4655
4659
4660
4661
4682
4695
4705
4708

Panthea coenobita Esp.
Cryphia muralis Forster
Cryphia domestica Hfn.
Craniophora ligustri D. & S.
Viminia rumicis L.
Arctomyscis aceris L.
Triaena psi L.
Triaena tridens D. & S.
Triaena cuspis Hb.
Subacronicta megacephala D. & S.
Xanthia icteritia Hfn.
Xanthia togata Esp.
Xanthia aurago D. & S.
Omphaloscelis lunosa Haw.
Agrochola lychnidis D. & S.
Agrochola litura L.
Agrochola humilis D. & S.
Agrochola helvola L.
Agrochola pistacinoides Aub.
Agrochola macilenta Hb.
Agrochola lota Cl.
Agrochola circellaris Hfn.
Conistra erythrocephala D. & S.
Conistra rubiginea D. & S.
Conistra ligula Esp.
Conistra vaccinii L.
Eupsilia transversa Hfn.
Polymixis flavicincta D. & S.
Dichonia aprilina L.
Allophyes oxyacanthae L.
Xylocampa areola Esp.
Lithophane ornitopus Hfn.
Amphipyra tragopoginis Cl.
Amphipyra pyramidea L.
Brachionycha nubeculosa Esper
Brachionycha sphinx Hfn.
Diloba caeruleocephala L.
Shargacucullia scrophulariae D. & S.
Cucullia umbratica L.
Caradrina morpheus Hfn.
Paradrina clavipalpis Scop.
Hoplodrina ambigua D. & S.
Hoplodrina blanda D. & S.
Hoplodrina octogenaria Goeze.
Charanyca trigrammica Hfn.
Gortyna flavago D. & S.
Luperina testacea D. & S.
Mesapamea secalis L.
Mesoligia furuncula D. & S.

le Cénobite
la Perle
la Noctuelle du troène
la Noctuelle de l’oseille
la Noctuelle de l’érable
le Psi
le Trident
la Cuspide
la Mégacéphale
la Cidarie roussâtre
la Xanthie ochracée
la Fardée
la Cannelée

la Dorée, la Xanthie rufine
la Noctuelle décharnée
la Fauvette
l’Hyacinthe
l’Isolée
la Noctuelle de l’airelle, la lisse
la Noctuelle satellite
la Runique
la Noctuelle de l’aubépine
la Nébuleuse
la Triponctuée
la Noctuelle du noyer
la Noctuelle sphinx
le Double omega
la Noctuelle de la scrophulaire
l’Ombrageuse

l’Ambiguë
la Noctuelle du mouron
le Drap d’or
l’Avare, la Testacée
la Clignotante

CC
C
CC
CC
C
CC
C
C
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C
R
C
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CC
CCC
C
R
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CCC
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CC
CC
CC
C
C
CCC
C
CC
CC
C
CC
C
C
CC
C
CC
C
C
C
CCC
CC

67

4710
4711
4712
4713
4715
4716
4719
4720
4722
4729
4733
4735
4736
4739
4740
4745
4746
4747
4748
4756
4757
4766
4768
4776
4783
4787
4788
4792
4793
4798
4799
4800
4801
4802
4803
4805
4806
4808
4809
4811
4824
4825
4836
4837
4838
4839
4842
4844
4845

68

Oligia fasciuncula Haw.
Oligia latruncula Hb.
Oligia versicolor Bkh.
Oligia strigilis L.
Apamea ophiogramma Esp.
Apamea scolopacina Esp.
Apamea anceps D. & S.
Apamea illyria Fr.
Apamea remissa Hbn.
Apamea lateritia Hfn.
Apamea sublustris Esp.
Apamea lithoxylaea D. & S.
Apamea monoglypha Hfn.
Cosmia pyralina D. & S.
Cosmia trapezina L.
Parastichtis ypsillon D. & S.
Enargia paleacea Esp.
Ipimorpha subtusa D. & S.
Ipimorpha retusa L.
Phlogophora meticulosa L.
Euplexia lucipara L.
Rusina ferruginea Esp.
Mormo maura L.
Leucania comma L.
Pseudaletia unipuncta Hw.
Aletia pallens L.
Aletia impura Hb.
Aletia albipuncta D. & S.
Aletia ferrago F.
Orthosia gothica L.
Orthosia munda D. & S.
Orthosia incerta Hfn.
Orthosia cerasi F.
Orthosia gracilis D. & S.
Orthosia populeti F.
Orthosia miniosa D. & S.
Orthosia cruda D. & S.
Panolis flammea D. & S.
Tholera decimalis Poda
Cerapteryx graminis L.
Hadena confusa Hfn.
Hadena compta D. & S.
Aetheria bicolorata HFN.
Mamestra brassicae L.
Melanchra pisi L.
Melanchra persicariae L.
Lacanobia oleracea L.
Lacanobia suasa D. & S.
Lacanobia thalassina Hfn.

la Trompeuse, le Filou
la Ciselée

la Doucette
la Noctuelle radicée
le Trapèze
la Noctuelle paillée
la Soumise
la Noctuelle rétuse
la Méticuleuse
la Brillante
la Maure
le Comma blanc
la Noctuelle pâle
l’Impure
le Point blanc
l’Argentée
la Gothique
la Proprette
l’Inconstante, l’Incertaine
la Noctuelle constante
la Noctuelle grêle
la Téniocampe du peuplier
la Téniocampe peinte
la Téniocampe ambiguë
la Noctuelle des fourrages
la Noctuelle graminivore
la Noctuelle de l’œillet
la Noctuelle du chou
la Noctuelle du pois
la Polygonière
la Noctuelle des potagers
la Noctuelle enfumée
la Thalassine

CC
CC
C
CC
C
CC
C
C
C
R
C
CC
CCC
CC
CCC
C
CC
C
RRR
CCC
CC
C
R
CC
C
CC
CC
C
CC
CC
CC
CCC
CC
CCC
C
R
CCC
C
CC
CC
C
CC
CC
CCC
CC
CC
CC
C
CC

4846
4855
4864
4872
4873
4875
4878
4879
4884
4886
4887
4888
4895
4896
4899
4901
4910
4915
4916
4917
4918
4920
4921
4923
4951
4963
4966
4969
4972
4973
4975
4977
5005
5014

Lacanobia w-latinum Hfn.
Polia nebulosa Hfn.
Discestra trifolii Hfn.
Cerastis rubricosa D. & S.
Anaplectoides prasina D. & S.
Naenia typica L.
Xestia xanthographa D. & S.
Xestia sexstrigata Haw.
Xestia baja D. & S.
Xestia triangulum Hfn.
Xestia ditrapezium D. & S.
Xestia c-nigrum L.
Diarsia rubi Vieweg.
Diarsia brunnea D. & S.
Diarsia mendica F.
Lycophotia porphyrea D. & S.
Graphiphora augur F.
Noctua interjecta Hb.
Noctua janthe Bkh.
Noctua janthina D. & S.
Noctua comes Hb.
Noctua orbona Hfn.
Noctua pronuba L.
Noctua fimbriata Schr.
Ochropleura plecta L.
Axylia putris L.
Actinotia polyodon Cl.
Agrotis crassa Hbn.
Agrotis puta Hb.
Agrotis ipsilon Hfn.
Agrotis exclamationis L.
Agrotis segetum D. & S.
Pyrrhia umbra Hfn.
Panemeria tenebrata Scop.

la Brodée, la Noctuelle nébuleuse
la Noctuelle du trèfle
la Noctuelle verte
la Noctuelle typique
la Trimaculée
la Noctuelle baie
la Sérieuse, le Sigma
le C noir
la Noctuelle belle
le Point noir, la Noctuelle brune
la Noctuelle parée
l’Ondulée, la Noctuelle porphyre
l’Oméga, la Noctuelle augure

le Casque
la Suivante
le Hibou
la Frangée
le Cordon blanc
la Noctuelle putride

l’Élagueuse
la Noctuelle baignée
le Point d’exclamation
la Noctuelle des moissons
la Chrysographe

C
CC
C
C
CC
C
CCC
CC
C
C
CC
CCC
CC
CC
C
CC
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Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 69-82

Pelouses calcicoles et champignons : un duo improbable ?
Bernard CLESSE *

RÉSUMÉ
Les pelouses calcicoles, écosystèmes fortement étudiés et bien connus pour leurs richesses botaniques et entomologiques notamment,
recèlent de nombreuses espèces fongiques insoupçonnées car tout simplement trop peu recherchées par les mycologues qui préfèrent
généralement parcourir les milieux forestiers. Des espèces rares et parfois nouvelles pour la Région wallonne sinon pour la Belgique y
ont été découvertes. Outre les champignons observés dans les deux principaux types de pelouses calcicoles (mesobrometum et
xerobrometum) de Wallonie et en particulier de Calestienne, les champignons des milieux périphériques des pelouses sont également
abordés.

ABSTRACT

Calcicole lawns and mushrooms: an unlikely duo? Calcicole lawns and mushrooms: an unlikely duo? Calcicole lawns, ecosystems
strongly studied and well known for their botanical and entomological riches in particular, contain many unsuspected fungal species
under-researched by mycologists, who generally prefer to engage with forest environments. Rare and sometimes new species for the
Walloon Region, and maybe for Belgium, have been discovered. In addition to the fungi observed in the two main types of calcicole
lawns (mesobrometum and xerobrometum) of Wallonia and in particular of Calestienne, fungi from the peripheral lawn environments
are also addressed..

* rue du Bailli 3, B-5600 Fagnolle. Courriel : bernard.clesse@cercles-naturalistes.be
___________________________________________

INTRODUCTION
Les pelouses calcicoles sont caractérisées par des
conditions abiotiques sévères : sol superficiel, voire absent,
roche calcaire sous-jacente filtrante et donc rétention d’eau
quasi nulle, exposition chaude avec des températures qui
atteignent parfois les 60°C au sol sur les terrains pentus les
mieux orientés… Toutefois, malgré les exigences physiologiques des champignons, cet écosystème, aussi aride soitil, héberge de nombreuses espèces de champignons !

Roche à Lomme, Haute Roche…). Des incursions dans
d’autres pelouses calcicoles comme celle des Boussaires
dans la vallée de l’Eau d’Heure, celles de Champalle et de
Leffe dans les régions d’Yvoir et Dinant, celles de la
région de Han-sur-Lesse ou encore du Mont d’Haurs et de
la Roche à Wagne dans la pointe de Givet, m’ont
également permis d’affiner ma connaissance mycologique
de cet écosystème.

Bien que dispersées en Wallonie, de la Lorraine belge
(Torgny) à la frontière belgo-néerlandaise (MontagneSaint-Pierre), dans les vallées de la Meuse, de la Lesse et
de l’Ourthe, la majorité des pelouses calcicoles se localisent
en Calestienne, cette bande étroite qui borde la FagneFamenne au sud, depuis les « Monts de Baives » dans
l’Avesnois français (à l’ouest de Chimay) jusqu’à
Remouchamps en province de Liège.

Cet article n’a d’ailleurs pas la prétention de faire le tour de
la question mais constitue un premier inventaire de cette
mycoflore particulière. Les Dothidéomycètes, classe qui
regroupe un nombre important de minuscules ascomycètes
venant notamment sur tiges, feuilles et fruits, très présents
dans ces milieux, de même que les rouilles, les oïdiums
mériteraient des investigations poussées. C’est le cas aussi
des champignons hypogés (ceux qui se trouvent
uniquement dans le sol) dont les Gloméromycètes.

Outre la région de Han-sur-Lesse, c’est dans celle de
Nismes-Dourbes que se situent les principales pelouses
calcicoles en Belgique : la réserve naturelle domaniale du
Viroin (Roche Trouée, Fondry des Chiens, Abannets…)
ainsi que la Réserve naturelle agréée de Dourbes gérée
par l’association Ardenne & Gaume (Montagne-aux-Buis,

Même si l’on peut mettre en exergue l’une ou l’autre espèce
printanière ou estivale, la majorité des espèces fongiques
des pelouses calcicoles s’expriment (via leurs sporophores)
vers la fin octobre et, plus encore, en novembre, voire en
décembre et même janvier, tant que les gelées n’ont pas fait
table rase de tout ce joli monde.
69

En effet, la fin de l’automne et les hivers doux avec leurs
nuits fraîches, les précipitations plus ou moins abondantes,
les brouillards fréquents et la luminosité réduite apportent
ou maintiennent un taux d’humidité suffisant pour le
développement des champignons des pelouses.
Néanmoins, des printemps ou des étés pluvieux (ex. : été
2021 !), peuvent aussi offrir de belles opportunités aux
mycologues !
Dans la suite de cet article, les champignons ont été répartis
selon la classification « traditionnelle » présentée dans le
Guide des Champignons de France et d’Europe de
COURTECUISSE & DUHEM (1994), mais aussi et surtout, par
méso- et micro-écosystèmes, et non pas en suivant la
classification phylogénétique actuelle, bien moins intuitive
pour la plupart des naturalistes et mycologues amateurs. De
même, l’identification des champignons a été soutenue par
le guide d’EYSSARTIER & ROUX (2017). L’accent est mis
sur les deux écosystèmes principaux, à savoir :


la pelouse calcicole mésophile ou mesobrometum
développée sur plateau ou faible pente, en bas de
pente et sur sol d’une « certaine » épaisseur (et
donc avec une meilleure rétention d’eau)



la pelouse calcicole xérique ou xerobrometum, sur
pente généralement forte, à laquelle il faut ajouter la
pelouse à orpins, toutes deux se développant sur sols
nettement plus superficiels (Fig. 1) sinon absents,
avec affleurement de la roche calcaire par endroits.

buxaies) vont héberger des espèces bien particulières à
chaque fois.

CHAMPIGNONS DES PELOUSES CALCICOLES
MÉSOPHILES OU MESOBROMETUM
Dans cet habitat, caractérisé par une végétation herbacée
dont le recouvrement atteint généralement les 100%, les
Basidiomycètes, et les champignons à lames essentiellement, sont majoritaires dans les observations.
Les rouilles, champignons parasites des végétaux, vivant
sur un seul hôte (espèces autoxènes) ou sur plusieurs hôtes
successifs (espèces hétéroxènes), sont bien représentées ici,
sachant que, potentiellement, chaque espèce de plante à
fleurs peut avoir « sa » propre rouille. Des printemps et étés
humides ont notamment permis les observations de deux
rouilles autoxènes : Puccinia hysterium sur les feuilles de
Tragopogon pratensis (Salsifis des prés) et Puccinia allii
sur les pédoncules d’Allium oleraceum (Ail des champs).
Ces deux plantes-hôtes ne sont cependant pas
particulièrement inféodées au mesobrometum mais y sont
toutefois bien représentées.
Espèces souvent patrimoniales, indicatrices de prairies
maigres et pelouses non amendées, les hygrophores du
genre Hygrocybe peuvent être présents en nombre dans les
pelouses calcicoles mésophiles pour autant que la strate
herbacée ne soit pas trop haute, ce qui implique une gestion
de la pelouse (par pâturage ou fauchage).
Leur apparition automnale reste cependant très aléatoire.

Fig. 2. – Hygrocybe persistens.

Fig. 1. – Pelouse calcicole xérique.

Mais, une pelouse calcicole est rarement strictement
homogène sur toute sa surface, des microécosystèmes,
parfois temporaires, pouvant y apparaître, et elle subit
l’influence de la gestion et des écosystèmes périphériques.
Les petites genévrières, les pelouses riches en débris
ligneux (suite aux travaux de restauration dûs au projetLife, par exemple), les places à feux (légales ou non, mais
potentiellement riches en espèces carbonicoles), la
présence de lapins et/ou l’influence du pâturage avec les
espèces coprophiles dues aux fèces de ces mammifères, les
pelouses évoluant vers la fruticée, les écotones que
constituent ces zones de transition entre pelouses et
pinèdes, entre pelouses et chênaies-charmaies (voire
70

Caractérisés pour la plupart par des couleurs vives et une
écologie héliophile, ces magnifiques champignons restent
mystérieux quant à leur trophisme ; en effet, l’hypothèse
qu’il s’agirait de champignons endophytes (leur mycélium
présent dans les racines, tiges et feuilles des plantes y
établirait une relation symbiotique avec celles-ci) est à
l’étude.
Hygrocybe conica et H. pseudoconica sont deux
hygrophores très colorés, noircissants, au chapeau conique,
toxiques pour l’homme (le premier, plus grêle et plus petit,
étant un sosie du second). H. persistens (Fig. 2) et H.
konradii sont deux hygrophores jaunes à orangé rougeâtre,
peu visqueux et à chapeau conique qui se distinguent l’un
de l’autre essentiellement par la forme de leurs spores,
étranglées chez H. persistens et subglobuleuses chez H.

konradii. H. mucronella est un petit hygrophore rouge à
orangé, à chapeau gras et à chair nettement amère. H.
calciphila possède un chapeau rouge orangé finement
squamuleux et H. quieta présente un chapeau jaune vif à
jaune orangé, des lames jaune orangé à orange saumoné qui
dégagent une odeur typique de lessive, rappelant celle de
Lactarius quietus. H. fornicata, le plus rare apparemment,
exhibe, contrairement aux autres, un chapeau brun à brun
grisâtre voire blanchâtre, et il se confondrait facilement
avec des espèces des genres Tricholoma et Dermoloma.
Enfin, Cuphophyllus virgineus (s.l.) est un hygrophore
blanc à lames nettement décurrentes très fréquent.

problème ; par contre, la détermination des espèces est
beaucoup plus périlleuse, et le recours au microscope est
obligatoire particulièrement avec l’examen des cystides
(éléments stériles présents sur l’arête et la face des lames
mais aussi sur le pied) qui présentent généralement des
formes fusoïdes, en poils d’ortie ou en bouteille à long col,
garnis de cristaux réfléchis au sommet. Un spectacle de
toute beauté pour le microscopiste ! Trois espèces ont été
observées dans le mesobrometum : Melanoleuca friesii (=
M. albifolia), M. polioleuca et M. subpulverulenta.

Fréquent également (mais aussi dans d’autres milieux
prairiaux), Clitocybe rivulosa est une espèce toxique au
chapeau blanc givré, avec des taches ocre rosâtre sousjacentes et des lames adnées à légèrement pentues, ce qui
fait de lui un clitocybe assez original qu’il ne faut
absolument pas confondre avec le meunier, Clitopilus
prunulus, recherché pour sa comestibilité.

Fig. 4. – Marasmiellus tricolor.

Fig. 3. – Lepista tomentosa
Le genre Lepista se caractérise notamment par des spores
courtement épineuses, une sporée légèrement rosée et un
développement fréquent en rond de sorcières en raison de
son saprotrophisme. Deux espèces charnues ont été
rencontrées dans le mesobrometum : d’une part, Lepista
luscina, espèce peu courante au chapeau beige grisâtre à
brunâtre, plus ou moins guttulé au bord et aux lames beige
rosâtre, qui se confondrait assez facilement avec Clitocybe
nebularis, le clitocybe nébuleux, parfois présent dans le
même milieu, et d’autre part, une espèce rarissime
(nouvelle espèce pour la Belgique, obs. en 20151), Lepista
tomentosa (Fig. 3), au chapeau nettement veloutétomenteux.
Le genre Melanoleuca s’observe fréquemment dans les
pelouses calcicoles mésophiles comme dans bien d’autres
milieux. Une silhouette intermédiaire entre celle d’une
collybie et celle d’un tricholome, des lames souvent fort
blanches contrastant bien avec le pied et le chapeau
sombres, permettent d’arriver au genre sans trop de

Les marasmes, petites espèces saprophytes, aux lames
espacées voire très écartées, à pied assez coriace à
caoutchouteux, sont représentés ici par le bien connu et
comestible marasme des Oréades (Marasmius oreades) qui
s’étend en rond de sorcières, mais aussi par deux espèces
beaucoup plus discrètes, qui se développent sur les
chaumes et feuilles de poacées mortes : Marasmius curreyi,
rare et magnifique par ses couleurs ocre rosé à brunrougeâtre, et Crinipellis scabella, très fréquente et typique
en raison de la pilosité de son pied et de son chapeau,.
Citons encore cette petite espèce rare, observée lors du
printemps humide de 2018 et apparue en masse durant l’été
pluvieux de 2021 : Marasmiellus tricolor (Fig. 4). Tout
blanc, si ce n’est le pied qui a tendance à noircir à partir de
la base et parfois jusqu’à mi-hauteur, il pousse sur la terre
nue, dans des pelouses développées sur substrat calcaire ou
plus schisteux.
Espèces au pied grêle et fistuleux, le plus souvent à chapeau
« chinois » strié radialement, les mycènes sont
essentiellement représentées par trois espèces prairiales :
Mycena aetites, M. flavoalba et M. olivaceomarginata. La
première se distingue par ses lames grises et son odeur
raphanoïde (radis, pomme de terre crue), la seconde par ses
nuances jaune pâle, et la troisième par l’arête des lames

1 L’année d’observation est indiquée pour les espèces les plus
rares.

71

soulignée de brun olivacé. Proche du genre Mycena, le
genre Hemimycena différant du précédent généralement
par la couleur blanc pur du sporophore et une réaction
inamyloïde des spores. Dans les pelouses calcicoles
mésophiles, il est assez fréquent de rencontrer Hemimycena
mairei, hôte plus courant encore de nos pelouses
artificielles.
Avec son allure de mycène, Mycenella trachyspora (Fig. 5)
s’en distingue par ses spores fortement bosseléesverruqueuses. Cette espèce, nouvelle pour la Wallonie,
découverte à Nismes (obs. en 2014) a été revue à Dourbes
(obs. en 2017), également en mesobrometum.

Macrolepiota excoriata se caractérise par un anneau mince
et simple, un chapeau beige à crème ochracé dont le
revêtement s’excorie à partir de la marge.
Très voisins des lépiotes et également saprophytes, les
agarics sont ici aussi de la partie. Agaricus crocodilinus est
une très grande espèce (son chapeau pouvant dépasser les
20 cm de diamètre !), aux nombreux synonymes, à chair
jaunissant lentement et à odeur variable mais relativement
peu agréable. Toxique, A. xanthodermus possède une chair
jaunissant fortement et rapidement, un pied bulbeux à la
base, un chapeau très variable (blanc ou grisâtre, parfois
craquelé, même) mais souvent tronqué au disque et à odeur
d’encre ou de teinture d’iode.
Une sporée noire, un chapeau souvent déliquescent, une
écologie saprotrophe caractérisent les coprins au sens large.
Une espèce manifestement rare en Belgique, thermophile et
calcicole, s’observe occasionnellement dans les pelouses
mésophiles voire xérophiles : il s’agit de Coprinopsis
stangliana (Fig. 6), reconnaissable à ses sporophores isolés,
un chapeau gris-beige, couvert d’un abondant voile blanc
grisâtre se détachant par plaques et constitué d’hyphes
diverticulées.

Fig. 5. – Mycenella trachyspora

Espèce caractéristique des prairies maigres, Dermoloma
cuneifolium, a été observé à l’une ou l’autre reprise en
pelouse calcicole mésophile. Très semblable à Hygrocybe
fornicata, son odeur très farineuse (H. fornicata est
inodore) et le revêtement du chapeau souvent craquelé (de
type hyménodermique permettent de faire la différence.
Les lépiotes au sens large possèdent généralement une
sporée blanche, des lames libres, un chapeau souvent
écailleux et un voile partiel bien développé. Lepiota
oreadiformis est une petite lépiote toxique qui se reconnaît
à son chapeau beige ochracé à légèrement rosâtre, au disque
souvent plus sombre, et à ses spores fusiformes.
Leucoagaricus leucotithes, la lépiote pudique, espèce
moyennement charnue, pourrait faire penser à un agaric ou
à une amanite blanche, mais sa couleur blanc pur dans
toutes ses parties (y compris les lames), le chapeau lisse et
l’absence de volve et donc de voile général l’en distingue.
Loin d’être inféodée au mesobrometum, la lépiote pudique
abonde parfois dans les pelouses artificielles, prairies,
serres…
Avec leurs lames pseudocollariées et leur anneau
coulissant, les lépiotes du genre Macrolepiota sont
représentées ici essentiellement par Macrolepiota
fuliginosa (= M . procera var. fuliginosa) qui peut pulluler
lors de certains automnes humides et souvent loin de toute
ambiance forestière. Le diamètre impressionnant des
chapeaux (jusqu’à 30 cm voire plus) et l’abondance des
individus marquent généralement les observateurs et les
mycophages… Nettement plus rare et plus petite,
72

Fig. 6. – Coprinopsis stangliana

Rare en dehors des milieux boisés, Volvariella hypopithys
s’observe parfois dans les milieux herbeux. Reconnaissable
à son chapeau blanc fibrillo-soyeux, ses lames libres,
blanches puis roses, son pied blanc fortement pubescent,
sortant d’une volve lobée, blanche et soyeuse à l’extérieur.
À l’instar des hygrophores du genre Hygrocybe qui sont des
espèces indicatrices de prairies maigres et pelouses non
amendées, de nombreux entolomes, essentiellement du
sous-genre Leptonia et quelques espèces des sous-genres
Nolanea et Entoloma, peuvent apparaître en nombre dans

les pelouses calcicoles mésophiles et partager l’espace avec
les hygrophores précités. Certains de ces entolomes sont
remarquablement colorés ! Le plus beau étant probablement Entoloma incanum (Fig. 7), aux couleurs réellement
surprenantes sinon improbables pour un champignon :
chapeau vert, vert bleu à vert jaune puis brunâtre, pied vert
« fluo » à base teintée de bleu ; son odeur peu agréable
rappelle l'urine de souris.

Fort de plus de 2000 espèces en Europe, le genre
Cortinarius est strictement mycorhizien et lié aux arbres ;
on comprendra dès lors le nombre très restreint d’espèces
dans les pelouses dépourvues d’arbres. Cependant, une
espèce est à épingler, C. epsomiensis (Fig. 9) qui tisse une
relation symbiotique avec Helianthemum nummularium,
sous-arbrisseau rampant appartenant à la famille des
cistacées, très répandu dans ces milieux.

Fig. 7. – Entoloma incanum.

Plusieurs espèces de ce genre sont teintées de bleu au
niveau du chapeau et/ou du pied et/ou des lames : E.
carneogriseum possède une arête soulignée et un pied
fibrilleux. E. chalybaeum var. lazulinum possède également une arête soulignée mais un pied poli. Chez E.
atrocoeruleum, l’arête n’est pas soulignée, le chapeau est
très squamuleux-méchuleux et les cheilocystides (cystides
de l’arête des lames) sont absentes. E. corvinum présente
un contraste noir-bleuté (chapeau) et blanc (lames), une
arête non soulignée, un chapeau très squamuleuxméchuleux et des cheilocystides abondantes. E. mougeotii
var. mougeotii montre des tons bleus tant au niveau du
chapeau que du pied, une arête non soulignée, un chapeau
très squamuleux-méchuleux et des cheilocystides. Chez E.
incarnatofuscescens, les tons bleus ne concernent que le
pied, l’arête n’est pas soulignée, le chapeau est fibrilleux,
le pied poli, les boucles absentes au niveau des hyphes et
les cheilocystides sont absentes. E. prunuloides est une
espèce charnue, blanche à crème grisâtre, à saveur et odeur
farineuses. E. sericellum, par contre, est grêle avec un
chapeau blanc soyeux. E. neglectum (Fig. 8) est une espèce
rare, à silhouette omphaloïde, à saveur et odeur farineusesrances et chapeau zoné.
E. longistriatum var. longistriatum se reconnaît à son
chapeau fortement et longuement strié radialement, à
l’absence de tons bleus, à l’arête des lames légèrement
colorée et, au niveau microscopique, des cheilocystides non
capitées et sans boucles aux hyphes. Signalons E.
fuscohebes à silhouette mycénoïde et odeur d’huître, et E.
sericeoides à silhouette plus clitocyboïde, un pied
fibrilleux, une odeur faible et l’absence de boucles
hyméniales. E. sericeum f. cineroopacum ressemble assez
fort au précédent mais des boucles hyméniales sont
présentes, tandis que l’odeur et la saveur sont franchement
farineuses.

Fig. 8. – Entoloma neglectum.

Les strophaires et psilocybes se caractérisent par leur
sporée violacé noirâtre et leur mode de vie saprotrophe.
Dans les pelouses calcicoles mésophiles, il est assez
fréquent de découvrir les trois espèces suivantes :
Stropharia coronilla, espèce également fréquente dans
d’autres milieux prairiaux et caractérisée par son chapeau
ocre jaune et son anneau strié, S. caerulea, avec son
chapeau bleu verdâtre, un anneau fugace sur le pied et
l’arête des lames non givrée et, la plus rare des trois, S.
inuncta, caractérisée par un chapeau visqueux, brun
pourpre à brun lilas puis gris-beige à gris-jaune nuancé de
violet et un petit anneau plus ou moins persistant sur le pied
blanc.

Fig. 9. – Cortinarius epsomiensis.

73

L’observation de Deconica phillipsii, petit psilocybe au
pied quasi absent, est vraiment exceptionnelle dans le
milieu qui nous occupe, étant donné son habitat classique
dans les milieux humides ! Il faut dire que l’observation
d’un exemplaire sur une tige pourrie de Briza media avait
été faite en 2018 lors d’un printemps très pluvieux.
Quatre espèces du genre Agrocybe, genre saprotrophe
caractérisé par une sporée brune et une cuticule
hyménodermique (qui explique l’aspect souvent craquelécrevassé du chapeau), ont été repérées dans le
mesobrometum. Le plus petit mais le plus courant de tous
et fréquent également dans les pelouses artificielles et
autres endroits herbacés : A. pediades. Un peu moins
répandu, A. dura, est un agrocybe blanc à crème avec un
anneau fugace sur le pied. A. vervacti, observé en 2019, est
une espèce assez rare, à chapeau ridulé ou cabossé, jaune à
ocre jaune assez vif, avec des spores à pore germinatif peu
net ou absent, et des cheilocystides (cystides présentes sur
l’arête des lames) et pleurocystides (cystides présentes sur
les faces des lames) lagéniformes (en forme de bouteille à
long col) à sommet souvent capité. Le plus rare des quatre,
Agrocybe ochracea (Fig. 10), observé en 2019, possède des
spores avec un net pore germinatif, des cheilocystides
capitées et des pleurocystides lagéniformes à utriformes.

de nombreuses plages nues constituées de roche
affleurante, parfois recouverte par une mince couche
humifère, colonisée çà et là par des mousses thermoxérophiles.

Fig. 11. – Lycoperdon pratense. avec une coupe
longitudinale du sporophore qui montre un diaphragme
séparant de façon nette la base stérile du sporophore de la
partie fertile.

Ces conditions écologiques permettent l’installation
d’Ascomycètes dont quatre espèces muscicoles :
Octospora bryi-argentei, parasite de Bryum argenteum
(obs. en 2015), O. coccinea (Fig. 13), parasite de Barbula
unguiculata et Encalypta vulgaris entre autres (obs. en
2013, 2015-2016), O. neglecta, parasite d’Orthotrichum
sp. (obs. en 2015-2016), et O. gemmicola, parasite de
Bryum sp. (obs. en 2020).

Fig. 10. – Agrocybe ochracea.

Enfin, signalons deux espèces de Gastéromycètes,
basidiomycètes dont les sporophores se présentent sous
forme d’une poche (« gaster » = estomac), la plus
caractéristique et la plus omniprésente étant Lycoperdon
pratense (= Vascellum pratense) (Fig.11). Nettement plus
rare, Calvatia utriformis est une espèce des pelouses
xérothermophiles, de grande taille (jusqu’à 10 cm de
hauteur et 15 cm de largeur), à péridium blanc à gris
brunâtre, presque lisse puis se crevassant de façon
polygonale.

CHAMPIGNONS DES PELOUSES CALCICOLES
XÉROPHILES (XEROBROMETUM)
À la différence du mesobrometum, le xerobrometum et les
pelouses à orpins sur dalles rocheuses (Fig. 12) présentent
74

Fig. 12. – Xerobrometum au Centre de Physique du Globe à
Dourbes.

Sur la terre nue d’une pelouse installée sur calcaire/arène
dolomitique, signalons une unique observation, en 2018, de
Scutellinia barlae, bel ascomycète à hyménium rouge, à
marge courtement poilue et aux spores globuleuses ornées
de verrues arrondies à tronquées. Le genre mycorhizien
Geopora possède des apothécies semi-hypogées. Outre G.
sumneriana inféodé au cèdre, la détermination exacte au
niveau spécifique nécessiterait le recours aux analyses
moléculaires.

montre une préférence pour les mousses pleurocarpes ; on
la rencontre dans de nombreux milieux ouverts colonisés
par les mousses. La seconde, qui est stipitée et à chapeau
spatulé, est présente essentiellement où croît Syntrichia
ruralis (s.l.), mousse acrocarpe thermophile.
Pseudoclitocybe obbata, espèce très semblable à
Pseudoclitocybe cyathiformis mais de plus petite taille,
avec un chapeau moins infundibuliforme et une écologie
liée aux prairies sèches sur calcaire, a notamment été
observé dans des pelouses calcicoles xérophiles (obs. en
2020).

Fig. 13. – Octospora coccinea.

Quatre espèces, identifiées sur base des seuls critères
macroscopiques et microscopiques, ont néanmoins été
distinguées en hiver sur des pelouses calcicoles, leurs
apothécies prenant place sur des sols très superficiels de
type rendzine : Geopora arenicola et son parasite
Melanospora brevirostris observé en 2017, G. arenosa en
2016, G. foliacea en 2020 et G. nicaeensis (Fig. 14) en
2012-2014, qui serait une nouvelle espèce pour la
Belgique.

Nouveau pour la Belgique (2014, revu le 12/07/2021),
Infundibulicybe glareosa est un clitocybe roux,
caractéristique des glariers2 et des pelouses sèches.
Une silhouette clitocyboïde et une petite taille caractérisent
les omphales qui fréquentent aussi ces milieux xérophiles.
Trois taxons y ont été découverts : Omphalina galericolor,
O. galericolor var. lilacinicolor et O. pyxidata. Sur les
pentes fortes et rocheuses exposées au sud, des microterrasses couvertes de rendzine et colonisées notamment
par des mousses et des petites plantes à fleurs annuelles
xérophiles (e. a. Saxifraga tridactylites, Minuartia hybrida,
Arenaria serpyllifolia, Erophila verna, Cerastium div. sp.)
constituent l’habitat privilégié de ces petits champignons.
La mycène probablement la plus caractéristique du
xerobrometum est Mycena atropapillata (Fig. 15).
Reconnaissable à son mamelon (« papille ») noirâtre et à
son pied nettement radicant, observable en fin d’automne,
elle passe malgré tout très souvent inaperçue vu sa petite
taille. M. olivaceomarginata se rencontre dans le
mesobrometum mais aussi dans les pelouses xériques en
prenant parfois des couleurs surprenantes comme chez M.
olivaceomarginata f. thymicola (obs. en 2019).
M. pseudopicta, espèce rare, au chapeau brun, aux lames
grises et décurrentes, à arête blanche et aux basides
bisporiques, a été rencontrée une seule fois dans une micropelouse xérique sur calcschiste, en compagnie de la mousse
Syntrichia ruralis s.l.

Fig. 14. – Geopora nicaeensis.

Sclerotinia trifoliorum (obs. en 2018-2020) est un très petit
ascomycète stipité entièrement brun, parasite de Fabacées.
Le pied prend naissance sur de petits sclérotes eux-mêmes
fixés sur les racines de Fabacées telles Medicago lupulina,
Lotus corniculatus et Anthyllis vulneraria.
Quant aux Basidiomycètes observés dans les pelouses
calcicoles xérophiles, ils sont, comme pour l’autre type de
pelouse, nombreux et diversifiés.
P. laguncularis (Fig. 16) a été observé dans un
xerobrometum (obs. en 2011), il s’agit de toute évidence
d’une espèce fort rare.
Arrhenia retiruga et A. spathulata sont deux petites espèces
parasites de mousses. La première est dépourvue de pied et
2 Les

glariers sont des lits de graviers calcaires bordant les torrents
de montagne et progressivement stabilisés et colonisés par des

M. winterhoffii, pour la Belgique (CLESSE, 2018) et dont
c’est peut-être la seconde récolte européenne après sa
découverte par le mycologue Maas GEESTERANUS en
Allemagne en 1991, est une espèce macroscopiquement
très peu remarquable par rapport à d’autres mycènes ;
l’écologie, le pied pruineux, les caulocystides (cystides
présentes sur le pied) et les cheilocystides, légèrement
clavées et fortement diverticulées, sont, par contre, des
critères discriminants importants.
Actuellement intégré dans la famille des Tricholomataceae,
le genre Pseudobaeospora est un genre méconnu.
P. laguncularis (Fig. 16) a été observé dans un
xerobrometum (obs. en 2011), il s’agit de toute évidence
d’une espèce fort rare.
plantes des pelouses sèches, en fonction de leur substrat très
drainant.

75

Trois lépiotes vénéneuses ont été rencontrées dans cet
habitat xérique. Lepiota subincarnata, espèce mortelle, est
caractérisée par un chapeau plus ou moins lisse ou couvert
de fines écailles, brun rose à rosâtre ochracé, un pied

possède un chapeau ombiliqué brun ochracé à jaunâtre,
finement squamuleux, à ombilic plus sombre. E.

Fig. 16. – Pseudobaeospora laguncularis.

guirlandé de squamules concolores au chapeau et une odeur
assez forte de mandarine au niveau des lames. Le chapeau
de L. erminea est quasi lisse, entièrement blanc ou crème
ochracé au disque ; son pied est guirlandé d’un voile blanc
abondant. L. coloratipes est la plus petite des trois et la plus
rare (obs. en 2020) : son chapeau de 5-30 mm de diamètre,
blanchâtre à crème ochracé au disque et son pied blanc
crème, pourpre vineux à la base, portant un anneau fugace
sont de bons critères distinctifs.
Chez les champignons à sporée brun-noir à noire, citons
deux espèces assez rares du xerobrometum déjà notées ?
observées dans le mesobrometum : Coprinopsis stangliana
et Agrocybe vervacti. Par contre, Psathyrella calcarea (Fig.
17) est d’observation toute récente (2020) ; outre la
microscopie (notamment ses grandes spores noires dans le
KOH), la petite taille de son chapeau (1 cm de diamètre
maximum) et l’habitat exclusivement xérophile et calcicole
sont des éléments fondamentaux à prendre en compte ; il
s’agit très vraisemblablement d’une espèce nouvelle pour
la Belgique et cette découverte fera l’objet d’une
publication. Une autre psathyrelle intéressante, P.
panaeoloides, a été trouvée en pelouse xérique : elle
présente des spores plus petites et subtriangulaires vues de
face .
Comme pour le mesobrometum, plusieurs entolomes
fréquentent aussi le xerobrometum. Entoloma excentricum
est une espèce plutôt rare, de couleur blanchâtre, à
silhouette tricholomoïde et à cheilocystides proéminentes,
lagéno-fusiformes et à bec souvent plusieurs fois étranglé.
Nous avons déjà évoqué dans le mesobrometum E.
fuscohebes, à odeur d’huître ou d’huile de poisson, à
silhouette mycénoïde et de couleur brune, qu’on retrouve
aussi dans des habitats plus xériques, mais on y rencontre
aussi l’espèce voisine E. kuehnerianum qui s’en différencie
par un habitat plus ouvert encore et par une arête des lames
complètement stérile (et donc constituée de cheilocystides).
E. papillatum, avec son chapeau brun, mamelonné-papillé,
ressemble aux deux précédents mais son odeur est plus
farineuse et l’arête est dépourvue de cheilocystides. E. exile
76

Fig. 17. – Psathyrella calcarea.

brunneoserrulatum possède également un chapeau
ombiliqué mais brun sombre et fortement strié radialement
ainsi qu’une arête des lames sombre. E. turci se caractérise
par un chapeau faiblement ombiliqué, feutré, brun sombre,
des lames blanchâtres à brunâtres, à arête concolore ou
brunâtre devenant, comme la chair du pied, lentement rose
rougeâtre à la blessure. Sosie du précédent mais à spores
plus grandes, E. pseudoturci possède une arête des lames
généralement concolore, un chapeau plus fortement
squamuleux-méchuleux, un pied souvent comprimé
latéralement et sans rougissement. E. fridolfingense est
probablement une espèce très rare (obs. en 2014) : sa
silhouette clitocyboïde, son pied lisse, poli, les hyphes de
la cuticule à pigment intracellulaire, les basides
tétrasporiques, des cheilocystides présentes et une odeur
subfarineuse devraient aider à le reconnaître.
Avec sa sporée rose, comme les entolomes, Clitopilus
scyphoides est un petit clitopile terricole, à chapeau blanc
soyeux, à lames décurrentes, blanches puis rosâtres, à pied
± excentré à central et à odeur légèrement farineuse. On
peut le rencontrer occasionnellement en bordure de chemin
forestier en région calcaire ainsi qu’en milieu beaucoup
plus ouvert comme les pelouses xériques lors d’automnes
très humides.
Petites espèces brun-jaune à brun orangé, à silhouette
souvent mycénoïde, à sporée brune à rouillée, les galères et
conocybes sont généralement très semblables quoique les
galères, qui sont généralement liées à des pelouses bryolichéniques, soient souvent plus nettement striées
radialement sur le chapeau. Chez les premières, la cuticule
n’est jamais hyménodermique alors qu’elle l’est
systématiquement chez les conocybes. On reconnaîtra
Galerina uncialis à son pied brun ochracé, guirlandé de
blanchâtre, sous un anneau plus ou moins fugace. Les deux

autres galères se ressemblent très fort mais G. graminea
présente des cystides capitées (terminées en tête ±
sphérique) alors qu’elles ne le sont pas chez G. vittiformis.
Romagnesiella clavus (Fig. 18) – qui appartient à un genre
récemment créé, voisin du genre Galerina – a été observée
à Dourbes en 2019. Vraisemblablement très rare en
Belgique (ou, peut-être, restée inaperçue ?), cette petite
espèce possède un chapeau feutré-sablé et non strié, des
spores lisses sans pore germinatif, des cheilocystides et
pleurocystides cylindriques à lagéniformes-cylindriques.

et cerné de brun rouillé. T. squamosum (Fig. 19) est
nettement plus rare (obs. en 2013-2015) et son ostiole n’est
pas cerné de brun.

Fig. 18. – Romagnesiella clavus.

Fig. 20. – Geastrum floriforme.

Seul conocybe noté dans un xerobrometum de la région,
Conocybe semiglobata var. campanulata présente
notamment les caractères suivants : pied longuement
pruineux, bulbilleux à la base, sans pseudorrhize, cystides
lécythiformes (capitées et en forme de carafes), basides
tétrasporiques, spores ellipsoïdes.

Enfin, signalons Cyathus olla, Nidulariaceae très fréquente
dans le xerobrometum, se nourrissant de débris végétaux et
parfois d’excréments, comme les crottes de mouton, déjà
bien décomposés, à l’exopéridium en forme de coupe très
évasée, gris plombé à l’intérieur et remplie de péridioles de
belle taille, qui contiennent les spores du basidiomycète.

Deux géastres ont été recensés dans le même milieu :
Geastrum corollinum, au péristome déterminé et dont
l’exopéridium est hygroscopique et constitué à maturité de
7-10 lanières et G. floriforme (Fig. 20), au péristome non
déterminé et à exopéridium hygroscopique à 6-11 lanières.

LES GENÉVRIÈRES
Juniperus communis, le genévrier commun, trouve dans les
pelouses calcaires un de ses milieux les plus favorables,
bien que sa régénération y semble de plus en plus
compromise. Par pieds isolés ou formant, ici et là, de belles
genévrières (Dourbes, Furfooz, Resteigne…), ce conifère
protégé peut apporter un lot d’espèces originales.
Rouille hétéroxène, passant sur le genévrier commun mais
aussi sur les aubépines et autres Malacées, Gymnosporangium clavariiforme, forme des cornicules printaniers
de couleur jaune orangé qui attirent le regard des
observateurs. La présence du parasite se manifeste aussi par
le gonflement des branches à l’endroit où se développent
les cornicules.
Fig. 19. – Tulostoma squamosum.

Quelques gastéromycètes fréquentent aussi ces milieux
xériques. Les tulostomes ressemblent à de petites vessesde-loup posées au sommet d’un long pied ; le plus courant
est incontestablement Tulostoma brumale, avec son
péristome (partie entourant l’ouverture ou ostiole) projeté

Les aiguilles mortes intéressent quant à elles Hemimycena
lactea var. lactea (Fig. 21) (obs. en 2016), splendide
mycène complètement blanche à chapeau pointu qui se
développe sur litière d’aiguilles (et pas que de genévrier
d’ailleurs mais surtout de pins, d’épicéas…) ainsi que
Lophodermium juniperi (obs. en 2021), qui apparaît sur
77

aiguilles mortes éventuellement encore attachées aux
branches.
Une autre petite mycène corticole à chapeau sphérique,
Mycena juniperina, est inféodée au genévrier commun.
C’est une espèce méditerranéenne, non signalée chez nous,
mais elle est à rechercher activement en fin d’automne
humide !

de nombreuses souches ont été colonisées par les
champignons et notamment par Lenzites betulina (Fig. 23)
(qui, en dépit de son nom, est loin d’être exclusif du
bouleau), dans une moindre mesure par Panus conchatus
et, beaucoup plus rarement encore, par le splendide et
vernissé Ganoderma lucidum.

PELOUSES RESTAURÉES (AVEC SOUCHES
POURRISSANTES ET DÉBRIS LIGNEUX ±
BROYÉS)

De nombreuses parcelles boisées de pins (pins sylvestres et
pins noirs d’Autriche) ont également été sacrifiées dans le
cadre de ces projets LIFE. Les souches de ces conifères
autrefois plantés pour fournir du bois de mine ont, elles
aussi, permis de réaliser de belles observations fongiques :
Neolentinus lepideus, Pluteus pouzarianus, Pluteus

Fig. 21. – Hemimycena lactea var. lactea.

Fig. 22. – Melastiza cornubiensis.

Les travaux de restauration menés dans les pelouses
calcicoles, notamment à l’occasion de projets LIFE
européens, impliquent souvent d’éliminer arbres (résineux
et feuillus) et arbustes afin de dégager un espace pour
reconstituer le microclimat nécessaire aux plantes
herbacées héliophiles et thermo-xérophiles des pelouses.
Ce faisant, de nombreux débris ligneux, résultant souvent
de broyage sur place, jonchent le sol pendant de
nombreuses années avant d’être complètement transformés
en humus. Cette dégradation très lente du bois est à mettre
en rapport avec les conditions édapho-climatiques des
lieux, contrariant l’activité lignivore fongique. Ainsi, un
tronc ou une branche posée au sol dans un environnement
humide ou à l’ombre se dégradera beaucoup plus vite qu’en
pleine lumière et, qui plus est, sur un substrat géologique
très drainant, un sol superficiel et une exposition
méridionale).

atromarginatus, Tapinella atrotomentosa,… Bien entendu,
ces espèces ne se maintiennent que tant qu’il y a du bois à
dégrader. Une pelouse « normalement équilibrée » en est
totalement dépourvue.

Sur ces maigres sols mêlés de débris de bois en
décomposition, les espèces saprotrophes lignicoles
suivantes ont été observées : Melastiza cornubiensis (Fig.
22) et Peziza vesiculosa, parmi les Ascomycètes,
Marasmius rotula, Gymnopus ocior, Parasola auricoma,
Coprinellus xanthothrix, Pluteus romellii et, même,
Volvopluteus gloiocephalus (qui n’est pas en soi lignicole),
pour les Basidiomycètes.
Le chêne étant l’essence feuillue dominante en fin de
processus dynamique de la végétation après l’abandon des
pelouses (pelouse abandonnée  friche herbeuse 
pelouse embroussaillée  fruticée  chênaie secondaire),
78

SUR LES PLACES À FEU
Les travaux de restauration menés dans les pelouses
calcicoles nécessitent parfois (ou ont nécessité) de brûler
des branches et autres débris de bois. Parallèlement à cela,
il arrive fréquemment de découvrir des traces de feux
« sauvages », allumés par des promeneurs ou des

Fig. 23. – Lenzites betulina.

bivouaqueurs. Licites ou non, ces places à feu recèlent
potentiellement des dizaines d’espèces carbonicoles, dont

certaines sont menacées de disparition étant donné la
régression des places à feux.
Petit paradis pour les ascomycètes, ce microhabitat a
permis d’observer : Jugulospora rotula (obs. en 2020),
Anthracobia melaloma, Anthracobia tristis, Peziza
echinospora, Peziza tenacella, Peziza petersii, Ascobolus
carbonarius, Geopyxis carbonaria (obs. en 2019) ainsi que
Neottiella hetieri (petit ascomycète à hyménium orangé
venant sur mousses pyrophiles telle Funaria
hygrometrica).

2020) et les basidiomycètes coprophiles Coprinopsis nivea,
C. pseudonivea, Deconica coprophila (Fig. 25), Bolbitius
titubans, Panaeolus fimicola et P. papilionaceus ont été
recensés. Néanmoins, la relative pauvreté en espèces
coprophiles dans les pelouses pâturées pose question en
raison de la quantité parfois énorme d’excréments de
moutons : les traitements prophylactiques pour le bétail
seraient-ils en cause?

Fig. 25. – Deconica coprophila.
Fig. 24. Faerberia carbonaria.

Parmi les basidiomycètes, l’espèce carbonicole la plus
emblématique
est
vraisemblablement
Faerberia
carbonaria (Fig. 24), dont les observations se sont très
fortement raréfiées ces dernières décennies. Les trois
espèces carbonicoles du genre Lyophyllum ont également
été recensées : L. anthracophilum, L. atratum, L.
ambustum. Enfin, signalons encore la présence de Pholiota
highlandensis dans ce milieu.

Devenus rares dans pas mal d’endroits en raison de la
myxomatose, les lapins de garenne sont des hôtes naturels
des pelouses calcicoles et de leurs fruticées périphériques
(utiles pour abriter leur garenne). L’ascomycète
Iodophanus carneus (Fig. 26) a été noté sur crottes de lapin
(obs. en 2019).

Ces quelques espèces liées au charbon de bois ou aux
mousses pyrophiles des places à feux ne constituent qu’un
pâle reflet des potentialités de ce microhabitat qui compte
potentiellement plusieurs dizaines d’espèces ! Insistons
aussi sur le caractère très éphémère de ce biotope et donc
des espèces qui en dépendent. En effet, trois ans après le
feu, il ne reste généralement plus rien à dégrader tandis que
la végétation périphérique a généralement recolonisé en
grande partie la place à feu.

CHAMPIGNONS LIÉS AUX CROTTES DE
MOUTON OU DE LAPIN
Il n’est pas inutile de rappeler que les pelouses calcicoles
sont nées à la suite des activités agro-pastorales, remontant
souvent à de nombreux siècles, voire à des milliers
d’années. Le pâturage ovin (et, dans une moindre mesure,
caprin) a été remis à l’honneur au début des années 2000
pour tenter de conserver à long terme ces joyaux de
biodiversité. Dès lors, qui dit pâturage, dit crottes et qui dit
crottes, dit champignons coprophiles. Sur crottes de
moutons, l’ascomycète Coprotus leucopocillum (obs. en

Fig. 26. – Iodophanus carneus.

Bien entendu, il y aurait fort à faire dans ce milieu pour
inventorier les nombreuses espèces coprophiles potentielles vu les nombreux mammifères qui fréquentent les
pelouses : renard, mustélidés, petits rongeurs, chevreuil,
sanglier, etc.

79

EN BORDURE DE FRUTICÉE
Pour rappel, la fruticée est le stade arbustif, souvent dense
et épineux (prunelliers, aubépines, rosiers sauvages, troène,
cornouillers, nerprun, viorne mancienne…) qui succède à
la friche embroussaillée, elle-même consécutive à
l’abandon du pâturage ou d’autres pratiques agropastorales au niveau des pelouses calcicoles.
À l’intérieur de la fruticée ou en périphérie de celle-ci,
quatre espèces printanières peuvent faire leur apparition :
Calocybe gambosa, le bien connu tricholome de la SaintGeorges ou mousseron, qui fait le régal des mycophages,
est relativement répandu, Tubaria dispersa, aux lames
jaunâtres et lié à la litière de feuilles d’aubépines, mais
aussi deux espèces nettement moins fréquentes et même
très rares : Verpa conica (Fig. 27) et Entoloma clypeatum,
ce dernier étant mycorhizien des aubépines plus

psammopus (obs. en 2017), T. pessundatum, T. stans, T.
terreum. Les russules et les lactaires sont aussi à la fête dans
ces milieux, avec Russula torulosa, R. turci, et ces trois
lactaires comestibles, Lactarius deliciosus, L. sanguifluus,
L. semisanguifluus, au lait respectivement orange de façon
immuable, de suite rouge vineux, orange puis devenant
rouge vineux. Trois bolétales peuvent aussi être citées ici :
Chroogomphus rutilus, Suillus collinitus et S. granulatus.
Phellodon niger, le curieux hydne noir, y montre également
ses plus belles stations.

Fig. 28. – Tricholoma batschii.

En ce qui concerne les espèces saprotrophes, citons
Clitocybe lituus, espèce peu banale, aux basides
bisporiques, qui apparaît souvent en novembre.

Fig. 27. – Verpa conica.

particulièrement. Par contre, Rhodocybe gemina, présent
occasionnellement en fruticée est plus tardif (fin de l’été
jusque fin de l’automne).

EN LISIÈRE DES PINÈDES
L’enrésinement de nombreuses pelouses en pins noirs
d’Autriche et en pins sylvestres, à la fin du 19ème et au début
du 20ème siècle, visait la production de bois de mine
(étançonnage des galeries des charbonnages) et la
rentabilisation de ces terres devenues « vaines et vagues »
à la suite de la disparition progressive du pâturage dans les
pelouses calcicoles. Ces peuplements de pins ont
profondément modifié les paysages régionaux et l’écologie
de ces milieux.
Les pins étant des essences hypermycorhizogènes, on doit
s’attendre à de nombreuses observations fongiques et plus
particulièrement dans les pelouses contiguës aux pinèdes
où les sporophores peuvent se développer de manière plus
optimale (les sous-bois étant parfois complètement
« saturés » de ronces et autres espèces de la fruticée). C’est
en automne et souvent en automne tardif, en lisière de
pinède ou au pied des pins disséminés dans les pelouses,
que les poussées fongiques sont les plus intéressantes avec
de nombreuses espèces de tricholomes notamment :
Tricholoma batschii (Fig. 28), T. albobrunneum, T.
80

Parmi les espèces printanières, signalons tout
particulièrement une helvelle mycorhizienne semihypogée, Helvella leucomelaena, et Strobilurus tenacellus, espèce saprotrophe et strobilicole, exclusive des
cônes pourrissants et semi-enterrés de pins.

EN LISIÈRE DE CHÊNAIE-CHARMAIE(BUXAIE) CALCICOLE
Dans toute cette dynamique de la végétation évoquée dans
le cadre des pelouses calcicoles, la chênaie-charmaie
calcicole ou la chênaie-charmaie-buxaie calcicole constitue
le stade succédant à la fruticée ; ces stades forestiers sont
donc des forêts « secondaires » par rapport à la forêt
primaire (la hêtraie calcicole en l’occurrence) qui était
présente en Calestienne bien avant l’apparition des
premières pelouses calcicoles.
Il est donc logique de trouver, en maints endroits, des zones
de transition entre pelouse calcicole et chênaie-charmaie
calcicole. Comme on l’a vu ci-avant, ces zones de transition
entre pelouse calcicole et fruticée-pinède et maintenant
chênaie-charmaie-buxaie, forment de véritables écotones
d’une incroyable diversité fongique !
De très nombreuses espèces mycorhiziennes liées aux
chênes, aux charmes, ou aux deux, s’y observent, et
notamment (liste très partielle !) : Tricholoma arbustivus,
Amanita praelongipes, Hebeloma laterinum, Inocybe
corydalina, I. fraudans, I. incarnata, Cortinarius infractus,

C. nanceiensis, C. terpsichores, Russula chloroides,
Russula decipiens, Lactarius acerrimus, L. azonites,
Suillellus luridus (= Boletus luridus), Suillellus luridus var.
queletiformis, Rubroboletus satanas (Fig. 29), Caloboletus
radicans,… Parmi les espèces mycorhiziennes probablement les plus remarquables dans cette zone, il faut
certainement mettre en exergue cette espèce méridionale
observée pour la première fois en Belgique en 2015 par
René CHALANGE, à la Montagne-aux-Buis : Sarcodon
quercinofibulatum !

Qu’ils soient mycorhiziens, endophytes ou qu’ils se mettent
éventuellement en latence durant les périodes chaudes et
sèches, notamment les saprotrophes qui dépendent
fortement de l’humidité ambiante pour se développer de
manière optimale ou, encore, qu’il s’agisse de parasites
comme les rouilles qui comptent sur leurs spores pour leur
descendance, tous les moyens pour subsister sont bons…

Fig. 30. – Puccinia buxi.
Fig. 29. – Rubroboletus satanas.

Cet écotone n’est évidemment pas réservé aux seules
espèces mycorhiziennes, de nombreuses espèces
saprotrophes s’y observent aussi, dont Lepista nuda, L.
sordida var. lilacea, L. irina, Macrolepiota mastoidea,…
La présence du buis, en sous-étage de la chênaie-charmaie
calcicole et plus particulièrement dans la région du Viroin,
permet d’augmenter encore ce nombre d’espèces fongiques
observables en pelouse calcicole et en périphérie avec
notamment ces espèces corticoles ou lignicoles à découvrir
sur les branches mortes ou vivantes de buis (mais non
nécessairement exclusives de cette espèce) : Karstenia
rhopaloides, Hymenochaete cinnamomea, Xylodon
nespori, Dendrothele acerina f. buxi, Geejayessia
desmazieresii, Peniophora proxima et, sur feuilles
vivantes, Puccinia buxi (Fig. 30).

Nous l’avons vu, les pelouses calcicoles sont loin d’être
homogènes. Elles peuvent combiner leurs deux faciès
(meso- et xerobrometum), une fruticée peut y être intégrée,
de même qu’un bouleau ou un chêne isolé. Elles sont
bordées par d’autres écosystèmes, notamment boisés, qui
vont les influencer de manière plus ou moins linéaire de
même que leur gestion, par pâturage, par gyrobroyage, par
le feu… Tous ces paramètres vont fortement et
inévitablement influencer leur composition fongique.
Cette étude est loin d’être exhaustive, elle n’est que le
reflet de prospections récentes actuelles et plusieurs
groupes mériteraient d’être plus amplement investigués.
Certaines découvertes sont encore inédites. Dans ces
écosystèmes particuliers d’autres surprises sont sans nul
doute à prévoir !
.

VARIANTE DE L’ÉCOSYSTÈME : PELOUSE
CALCICOLE AVEC BOULEAUX ISOLÉS
Pour chaque espèce ligneuse qui s’intègre au sein d’une
pelouse calcicole, un cortège fongique particulier s’ensuit.
Dès lors, lorsqu’un bouleau verruqueux se développe en
plein milieu d’une pelouse calcicole, il ne faut pas s’étonner
de voir fructifier différentes espèces mycorhiziennes telles
Amanita oblongispora, Lactarius citriolens, L. uvidus,
Tricholoma stiparophyllum…

CONCLUSIONS
La pelouse calcicole est loin d’être dénuée de
champignons, malgré l’image de lieu « aride » qui lui est
souvent associée et qu’il ne faut certes pas minimiser…

REMERCIEMENTS
J’ai eu la chance de connaître Albert MARCHAL (19362017), grand mycologue couvinois qui m’a enseigné
beaucoup de choses, montré des lieux, remis sur le « droit
chemin » dans bien des déterminations. Je lui dédie cet
article en guise de remerciements.
Ma gratitude va aussi à tous ceux, trop nombreux pour être
cités ici, qui ont jalonné et continuent à jalonner mon
parcours de mycologue et sans qui je n’aurais pas pu
réaliser cet inventaire. Enfin, mille mercis à Marianne
MABILLE pour la traduction du résumé et à Michel ROUARD
pour sa relecture et ses conseils très avisés.

81

BIBLIOGRAPHIE

CLESSE B., 2015. – Quelques espèces fongiques rares et/ou
nouvelles pour la Belgique ou pour la Wallonie en 2014
et en 2015. Bull. Assoc. Mycol. francoph. Belgique 8 : 217.
CLESSE B., 2018. – Quelques espèces fongiques rares et/ou
nouvelles pour la Belgique, ou pour la Wallonie, en 2015-

2017. Bull. Assoc. Mycol. francoph. Belgique 11 : 22-68.
COURTECUISSE R. & DUHEM B.,1994. – Guide des
Champignons de France et d’Europe. Delachaux &
Niestlé. 480 p.
EYSSARTIER G. & ROUX P., 2017. – Le Guide des
Champignons, France et Europe. Belin. 1152 p.

Sur le Web :
http://www.indexfungorum.org/names/names.asp
https://www.mycobank.org/page/Simple%20names%20search
https://www.mycodb.fr/glossaire.php

Pour les termes spécifiques de mycologie, le lecteur pourra consulter utilement le site :
https://www.mycodb.fr/glossaire.php

Crédit photographique : Bernard CLESSE

82

Natura Mosana, nouvelle série, n° 74(2021) : 83-86

L’entomologie dans la région de Charleroi
Michel ROUARD*

RÉSUMÉ
Cette note mentionne les activités entomologiques dans la région de Charleroi et de l’Entre-Sambre et Meuse en citant les personnes
qui ont contribué ou qui sont toujours actives dans l’étude de l’entomofaune.

ABSTRACT
Entomology in the Charleroi region. This note describes the entomological activities carried out in the Charleroi and Entre-Sambre
et Meuse region citing the people in the region who contribute or have contributed to knowledge of insects.

* rue Pauline Hubert 51, B-6470 Rance. Courriel : rouard.michel@skynet.be

____________________________________________________________

INTRODUCTION
Il nous a paru intéressant de rendre hommage aux
personnes qui se sont engagées dans cette discipline, en
évoquant leur spécialité, leurs publications et la destination
finale éventuelle de leurs collections. Leur mérite est
d’autant plus grand si l’on songe au relatif isolement dans
lequel les amateurs, souvent autodidactes, ont travaillé et
travaillent encore, compte tenu de l’éloignement relatif des
deux principales institutions scientifiques de référence que
sont l’Institut royal des Sciences naturelles (IRScNB),
siège de la Société royale belge d’Entomologie (SRBE), et
Gembloux Agro-Bio Tech – ULiège (anciennement
Faculté des Sciences agronomiques de Gembloux, FSAGx)

LES PERSONNALITÉS
BEAULIEU Jean (1925-1999), de Charleroi [SRNC, SRBE].
Il s’est exclusivement consacré à l’étude des coléoptères
(Belgique et France). Pharmacien à Charleroi, il réunissait,
chaque jeudi dans le laboratoire de son officine, tous les
amateurs qui lui faisaient l’amitié de répondre à son
invitation (Fig. 1). De ces réunions informelles et bon
enfant a résulté un groupe de coléoptéristes dont certains
ont de nombreuses publications à leur actif. Jean BEAULIEU
avait à cœur d’accueillir les débutants, mais aussi les
étudiants pour les aider (la « boîte d’insectes » des
candidats agronomes est souvent un casse-tête). Il a
régulièrement publié ses listes de récoltes intéressantes
(Bulletin SRBE). Sa collection a été léguée à la FASAGx.

Fig. 1. – Une réunion chez Jean BEAULIEU en 1994 : Jean
BEAULIEU, Marc DELBOL, Guy LHOST, Monique FELIX,
Bernard DENIS, Jean-Michel LEMPEREUR, Michel ROUARD et
Charles VERSTRAETEN. (Photo : auteur anonyme)

BIVORT Arthur, de Fleurus [SRBE, dès1922].
BRIARD Maurice, de Fontaine-l’Évèque [SRBE dès
1922].
CARBONNELLE Sébastien, d’Aublain [SRNC, SRBE].
Spécialisé en cécidologie, il a publié quelques découvertes
intéressantes pour nos régions. Il est co-auteur d’un Aidemémoire de cécidologie.
CARON Stéphane, de Ligny [SRBE].
CLAEREBOUT Stéphane, de Bailièvre [SRNC, SRBE].
Travaille au Cercle des Naturalistes de Belgique à Vierves83

sur-Viroin. Il est l’auteur (ou co-auteur) de diverses
brochures, notamment pour la reconnaissance des
Héteroptères pentatomoïdes, des Orthoptères (criquets,
sauterelles, …), des Papillons de jour, ainsi que d’une clé
de reconnaissance des principaux ordres d’Hexapodes. Il a
également co-signé quelques articles récents sur les
Hétéroptères (SRBE).
DELBOL Marc, de Jumet SRNC, SRBE. Il s’intéresse
exclusivement à l’étude des Coléoptères Curculionidae de
l’Europe de l’Ouest. Il est l’auteur de l’imposant catalogue
des Curculionidae de Belgique. Il publie régulièrement des
notes concernant certains groupes de charançons. Il est
collaborateur scientifique à l’Université de Liège –
Gembloux Agro-Bio Tech. Il se charge de la mise à jour
permanente du catalogue en ligne des Curculionidae1.
DRUMONT Alain, originaire de Nalinnes, [SRBE].
Entomologiste à l’Institut des Sciences Naturelles. Il publie
régulièrement ses travaux notamment dans Lambillionea,
essentiellement consacrés aux Coléoptères Cerambycidae
et Trictenotomidae. Il est l’auteur du chapitre concernant
les Prioninae (Cerambycidae) dans le catalogue des
Coleoptères Paléarctiques, volume 6. Il a également
participé à la partie Coléoptères de l’encyclopédie « Les
Insectes du Monde » publiée en avril 2021.
DRUET Jules, (1892-1970), de Dampremy [SRNC ,
SRBE]. Cet instituteur s’est occupé de Lépidoptères du
monde entier, s’intéressant spécialement aux Noctuidae.
DUFRANE Abel, de Frameries (1880-1960). [SRBE,
SRNC]. Membre fondateur des Naturalistes de Charleroi.
Une longue carrière en République Démocratique du
Congo lui permit d’étudier les Lépidoptères du Kivu. Il est
l’auteur de nombreuses publications (Bulletin SRBE,
Lambillionea, Société linnéenne de Lyon, …).
DUHOUX René, (1933-2010), de Biesmerée [SRBE]. Il
s’est intéressé aux Coléoptères du monde entier.
DUTRIFOY Jean-Baptiste, de Mellet. Professeur de
zoologie à la Haute École Provinciale de HainautCondorcet (Ath), Il est responsable des collections des
étudiants en agronomie de cet institut.
FONTAINE Maurice, (1913-1994), de Marcinelle [SRNC].
(Marcinelle) (Fig. 2). Médecin en République Démocratique du Congo, il fut spécialiste des Lépidoptères
belges et africains, participant à la connaissance des
papillons de nos régions. Il a publié, surtout dans
Lambillionea, plusieurs études sur la faune belge et surtout
africaine. Il a légué ses collections au Musée Royal de
l’Afrique Centrale.
GEORGES Philippe, (1950-2011), de Strée. Biologiste
spécialisé dans les Lépidoptères.
GILLARD Marcel, de Presgaux [SRNC, SRBE].
Spécialiste des Lépidoptères, il avait à cœur la formation
1

à consulter sur https://curculionidae.be
84

des amateurs, qui l’ont souvent accompagné dans ses
sorties et surtout dans ses soirées destinées à la
connaissance et à l’inventaire des Hétérocères de nos
régions. Il a participé à de nombreuses expositions et
activités didactiques, grâce notamment à des cartons présentant la vie des divers groupes de papillons. Il a édité, de
1984 à 2004, la feuille de contact « Dernières nouvelles »
qui était le lien des entomologistes s’intéressant aux
papillons migrateurs. En 2020, ses collections didactiques
ont été acquises par un particulier.
4

Fig. 2. – Trois spécialistes des lépidoptères africains :
Maurice FONTAINE, Robert DUCARME (Bruxelles), Jacques
HECQ. (Photo : R. DUCARME).

HECQ Jacques, (1926-2012), de Marcinelle [SRNC]
Ingénieur agronome, tôt initié à l’entomologie par son
voisin Maurice FONTAINE, il fit une brillante carrière au
Congo jusqu’à son indépendance. Il faisait d’importantes
récoltes d’insectes (Lépidoptères et Coléoptères) qu’il
confiait au Musée Royal de l’Afrique Centrale (Musée
Royal du Congo à l’époque). Rentré au pays, il s’attacha à
l’étude sérieuse du matériel récolté. Il devint vite un
spécialiste incontesté de la faune lépidoptérique africaine.
Il s’attacha principalement à l’étude de familles réputées
difficiles, parvenant à y mettre de l’ordre.
Jacques HECQ a publié une quantité très impressionnante
de notes et d’ouvrages comprenant de nombreuses
descriptions d’espèces nouvelles. À partir de 1987, il prit
en charge la revue entomologique Lambillionea, avec toute
la rigueur qui le caractérisait, lui assurant ainsi la pérennité.
Son importante collection de Nymphalidae africains a été
confiée à l’Institut des Sciences Naturelles où elle est restée
groupée sous son nom. Elle renferme une très grande
quantité de types.
HECQ Philippe, de Ham-sur-Heure, Lépidoptères.
HENNUY Jean-Jacques, de Charleroi [SRNC, SRBE].
Auteur d’une remarquable collection de Coléoptères
(Europe) et particulièrement d’Elateridae. Il se passionne
pour les élevages d’insectes et tente des expériences dans
lesquelles il obtient des hybrides inattendus. Il se consacre
aussi à l’étude des Hyménoptères Chrysididae (« Guêpes
de feu »).

HOFFMAN Kurt (†2017). Travaillait au Cercle des
Naturalistes de Belgique à Vierves-sur-Viroin. Excellent
vulgarisateur, il avait la manière rare de faire connaître les
insectes chez tous les stagiaires du Centre Marie Victorin à
Vierves. Il avait beaucoup œuvré pour la mise en gestion
et les débroussaillements des pelouses calcicoles de la
Calestienne, devenues « paradis » des insectes.

RENSON Sébastien, travaille au Cercle des Naturalistes de
Belgique à Vierves-sur-Viroin. Cet entomologiste a rédigé
quelques brochures d’initiation à divers groupes dont : les
coccinelles, les longicornes, les libellules, mais aussi un
autre groupe d’arthropodes traité par les entomologistes,
les araignées.

IGNACE David, de Courcelles. Cet entomologiste se
consacre à l’inventaire des Coléoptères de l’entité de
Courcelles, et également aux fourmis de nos régions. Il a
créé son site internet où il présente ses travaux
accompagnés illustrés par ses macrophotographies
d’insectes de qualité remarquable2.

ROUARD Michel, de Rance [SRNC, SRBE depuis 1967].
Auteur d’une importante collection de Coléoptères de
Belgique, surtout xylophages et de plusieurs notes de
captures intéressantes publiées dans le Bulletin de la
SRBE. Il se consacre désormais exclusivement aux
Scolytidae. Organisateur, en 1992, d’une exposition
d’insectes vivants à l’École Provinciale d’agriculture de
Chimay.

LEMPEREUR Jean-Michel, de Falisolle [SRBE].
Spécialiste des Coléoptères (Belgique, France), il
s’intéresse particulièrement à l’étude des Curculionidae. Il
est l’auteur de plusieurs publications (Bulletin SRBE,
Lambillionea). Il découvre souvent des insectes méconnus,
grâce à des techniques de récolte pointues (tamisage, …).
Il fut à l’initiative, en 2000, de l’organisation d’une belle
exposition d’insectes vivants à Tamines avec la
participation de plusieurs coléoptéristes de la région.
LHOST Guy († 2000), de Marcinelle. Trésorier de la SRNC
durant plus de 30 années. Explorant la Belgique et la
France, Guy LHOST avait réuni une très importante et très
soignée collection de Coléoptères (surtout des phytophages) forte d’environ 15 000 exemplaires. Peu après son
décès, sa collection fut acquise par la Faculté des Sciences
agronomiques de Gembloux. Guy LHOST a très régulièrement communiqué ses captures intéressantes lors des
réunions de la SRBE qu’il manquait rarement. Il fut appelé
à assumer la présidence de la Société Royale Belge
d’Entomologie en 1982/83. (ROUARD, 2000)
LIMBOURG Pol, de Luttre [SRBE]. Il travaille à l’Institut
des Sciences Naturelles et participe activement à la
connaissance des insectes de nos régions qu’il explore
régulièrement. Il s’intéresse à la systématique des
Rutelinae (Coléoptères Scarabaeidae) africains pour
lesquels il a déjà publié de nombreux travaux (Bulletin
SRBE, Entomologia Africana, …).
MAL Noël, de Marcinelle. Il se consacre à l’étude des
Coléoptères Tenebrionidae mondiaux. Ses travaux ont été
publiés dans de nombreuses revues entomologiques Il se
consacre également à la photographie entomologique. Ses
photos, souvent d’insectes Coléoptères spectaculaires,
(Fig. 3) sont hébergées sur deux sites3.

Fig. 3. – Petrognatha gigas, récolté par Noël MAL.

T(Photo
AVIAUX: N.
Benoît,
MAL)de Montigny-le-Tilleul. Auteur de la
partie entomologie dans la brochure Guide-Nature
consacrée à la réserve naturelle de Landelies.
TOMSON Jean-Marc, de Marcinelle [SRNC]. Il s’intéresse
particulièrement aux Lépidoptères, notamment les Hétérocères.
TRIFAUX Damien, de Gonrieux, Lépidoptères.
WARGE Laurent, de Gerpinnes, (Lamb.), Lépidoptères.
WAUTHY Georges, de Biesme, puis Ligny. Docteur en
biologie, spécialiste des acariens détritivores du sol, Chef
de section au Département d’Entomologie de l’IRScNB. Il
a assumé la présidence de la SRBE en 1998/1999, et de
nouveau 2004/2005.
Un certain nombre de naturalistes communiquent leurs
observations sur le site en ligne « Observations.be » géré
par Natagora. Ainsi, pour la région :
DEFLORENNE Philippe de Froidchapelle, surtout
Odonates
EVRARD Pol de Falisolle, SRBE
GENARD Philippe de Souvret, SRBE
PAQUET Alain de Tarcienne
PIERRET Sébastien, Conservateur associé à la réserve
naturelle de Virelles)

MOUCHERON Bernard, de Tilff [SRBE]. Spécialisé dans
l’étude des Coléoptères Scolytidae, il a publié quelques
notes très intéressantes concernant ce groupe (Bulletin
SRBE, Lambillionea). Il a longtemps habité à Lobbes et a
régulièrement exploré l’Entre-Sambre-et-Meuse, y faisant
des inventaires, et surtout des trouvailles originales. Ses
récoltes sont régulièrement déposées à l’IRScNB.
2

http://www.insectesdebelgique.be

3

http://projects.biodiversity.be/openuprbins/
https://www.flickr.com/photos/worldwidebeetles/albums/

85

tions de la plupart d’entre eux ont rejoint celles des
institutions scientifiques de référence.

ROBERFROID Olivier de Couvin, SRNC.

CONCLUSION
Après un siècle de prospections, essentiellement dans la
région Entre-Sambre et Meuse, une trentaine d’entomologistes ont contribué à la connaissance de la faune de cette
belle région mais certains se sont également intéressés à
des contrées bien plus lointaines.
Leurs travaux ont fait l’objet de publications dans diverses
revues scientifiques ; ils ont ainsi contribué à la connaissance du monde des insectes par le biais de publications de
vulgarisation et l’organisation d’expositions. Les collec-

REMERCIEMENTS
Merci à mes amis et collègues qui ont bien voulu me faire
part de leurs observations et leurs remarques : Marc
DELBOL, Jean FAGOT, Noël MAL, Alain DRUMONT, JeanMichel LEMPEREUR, Jean-Jacques HENNUY et Marcel
GALANT. Merci à Marianne MABILLE et Mauro ORRÙ pour
leur relecture attentive.

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

Anonyme, 1994. – Inventaire des associations ayant leur
siège social à l’IRScNB. Dont un extrait du MB de 1922
avec une liste des membres de la SRBE. (Document
interne).
CLAES V., ROUARD M., GILLARD M., 1998. – Papillons
d’hiver (lépidoptères remarquables par leur dimorphisme
sexuel et leur dispersion hivernale). Forêt Wallonne 34 :
18-24.
COLLECTIF, 1988. – Réserve naturelle de Landelies.
Brochure éditée par Commune de Montigny-le-Tilleul,
104 p.
DETHIER M., WEGNEZ PH., LAYS P., 2014. – Le Cercle des
Entomologistes Liégeois expose… Natura Mosana,
nouvelle série 67 : 3-7.
HENIN J. M., 2005. – Petite note sur les Scolytidés de
Belgique ou hommage aux « scolytologues » amateurs.
Forêt Wallonne 74 : 3-9.

86

JEUNIAUX C., 1995. – Le Cercle des Entomologistes
Liégeois commémore le centenaire de sa fondation.
Natura Mosana 48(4) : 90-94.
LECLERCQ J., 2014. – Choses déjà dites et non dites dans
l’histoire du Cercle des Entomologistes Liégeois (18952010). Natura Mosana, nouvelle série 67 : 9-35.
ROUARD MICHEL, 1970. – Le mimétisme chez les insectes.
Agro 22 : 15-21.
ROUARD MICHEL, 2000. – Notice nécrologique : Guy
LHOST. Bull. Soc. r. belg. Entomol. 136 : 68.
VERSTRAETEN CH., 1983. – Les grands noms de
l’entomologie francophone en Belgique. Bull. Soc.
Entomol. Fr. 88(1-2). Livre du Cent Cinquantenaire :
122-134.
Site internet consulté : https://WWW.mettet.be

Natura Mosana, nouvelle série, n° 74 (2021) : 87-94

L’herbier de la Société des Naturalistes de Charleroi
Philippe MARTIN*

RÉSUMÉ
Les herbiers sont une source de renseignements importante, témoins d’une activité floristique toujours utiles mais aussi d’éléments
historiques tout aussi intéressants. C’est le cas de l’herbier de la Société des Naturalistes de Charleroi dont l’analyse rapporte des données
biogéographiques intéressantes du premier tiers du 20e s. C’est aussi le prétexte pour évoquer une partie de l’activité botanique de la
Société à l’époque.
ABSTRACT
The herbarium of the Society of Naturalists of Charleroi. Herbaria are an important source of information, providing ever-useful
scientific activity as well as historical elements of interest. This is the case with the Charleroi Society of Naturalists’ herbarium, whose
analyses report interesting biogeographical data from the first third of the 20th century. It also allows one to recall aspects of the botanical
activity of the Society at the time.

* Département de Biologie, Université de Namur, B-5000 Namur. Courriel : philippe.martin@unamur.be
____________________________________________________________

INTRODUCTION
Au-delà de leur valeur botanique intrinsèque, les herbiers
évoquent aussi des éléments historiques liés à leur auteur
ou au contexte dans lequel ils ont été créés. Toutefois, ces
notions sont souvent discrètes et ne se révèlent parfois que
par des traces indirectes, aléatoires et que le temps a
largement dispersées, sinon englouties. Ainsi, nombre
d’herbiers anciens sont anonymes, orphelins d’une
paternité que la transmission orale n’a pas conservée et
d’une genèse qui n’a guère laissé de traces.
C’est le cas de l’herbier de la Société des Naturalistes de
Charleroi, telle qu’elle était désignée à l’époque de sa
création, une collection contenant 750 parts environ et dont
seules quelques lignes dans un compte rendu manuscrit
d’une assemblée évoquent la création1.

HISTORIQUE
Le dynamisme et le succès de la toute nouvelle société
carolorégienne dont on fête aujourd’hui le centenaire
s’inscrivent certainement dans l’ouverture et l’optimisme
de l’après-guerre, cette Grande guerre dont il faut au plus
vite oublier les affres. Et si le naturalisme n’est pas une
nouveauté – Jean MASSART, professeur à l’Université libre
de Bruxelles lance déjà dès le début du siècle ses plaidoyers
pour la conservation de la nature – le moment semble venu

pour l’exploration des richesses naturelles de la région de
Charleroi. C’est le vœu de son président, le Dr Arthur
CULOT. Dans la foulée, l’élaboration d’un herbier s’impose
automatiquement comme le témoin privilégié des
excursions mais également comme outil didactique à une
époque où l’herbier gardait toutes ses lettres de noblesse.
Le rapport sur l’activité en 1929, présenté lors de
l’assemblée générale du 26 janvier 1930 par le secrétaire
Pol BUCHET : …les plantes recueillies lors des excursions
sont choisies avec soin, parfaitement préparées et classées
scientifiquement et mises en herbier par Mr le Président,
Mr Masson, MM Debouny et Hunin. Certaines de ces
planches sont de véritables chefs-d’œuvres [sic] et de
coloris et de finesse de présentation. La Société a tout lieu
de féliciter ces messieurs de leur patience et de leur activité
scientifique, les planches telles que nous les possédons
pour le moment sont dignes de figurer dans les plus beaux
herbiers des grandes collections.
L’herbier est donc réalisé par quatre acteurs importants
dans le volet botanique de la Société :
▪ Arthur CULOT [1872-1953], docteur en médecine,
président de 1922 à 1953, dont le rôle fut déterminant
dans la mise en place de la Société et son succès
▪ Georges DEBOUNY [1897-1975], professeur de
mathématiques et de sciences naturelles à l’Athénée de
Châtelet, membre actif du comité directeur (STEVENS,

Compte rendu de l’assemblée générale du 26 janvier 1930.
(Archives Soc. Nat. Charleroi).
1

87

1975), et qui a laissé également un herbier personnel,
d’une centaine de parts, conservé à UNamur
▪ François HUNIN [1895-1986], instituteur, successeur de
A. CULOT à la présidence, de 1954 à 1958
▪ M. MASSON, directeur des postes. C’est lui qui a pris en
charge le montage de l’herbier comme le précise le
rapport du Secrétaire sur l’activité de la Société en
1931 :… Le jeudi 5 mars, Mr le Directeur des Postes,
Masson, nous fit faire agréablement un examen
approfondi des herbiers de la Société. Nous tenons à
rendre ici, hommage à Mr Masson, qui, avec un soin
tout particulier et une méticulosité que l’on ne se lasse
d’admirer, à confectionner ces herbiers. Certaines
feuilles sont d’une telle finesse et d’une si grande
richesse de coloris naturels, qu’elles semblent de
réelles planches de la plus fine chromolithographie.

rendus rédigés dans les premières années d’activités. Assez
logiquement, c’est le Hainaut qui tient la première place
des prospections (Tabl. 1), avec les trois-quarts des entrées
dans la collection, suivi par la province de Namur qui en
totalise 87. Dans la région de Charleroi (Fig.1), c’est la
commune de Châtelet qui affiche le plus grand nombre de
récoltes3. Mais des récoltes importantes ont été également
réalisées au littoral (de La Panne à Knokke, lors de
l’herborisation annuelle de la Société botanique de
Belgique, en 1929).

Brabant
Flandre occidentale
Hainaut
Acoz
Binche
Bouffioulx
Charleroi
Châtelet
Couillet
Courcelles
Dampremy

Les récoltes s’étendent de 1928 à 1931, avec quelques
éléments plus tardifs (1933, 1935 et, très ponctuellement,
1945 et 1953).
Enfin, il semble que d’autres herbiers aient été acquis,
comme l’indique la petite présentation de la Société dans
le premier numéro de Natura Mosana (Anonyme, 1948),
mais aussi le rapport d’activité de 1931 évoquant le legs
d’un membre fondateur, Léon KRÉMER, pharmacien à
Couillet, une œuvre de tant de soins et de travail
méticuleux2. C’est le cas aussi de l’herbier de François
HUNIN légué à sa mort à la Société (HAVRENNE et al.,
1987). Ont-ils été intégrés dans l’herbier principal, sans
traces dans ce cas, ou bien ont-ils carrément disparu ?

6
1
34
4
170
23
4
8

Provinces
4
Liège
65 Limbourg
562 Namur
Région de Charleroi
Erquelines
2 Marchienne-au-Pont
Fleurus
8 Marcinelle
Gerpinnes
4 Monceau/Sambre
Gozée
3 Montigny-le-Tilleul
Jamioulx
5 Montignies/Sambre
Joncret
1 Mont/Marchienne
Landelies
1 Nalinnes
Loverval
40 Presles

7
6
87
18
48
3
33
37
47
9
18

Tabl. 1. – Répartition des récoltes par provinces et par
communes pour la région de Charleroi.

En 2014, la Société des Naturalistes de Charleroi, à
l’initiative de sa présidente, Annette COLOT, a légué
l’herbier aux Collections botaniques de l’Université de
Namur (NAM).

LA MISE EN ŒUVRE
La facture de cet herbier est tout à fait classique, avec un
format 44 × 30 cm mais un grammage du support un peu
faible (± 90 g/m², contre 250 à 300 g/m² habituellement),
ce qui a nécessité un report sur bristol. Les étiquettes (Fig.
2) ont fait l’objet d’une impression soignée pour le cadre
fixe et les données variables sont calligraphiées. L’état
sanitaire est tout à fait satisfaisant, peu d’attaques
d’insectes ayant été constatées. Enfin, les déterminations
sont tout à fait correctes, si l’on excepte de rares
confusions, comme Goodyera repens, récolté à Ave-etAuffe en août 1930 et étiqueté Spiranthes autumnalis.
Fig. 1. – Localisation des récoltes dans la région de Charleroi.
(Carte modifiée d’après http://www.fagc.be)

L’INVENTAIRE
Il est fort possible que les récoltes aient été liées aux
activités de terrain de la Société, mais il est souvent
difficile d’en établir le lien précis, en l’absence de comptes
Rapport du Secrétaire sur l’activité de la Société en 1931.
(Archives Soc. Nat. Charleroi).
2

88

Quelques rares récoltes dans les provinces de Brabant,
Limbourg et Luxembourg, souvenir probablement
d’excursions dans ces régions, contredisent également le
G. DEBOUNY et F. HUNIN habitaient Châtelet et n’étaient pas
motorisés, ce qui explique ce faible rayon de prospection, limité
par la marche ou les moyens de transport de l’époque (J. MARGOT,
comm. pers.).
3

titre d’herbier régional imprimé sur les étiquettes (Fig. 2).
Avec près de la moitié des espèces répertoriées en
Belgique, l’herbier de la Société n’est pas exhaustif, mais
la plupart des plantes rares y sont présentes. Il n’y a aucune
occurrence étrangère.

Fig. 3. – Distribution de A. githago en Wallonie. (Source :
http://observatoire.biodiversite.wallonie.be).

Ambrosia artemisiifolia L., Astéracées
NAM 42413 Montignies-sur-Sambre, décombres, septembre
1931 et Ambrosia psilostachya DC., Astéracées
NAM 42415 Dampremy, bord du canal, août 1929

Fig. 2. – Exemple d’étiquette utilisée dans l’herbier.

Quelques spécimens marquants récoltés dans la région de
l’Entre-Sambre-et-Meuse sont évoqués ci-dessous, parmi
un ensemble assez conventionnel. Ils sont les témoins de la
présence historique de plantes déjà rares à l’époque, dans
un environnement où l’activité industrielle, spécifique de
cette région, était déjà majeure. Ils évoquent aussi des
milieux naturels de toute première importance, dont la
plupart ont disparu aujourd’hui en ces lieux, comme des
landes acidiphiles et des groupements prairiaux humides.
La pression urbaine et le développement industriel, notamment sidérurgique en bord de Sambre, ont entraîné
l’inexorable repli de ces espèces sinon leur disparition dans
la région. Les messicoles, dans une tendance plus globale
(FABRI, 1984), n’y ont pas échappé non plus.
Adonis annua L., Renonculacées [sub A. autumnalis L.]
NAM 41661 Estinne, moisson, juillet 1929.
A. autumnalis – et d’autres espèces du genre – est une des
messicoles emblématiques dont la disparition était inévitable en
raison des changements drastiques de l’agriculture au cours des
dernières décennies. AIGRET invoque ainsi la grande réduction
de la culture d’épeautre dans la zone calcareuse (CHALON et
al., 1914). D’autant que l’espèce comptait déjà parmi les plus
rares au début du 20e s. Elle n’a plus été observée en Belgique
depuis l’immédiat après-guerre et aujourd’hui on peut la
considérer comme éteinte dans toute la dition de la Flore de
LAMBINON & VERLOOVE (2012).

Le genre Ambrosia est surtout connu par A. artemisiifolia, une
xénophyte nord-américaine dont un spécimen est présent aussi
dans l’herbier (NAM 42413). Le caractère invasif de cette
espèce pose un problème sanitaire considérable en Europe
plutôt méridionale et centrale par le caractère très allergisant de
son pollen (MARTIN & LAMBINON, 2008). La Belgique semble
épargnée actuellement, avec moins de cent occurrences
(MAHIEU & MONTY, 2020), assez instables car les gelées
précoces impactent la floraison de cette plante de jours courts.
A. psilostachya est encore moins fréquente en Belgique, et plus
difficile à identifier. La localisation de ces exemplaires en
milieux fortement anthropisés est tout à fait conforme à
l’écologie européenne de ces adventices.

Artemisia annua L., Astéracées
NAM 41586 Montignies-sur-Sambre, décombres, sept. 1931
L’Armoise annuelle est bien connue aujourd’hui pour
l’antipaludique qu’elle synthétise, l’artémisinine. La plante est
caractéristique, par sa couleur vert clair et ses feuilles à
segments très fins. C’est une eurasiatique mais elle est inféodée
aux zones tempérées chaudes, ce qui limite son extension vers
le nord. En Belgique, elle garde donc un statut d’adventice et
ne se rencontre guère aujourd’hui, comme en 1931, que dans
les décombres.

Bunium bulbocastanum L., Apiacées
NAM 41300 Montignies-sur-Sambre, moisson, juillet 1928
Cette Apiacée des moissons sur sols calcaires a régressé
drastiquement dans ses stations classiques, mais elle peut se
maintenir en dehors, notamment dans les pelouses calcicoles où
il conviendrait de la rechercher activement, pour établir son
statut actuel, notamment dans son foyer principal, le district
mosan (Fig. 4).

Agrostemma githago L., Caryophyllacées
NAM 42436 Marcinelle, moisson, juillet 1928
Le commentaire précédent peut s’appliquer à la Nielle des blés.
Mais le constat est d’autant plus criant que l’espèce était jadis
abondante, voire invasive dans certaines cultures (Fig. 3). Les
neuf dixièmes des localités ont disparu après 1955 (VAN
ROMPAEY & DELVOSALLE, 1978) et aujourd’hui, si la plante
refait son apparition, c’est dans un contexte artificiel, à la faveur
des semis dans les bandes conservatoires en bordure de champs
cultivés (MARTIN & LAMBINON, 2012).

Fig. 4. – Distribution de Bunium bulbocastanum.
(Source : http://observatoire.biodiversite.wallonie.be).

(Source

89

Fig. 5. – Helleborus viridis subsp. occidentalis. Collections botaniques de l’Université de Namur (NAM)

90

Fig. 6. – Vaccaria hispanica (syn. Saponaria vaccaria). Collections botaniques de l’Université de Namur (NAM).

91

Butomus umbellatus L., Butomacées
NAM 41401 Montignies-sur-Sambre, prairie inondée, août
1929 (Fig. 7)
On peut supposer que le lieu de récolte de cette espèce
hélophyte remarquable était proche de la Sambre, d’où elle a
disparu sur tout le tronçon belge, en raison de la pollution et de
la canalisation. Le Jonc fleuri était aussi présent jadis çà et là le
long de la Meuse. Aujourd’hui, il n’est plus guère représenté en
Wallonie que sur les cours de la Semois et du Viroin (Fig. 5).

Daphne mezereum L., Thyméléacées
NAM 44624 Bois communal, Châtelet, bois, mars 1928
Le Bois-gentil n’est probablement pas indigène dans toutes ses
localités, notamment au nord du sillon Sambre-et-Meuse, car il
est souvent planté pour sa belle floraison printanière. Certaines
stations forestières sont alors secondaires, par ornithochorie.
Ce daphné est répandu mais les pieds sont toujours isolés,
probablement en raison d’une germination difficile. On
soulignera l’ambiguïté du nom vernaculaire de la plante qui est
particulièrement toxique.

Helleborus viridis subsp. occidentalis (Reut.) Schiffn.,
Renonculacées (Fig. 5)
NAM 41670 Mont-sur-Marchienne, Falise, avril 1928
MARCHAL (1975) signale le taxon dans l’Entre-Sambre-etMeuse (IFBL J4.56.14), tout comme LAWALRÉE (1995)
l’indique à proximité (IFBL J4.44/55). Cette espèce forestière
calcicole n’a jamais été largement distribuée, mais elle marque
actuellement une nette régression due probablement à des
gestions forestières brutales, même si la plante est généralement
abondante dans ses stations.
Fig. 7. – Distribution de Butomus umbellatus.
(Source : http://observatoire.biodiversite.wallonie.be).

Filago lutescens Jord., Astéracées [sub F. germanica L.]
NAM 45103 Marcinelle, sablière de la Bruyère, août 1928

Filago minima (Smith) Pers., Astéracées
Carex reichenbachii Bonnet, Cypéracées [synonyme ? de
Carex pseudo-brizoides Clavaud]
NAM 43419 Loverval, bois, juin 1943
La station de Loverval de cette espèce a été découverte par A.
CULOT au lieu-dit Bultia, entre Loverval et Gerpinnes, en
compagnie d’un taxon proche, C. brizoides. L’espèce était
nouvelle pour la Belgique et a fait l’objet d’une publication
(CULOT & DE LANGHE, 1944) et l’exemplaire de l’herbier de
Charleroi mentionne le Dr CULOT comme récolteur. Par
ailleurs, l’herbier de l’Université de Namur (NAM) dispose
d’une récolte à cet endroit de Jacques LAMBINON en juin 1953
(NAM 45794) et d’une autre que l’on doit à Jules MATHOT
datant de juin 1950, mais localisée, probablement par erreur
« dans un bois à Gerpinnes ». Le site du Bultia a été aménagé il
y a une quarantaine d’années en aire commerciale bâtie et
asphaltée (F. MANTESSO, comm. pers.), ne laissant aucune
chance à la survie de cette espèce.

NAM 45102 Marcinelle, sol sablonneux, juillet 1930
Les Cotonnières ont toujours été des espèces rares, hormis F.
minima qui l’est un peu moins, en raison d’une écologie plus
large car elle n’est pas messicole. F. lutescens ne semble plus
exister qu’en de très rares localités, et sa station à Marcinelle ne
semble pas avoir été mentionnée (cf. GT Atlas de la Flore de
Wallonie.

Legousia hybrida (L.) Delarbre, Campanulacées [sub
Specularia hybrida DC.]
NAM 41409 Bouffioulx, s.d. (v. 1930)
Plus encore que L. speculum-veneris, la Petite spéculaire, déjà
faiblement représentée dans le premier tiers du 20e s. (Fig. 8), a
subi une pression agricole fatale à sa survie en Belgique.
L’espèce est plus xérothermophile que L. speculum-veneris.

Consolida regalis S.F. Gray, Renonculacées [sub
Delphinium consolida L.]
NAM 41667 Presles, moisson, juillet 1930
Le Pied-d’Alouette est en voie d’extinction en Belgique. Cette
belle messicole était pourtant encore assez commune à l’époque
de cette récolte. Cette euryméditerranéenne nitrocline,
caractéristique des chaumes de céréales après la moisson,
connaît une raréfaction dans toute l’Europe occidentale.

Cynosurus echinatus L., Poacées
NAM 39854 et NAM 40786, Châtelet, prairie, juin 1931 et mai
1932
Cette espèce méditerranéenne est une adventice fugace qui est
introduite avec certaines céréales. La récolte est antérieure à
1943, date d’introduction renseignée dans le Manual of the
Alien Plants of Belgium qui indique aussi que, si quelques
localités ont été signalées lors de ces dernières années, seule
celle des environs de la gare de Bruges se maintient4.
4

cf. https://alienplantsbelgium.myspecies.info/content/cynosurusechinatus

92

Fig. 8. – Distribution de Legousia hybridus.
(Source : http://observatoire.biodiversite.wallonie.be).

Neotinea ustulata (L.) R.M. Bateman, Pridgeon & M.W.
Chase, Orchidacées [sub Orchis ustulata L.]
NAM 47469 Merlemont, bois, juin 1928
Les pelouses calcicoles de Merlemont ont longtemps été un des
plus remarquables sanctuaires des orchidées en Belgique,

jusqu’à ce que l’irresponsabilité de quelques industriels cupides
les condamne irrémédiablement (COULON, 1974). Il est curieux
de ne voir dans l’herbier que cette espèce, avec Anacamptis
pyramidalis, comme récoltes d’orchidées à Merlemont alors
qu’une vingtaine d’espèces étaient connues sur le site et ses
environs. D’autant que le rapport sur l’exercice 1928 présenté à
l’assemblée générale du 20 janvier 1929 précise que le 17 juin
[eut lieu une] excursion à Merlemont et à Villers en Fagne,
dirigée par Mr Cornil, régent à l’École Moyenne de
Philippeville. Excursion très intéressante surtout par la récolte
d’orchidées.

Pyrola minor L., Pyrolacées
NAM 41749 Marcinelle, lande à bruyères, juin 1929
P. minor est en recul, notamment en Ardenne, mais l’espèce
peut apparaître dans des milieux reprofilés comme des
carrières, des terrils ou des talus de voiries, dans un contexte de
recolonisation forestière sur des sols acides. La lande à bruyère
de Marcinelle devait être un haut-lieu de la floristique
carolorégienne (CULOT, 1929). Elle a disparu de même que les
petites tourbières acides qui y étaient décrites, hormis une petite
surface sur l’ancien site de moto-cross de Jamioulx, tout proche
(F. MANTESSO, comm. pers.)

Scandix pecten-veneris L., Apiacées
NAM 41318 Châtelet, moisson, juin 1929
Le Peigne-de-Vénus est une autre espèce messicole à avoir subi
l’impact de l’agriculture moderne, au point d’avoir disparu de
Wallonie de la plupart de ses localités, comme toutes les autres
ombellifères messicoles.

Scrophularia vernalis L., Scrophulariacées
NAM 44263 Presles, bois, juin 1930
S. vernalis est une espèce sud-est européenne, ponctuellement
naturalisée en Belgique, au départ de jardins ou associée à des
sites de plantes castrales. La découverte de la plante à Presles
ne date donc pas de 1938, comme suggéré par DUVIGNEAUD &
SAINTENOY (1998) sur base d’un spécimen d’herbier signé
VLEMINCK conservé à BR. NAM possède deux récoltes
ultérieures provenant du même endroit : l’une de P. HENRARD
en mai 1950, l’autre de J. MATHOT en 1949. Elle était toujours
présente en 2016 (PAELINCK, 2016).

Tephroseris helenitis (L.) B. Nordenstam, Astéracées [sub
Cineraria spathulaefolia Gmel.]
NAM 41382 Bouffioulx, buissons, mai 1928
Cette espèce d’Europe centrale a toujours été rare (limite d’aire
occidentale). Inféodée aux prairies fraîches non amendées, sa
quasi-disparition de la dition est liée à la généralisation des
intrants. La localité de Bouffioux est déjà mentionnée par
CULOT (1929).

Vaccaria hispanica (Mill.) Rauschert, Caryophyllacées
[sub L.] (Fig. 6)
NAM 42437
juillet 1928

Montignies-sur-Sambre, chemin de l’Épine,

La Saponaire des vaches est emblématique des vicissitudes de
la flore messicole. Éteinte de longue date en Belgique, on
l’observait jusque dans les années 1960 dans des cultures de
Vicia. Les seules présences contemporaines de cette espèce de
grande importance patrimoniale sont le fait d’introduction de
‘mélanges prairiaux’ dont l’origine est parfois douteuse.

On épinglera également, en dehors de la région de
Charleroi, quelques éléments significatifs pour la biogéo-

graphie botanique du pays, récoltés notamment lors de
l’herborisation annuelle de la Société royale de Botanique
en 1929 dans les pannes du littoral, à laquelle participaient
deux membres de la Société, MM. MASSON et BUCHET,
ainsi :
▪ Apium repens (Jacq.) Lag. (Apiacées), [sub Helosciadium
repens Koch] (NAM 41298 Oostduinkerke, panne
humide, juillet 1929)
▪ Halimione pedunculata (L.) Aell. (Amarantacées) [≡
Atriplex pedunculata L., sub Halimus pedunculatus
Wallr]. (NAM 42007 Knokke-Heist, alluvions marines,
juillet 1929)
▪ Petroselinum segetum Koch, Apiacées (NAM 41312 SasSlijken, Ostende, alluvions marines, juillet 1929).

CONCLUSION
Le dépouillement de l’herbier de la Société des Naturalistes
de Charleroi donne quelques indications originales sur la
répartition ancienne de certaines espèces rares ou
disparues. Cela souligne l’importance d’intégrer les
paramètres biogéographiques des vieux herbiers dans des
bases de données telle que la Liste rouge de la flore de
Wallonie. Enfin, l’évaluation très négative de la situation
floristique locale sur base de ces données historiques ne
doit pas briser le travail de prospection actuel qui révèle
parfois des redécouvertes inattendues.

REMERCIEMENTS
Merci à Mauro ORRU pour la mise à disposition du facsimilé des comptes rendus historiques de la Société et à
Flavio MANTESSO pour les divers renseignements
communiqués.

BIBLIOGRAPHIE
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et 28 mai 1928. Bull. Soc. r. Bot. Belg. 61(2) : 138-146.
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national de Belgique. 116 p.

NATURA MOSANA
reflète l’activité des naturalistes en Wallonie et est éditée depuis 1947 au nom de
la Société royale des Naturalistes de Charleroi
la Société Botanique de Liège
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Les thèmes de la revue couvrent tous les aspects de la botanique, la zoologie, la mycologie et l’ethnobotanique
régionales, de même que les sciences de la Terre, et rendent compte de la prospection et de l’inventaire biologique de
la région, de même que de la conservation de la nature.

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COMITÉ DE LECTURE
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Wépion

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Gembloux Agro-Bio Tech, Université de Liège

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Bibliothèque du Jardin botanique de Meise

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SECRÉTAIRE DE RÉDACTION et ÉDITEUR RESPONSABLE
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Bibliothèque Moretus Plantin, Université de Namur
rue Grandgagnage, 19
B-5000 Namur, Belgique
philippe.martin@unamur.be

En trame de couverture : Aristolochia clematitis, espèce d’une grande importance patrimoniale, présente dans un des hauts
lieux de la botanique mosane, les Grands-Malades (Beez, prov. de Namur, Belgique), où sa présence actuelle est bien précaire.
En médaillon : Hyoscyamus niger, la Jusquiame (La Bruyère, prov. de Namur, Belgique, 09/2019) (photo Philippe MARTIN).

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nouvelle série, 74, 2021

SOMMAIRE
Éditorial
p. 1
Philippe RYELANDT
Á propos de l’évolution de la répartition de la
Vipère péliade (Vipera berus) en Wallonie
p. 3
Philippe DEFLORENNE, Sébastien PIERRET et Roland DE SCHAETZEN
Découverte de nouvelles espèces de libellules
à Virelles (prov. de Hainaut, Belgique)
p. 13
Jean-Michel LECRON et Michel ROUARD
Anemone apennina L. et Tulipa sylvestris L. , deux plantes castrales connues
de longue date dans la Botte du Hainaut (prov. de Hainaut, Belgique)
p. 25
Jean-Michel LECRON
Les sphaignes et autres bryophytes remarquables de la Forêt Domaniale
de Rance et ses abords (prov. de Hainaut, Belgique)
p. 37
Marcel GILLARD et Michel ROUARD
Dix années de recensement de Lépidoptères
dans une forêt feuillue à Chimay (prov. de Hainaut, Belgique)
p. 61
Bernard CLESSE
Pelouses calcicoles et champignons : un duo improbable ?
p. 69
Michel ROUARD
Les entomologistes du Pays de Charleroi
p. 83
Philippe MARTIN
L’herbier de la Société des Naturalistes de Charleroi
p. 87